·Posted on 28 juil. 2017 Personnes transgenres dans l'armée: comment ça se passe en France? «Il y avait un mélange de rejet et d’incompréhension», raconte -- Ce sont trois tweets qui ont fait l'effet d'une petite bombe aux États-Unis. Mercredi, Donald Trump a annoncé sur le réseau social que les personnes transgenres ne pourront pas servir dans l'armée américaine. En juin 2016, Barack Obama avait pourtant annoncé que les personnes transgenres pourraient être recrutées par l'armée dès le 1er juillet 2017. Dans un premier temps, la mise en application avait été repoussée au 1er janvier 2018 par James Mattis, le secrétaire à la -- armée doit se concentrer sur une victoire décisive et totale et ne peut supporter le fardeau des énormes coûts médicaux et les perturbations que la présence des personnes transgenres dans l’armée entraîneraient.» La nouvelle a provoqué de nombreuses protestations -et une manifestation devant le Centre de recrutement militaire de Times Square. Selon les chiffres du ministère de la Défense américaine, 2500 à 7000 personnes transgenres (sur 1,3 million de militaires) servent déjà dans les rangs de l'armée. Mais ce sont des personnes qui ont annoncé leur transidentité après leur intégration, pas avant d'être recrutées. Twitter: @realDonaldTrump -- canadien s'est vanté de la diversité de ses armées, tandis que des gradés de l'armée britannique se sont félicités de ne pas avoir une telle politique et ont rendu hommage aux soldats transgenres. Et en France? Qu'en est-il de la situation des personnes transgenres dans notre armée? -- Engagée dans l'armée en tant qu'homme en 1988, Delphine Ravisé-Giard annonce en 2007 à sa hiérarchie de la base aérienne de Nancy-Ochey, en Meurthe-et-Moselle, qu'elle est une femme transgenre. Elle souhaite pouvoir continuer à exercer ses fonctions -mais en tant que femme. Dans un premier temps, les choses se passent plutôt bien. Delphine -- Mais en août 2009, le tribunal de grande instance (TGI) de Nancy lui refuse son changement d’état civil. Motif: elle «ne justifie pas du caractère irréversible de sa transformation physique homme-femme et notamment sexuelle». «C'est parce que je n’avais pas été stérilisée», traduit Delphine Ravisé-Giard à BuzzFeed News. Pour accepter son -- l'armée la considère à nouveau officiellement comme une femme. «Entre 2010 et 2012, j'étais interdite de port de la tenue féminine et obligée par un psychiatre transphobe de reprendre le travail dans ces conditions iniques», se désole-t-elle. Son cas n'est pas unique. «Je connais ou j'ai eu vent d'un homme et d’une dizaine de femmes transgenres qui commençaient leur transition dans l'armée. Et il doit y en avoir bien plus!» nous dit-elle. Elle détaille: -- Léa (le prénom a été modifié) est une autre femme qui a entamé une transition après s'être engagée dans l'armée. Pour se protéger, elle n'a accepté de témoigner qu'à la condition que son nom soit modifié et que son poste ne soit pas précisé. «Après plusieurs années de service, -- servir en tant que femme. «J’ai ressenti des freins de tous bords et de la pression pour évacuer le problème. Par exemple, on m’a conseillé de faire ma transition une fois mon temps de service fini. Il y avait un mélange de rejet et d’incompréhension.» -- plus opérationnelle, ça peut être plus difficile, notamment avec les préjugés sexistes qui ont lieu dans les unités où il y a un faible taux de féminisation. Pour moi, les problématiques transidentitaires sont vraiment liées au sexisme qu’on peut observer dans les armées.» Elle indique n'avoir pas eu à faire face à des insultes transphobes «mais j'imagine qu’en privé, il doit y avoir des choses qui se disent. Parfois, quand je suis à la cantine, je crois entendre des choses, mais -- Léa explique que, sur des forums, elle a été en contact avec des personnes se sachant transgenres et qui souhaitaient intégrer l'armée. «Je leur dis: ne dites rien au départ et engagez-vous. Quand on s’engage, il y a le processus de visite médicale donc s’ils sont déjà engagés dans une procédure de transition, ça se verra et le médecin militaire peut refuser leur entrée. S'ils ont déjà entamé une transition, ce sera plus facile s'ils ont des papiers qui correspondent avec leur identité de genre. Il vaut mieux avoir fait complètement sa transition, avec les papiers changés, ou pas de transition du tout, parce que l'armée reste très binaire.» Sur le site de recrutement de l'armée de terre, dans la partie forum, on peut lire plusieurs messages d'aspirants militaires qui souhaitent savoir si l'on peut s'engager alors que l'on est transgenre. Un avatar d'un «Caporal-Chef-Dupont» répond qu'«il faut impérativement que votre état civil soit en concordance avec votre apparence et votre sexe lors -- dans le civil.» Militante de longue date, l'adjudante-chef est présidente de l'ANT, l'association nationale transgenre. «On a sollicité la ministre de la Défense sur le sujet, assure-t-elle. Un dialogue est engagé pour trouver des solutions convenables pour tout le monde.» Le but: que les personnes transgenres puissent s'investir dans la défense comme n'importe quel autre soldat. «Nos compétences sont utiles: on est pas moins compétentes que les autres. Ce que Trump fait, c’est juste se -- De son côté, Léa regrette qu'il n'existe pas un guide «pour le commandement, mais aussi pour les personnes transgenres, pour qu'elles sachent quelles démarches faire». Aujourd'hui, elle compte bien rester dans l'armée. «Ce n’est pas parce qu’un milieu n’est pas favorable qu’il faut l'éviter. Si on laisse ce milieu à des gens transphobes, il restera forcément transphobe. Si on reste, c’est pour faire évoluer le système. C’est un vrai travail de fond, mais je crois à une évolution positive.»