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Le premier ministre est poussé à prendre la présidence de l'UMP

La décision du tribunal correctionnel n'a pas seulement ébranlé le destin politique d'Alain Juppé. Elle risque de provoquer une nouvelle répartition des rôles entre les principaux dirigeants de la droite, à commencer par ceux du premier ministre et de son ministre le plus populaire, Nicolas Sarkozy. Première conséquence directe du jugement  : M.  Juppé ne peut en tout état de cause entrer au gouvernement comme cela avait été envisagé à l'Elysée au déplaisir de Jean-Pierre  Raffarin. Celui-ci redoutait de passer au second plan et craignait les conséquences, pour son gouvernement, de l'arrivée du rival de M.  Sarkozy.

La présidence de l'UMP doit-elle revenir à M.  Raffarin  ? Très réticent à la fin de la semaine dernière, le premier ministre n'écartait plus, dimanche 1er  février, selon son entourage, un scénario de cumul  : tout en restant chef du gouvernement, il pourrait, en cas d'effacement de M.  Juppé, briguer la direction du principal parti de la majorité. "Il y a des moments dans la vie où il faut assumer ses responsabilités", indiquait un proche du premier ministre.

Depuis plusieurs semaines, M.  Raffarin se présente comme "le chef de la majorité". Toutefois, ses attaches giscardiennes et son parcours au sein de Démocratie libérale semblaient jusqu'alors rendre difficile son accession à la présidence de l'UMP marquée par son héritage gaulliste. "Prendre la tête de l'ex-RPR, c'est courir le risque d'un tir de barrage des barons de l'ex-RPR, Jean-Louis Debré ou Michèle Alliot-Marie", expliquait encore vendredi, un proche de M.  Raffarin. "L'entretien accordé par Debré à Paris-Match -dans lequel le président de l'Assemblée nationale accusait le chef du gouvernement de se comporter en "boutiquier"- ne nous a laissés aucune illusion", précise la même source.

FAIRE BARRAGE

Les malheurs de M.  Juppé donnent toutefois du crédit à l'hypothèse d'une montée en puissance de M.  Raffarin. Aux yeux des chiraquiens et des juppéistes, le choix de M.  Raffarin présenterait l'avantage de faire barrage à une candidature de M.  Sarkozy à la succession de M.  Juppé. L'entourage du ministre de l'intérieur affectait de ne pas en prendre ombrage. "Au moins, Nicolas aura un ami à la tête du parti", ironisait un proche au lendemain du dîner qui a réuni, jeudi 29  janvier, les couples Raffarin et Sarkozy dans un moulin près d'Angoulême (Charente).

"De toute façon, indiquait un ministre juppéiste, il y a désormais, comme dans les pays anglo-saxons, une symbiose entre le gouvernement et le parti majoritaire. Dans ces conditions, il n'est pas absurde que le premier ministre soit le chef du parti ou vice versa." Autre avantage  : l'élection de M.  Raffarin à la tête de l'UMP pourrait ménager à M.  Juppé un retour dans ses fonctions, en cas de décision favorable de la cour d'appel. Cette éventualité serait bien moins évidente, si M.  Sarkozy s'emparait du principal parti de la droite. En cas de conflit, plusieurs députés proches de M.  Chirac citent les noms des ministres François Fillon, Dominique Perben, pour tenter de contrer les ambitions du ministre de l'intérieur  ; ou bien ceux d'Hervé Gaymard ou Renaud Dutreil afin d'installer une nouvelle génération à la tête de l'UMP.

Silencieux dans un premier temps, M.  Sarkozy a manifesté, samedi 31  janvier, sa solidarité à l'égard de M.  Juppé. Le ministre de l'intérieur fait montre d'une grande prudence  : "Il ne faut pas frapper un homme à terre", explique-t-on dans son entourage. La perte de "son meilleur ennemi" incite M.  Sarkozy à laisser passer un délai de décence avant de reprendre sa décision quant à une éventuelle candidature, ajoute-t-on. "Si le climat est à l'arrangement, précise la même source, Nicolas pourra discuter, si le climat est à "tout sauf Sarkozy", il sera candidat." Selon ses proches, le ministre de l'intérieur ne croit pas à un retrait de M.  Juppé. Une raison supplémentaire de maintenir le plus longtemps possible le doute sur ses intentions. "L'hypothèse d'une candidature de Nicolas Sarkozy à la présidence de l'UMP, assure-t-on, cela reste son meilleur argument..."

Pascal Ceaux et Christophe Jakubyszyn



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