§ Plusieurs dizaines de milliers de militants syndicaux de toute l'Europe 50 000 selon les organisateurs, près de 30 000 selon une première estimation de la police ont manifesté, mardi 14 février, à Strasbourg contre la directive Bolkestein sur les services. Les organisations syndicales d'une vingtaine de pays, dont des nouveaux membres de l'Union européenne, ont trouvé place dans un cortège très discipliné dont les gros bataillons étaient fournis par les syndicats français et allemands. En tête, une grande banderole rouge de la Confédération européenne des syndicats (CES) demandait, en anglais, des "services pour le peuple" et proclamait, en français : "Il est temps de changer la directive". "Nous manifestons pour des services pour tout le peuple, et pas pour des services seulement pour gagner de l'argent", a déclaré le secrétaire général de la CES, John Monks, au premier rang de la manifestation. "C'est très important que ce message parvienne aujourd'hui au Parlement européen", a-t-il ajouté. "La tension est toujours grande entre ceux qui défendent une Europe sociale et ceux qui veulent un marché libéral. Notre but était de créer un barrage entre ce libéralisme excessif, contre cette foi quasi religieuse dans le pouvoir du marché libre", a encore déclaré le leader syndical européen à la radio BFM. "Le principe du pays d'origine était vraiment inquiétant (...). C'était de la dynamite pure pour les relations entre les Etats membres et les travailleurs", a-t-il ajouté. En dépit du compromis négocié par leur groupe, les députés européens du Parti socialiste français ont participé à la manifestation. Pour eux, bien que "formellement retiré de la directive", le principe du pays d'origine "demeure la clé de voûte de la stratégie de la Commission européenne". § Le Parlement européen a fait un grand pas vers l'adoption de la directive Bolkestein après que les deux principaux groupes du Parlement européen ont réussi à applanir, mardi 14 février, l'essentiel des leurs différends sur ce texte. A l'issue d'une réunion de groupe mardi soir, le chef du Parti populaire européen (PPE, droite), Hans-Gert Poettering, a appelé ses troupes à "accepter le compromis" conclu avec le Parti socialiste européen (PSE). Et une "grande majorité du PSE", dont les élus se réunissaient aussi mardi soir, est également prête à voter cette version modifiée du compromis, a indiqué un porte-parole du groupe. Les élus conservateurs des nouveaux Etats membres étaient parmi les plus réticents à accepter le compromis conclu la semaine dernière par les équipes de négociation du PPE et du PSE, jugeant celui-ci trop protectionniste, notamment à cause des restrictions d'accès au marché toujours possibles au nom de la politique sociale et de la protection des consommateurs. Selon des sources des deux groupes, ces deux mentions ont été retirées avec l'accord des socialistes qui estiment avoir suffisamment de garanties en matière de protection des consommateurs et de politique sociale. Le compromis ne fait toutefois pas l'unanimité. Malgré tous leurs efforts, socialistes et conservateurs ne sont pas parvenus à se mettre complètement d'accord sur le champ d'application de la directive. Les socialistes demandent notamment qu'elle ne couvre pas les services d'intérêt économique général (services publics qui peuvent être assurés par le privé, comme la distribution d'eau). La droite refuse leur exclusion. L'eurodéputé français Jacques Toubon (UMP, droite) s'attend à des votes dissidents dans les deux camps jeudi. La Commission européenne a annoncé mardi être prête à modifier rapidement la directive, si les amendements de compromis sont adoptés "à une large majorité".