#alternate alternate IFRAME: https://www.googletagmanager.com/ns.html?id=GTM-P5QKJ5M (BUTTON) + Français (BUTTON) * Lire * Regarder * Société * Life * Tech * Food * Culture * Drogue * Musique * Crime * Environnement * Santé * Sport * Gaming * Store * * * * Lire * Regarder * VICE TV ____________________ (BUTTON) * * * * * * * * Société * Life * Tech * Food * Culture * Drogue * Musique * Crime * Environnement * Santé * Sport * Gaming * Store * About * Partner * Jobs * Shop * VICE TV * Concours * C.G.U. * POLITIQUE DE CONFIDENTIALITÉ * © 2021 VICE MEDIA GROUP Ma vie d’apatride FYI. This story is over 5 years old. VICE News Ma vie d’apatride Railya Abulkhanova, a été apatride pendant plus de 20 ans. Elle nous raconte les conséquences du défaut de nationalité. LA par Lucie Aubourg 12.11.15 * (BUTTON) Partager * (BUTTON) Tweet * (BUTTON) Snap À chaque fois quʼelle raconte son histoire, Railya Abulkhanova revit les moments douloureux qui ont jalonné son parcours dʼapatride. De sa voix douce, elle consent pourtant à « remuer les anciens souvenirs », car elle sait que les témoignages comme le sien aideront à faire connaître les problèmes auxquels sont confrontés les apatrides, ceux qui nʼont pas de nationalité — leur sort est rarement médiatisé. Publicité *** Selon lʼAgence des Nations unies pour les réfugiés (HCR), au moins un enfant apatride naît toutes les dix minutes dans le monde. Un rapport de lʼAgence rendu public le 3 novembre dernier a donné pour la première fois la parole à plus de 200 enfants et jeunes apatrides. Il a été réalisé dans le cadre de la campagne « I belong » (« Je suis là, jʼexiste » en français), visant à mettre fin à lʼapatridie dʼici 2024. « Nous avons axé notre campagne autour des enfants, car lʼapatridie peut avoir des conséquences très graves sur eux. Ils ont le sentiment dʼêtre différents des autres, de ne pas appartenir à la même communauté. Certains ne peuvent pas aller à lʼécole ou accéder aux soins à cause de cela », nous a expliqué Céline Schmitt, porte-parole pour le HCR. Le nombre dʼapatrides dans le monde est estimé par les Nations unies à 10 millions. La plupart dʼentre eux se trouvent en Birmanie, en Côte dʼIvoire, en Thaïlande, en Lettonie ou encore en République dominicaine. Bien souvent, un enfant né de mère ou de père apatride sera condamné à lʼêtre lui aussi. Les guerres et les conflits sont dans la plupart des cas la cause du défaut de nationalité, mais aussi les lois discriminatoires vis-à-vis de certaines ethnies ou minorités, ou celles nʼautorisant la transmission de la nationalité que par le père. Railya, elle, comme beaucoup dʼhabitants des anciennes Républiques soviétiques, sʼest retrouvée apatride suite à la chute de lʼURSS. Lors dʼun long entretien téléphonique, elle nous a raconté lʼenfer de lʼapatridie. Publicité *** Elle est née en 1973 au Kazakhstan. Railya possédait, durant sa jeunesse, le passeport soviétique. Il existait alors en URSS deux types de domiciliations : lʼune provisoire, lʼautre permanente. À lʼâge de 17 ans, Railya sʼest désinscrite de sa domiciliation permanente dans cette ex-République soviétique quʼest le Kazakhstan, afin dʼen obtenir une provisoire — connue sous le nom de « propiska » — pour faire ses études en Russie. Lʼannée suivante, lʼURSS se désagrégeait. Cʼétait le début dʼun no manʼs land administratif pour Railya. Les anciennes Républiques soviétiques qui ont déclaré leur indépendance ont alors adopté leurs propres législations en matière de nationalité, la distribuant la plupart du temps aux personnes dotées dʼune domiciliation permanente sur leur territoire. Railya, elle, en est alors dépourvue depuis environ un an. À lʼépoque, elle ne se rend pas vraiment compte de lʼincidence quʼaura ce hasard administratif sur sa vie. « On ne croyait pas à lʼéclatement de lʼURSS, on pensait quʼil allait se reformer. Jʼétais jeune, je ne me suis pas posé la question de la nationalité », explique-t-elle. Railya et son nouveau passeport français, lors de la cérémonie annuelle organisée samedi 7 novembre 2015 par le maire de Villeneuve d'Ascq, pour les personnes ayant obtenu la nationalité française (Photo UNHCR/Benjamin Loyseau) À la fin de son cursus en Russie, Railya trouve du travail en Ouzbékistan, une autre ex-République soviétique. « Là encore, je ne me suis pas rendue compte que cʼétait devenu un pays étranger. » Elle peut encore sʼy rendre avec son seul passeport soviétique, et sʼinstalle à Tachkent, la capitale du pays. Mais en 1999, une série dʼattentats « rendent le régime des passeports plus sévères. » Pour la première fois, Railya se renseigne sur sa situation. Un permis de résidence lui est délivré. Publicité Au début des années 2000, par deux fois, Railya dépose une demande de naturalisation en Ouzbékistan. Elle y a obtenu un doctorat de linguistique française et est professeure de français. Mais les deux fois, sa demande reste sans réponse. « Quand je venais renouveler mon titre de résidence à la police de lʼimmigration, dans les couloirs, je croisais dʼautres gens apatrides », se souvient-elle. « Tout le monde disait quʼobtenir la nationalité en Ouzbékistan, cʼétait mission impossible. » « En France, la préfecture ne savait pas quoi faire de moi » En 2009, Railya rencontre un Français, avec lequel elle se marie en Ouzbékistan. La France lui octroie alors un laissez-passer (le même, selon elle, que celui que délivre lʼambassade aux personnes ayant perdu leurs papiers), et un visa. Dès son arrivée en France, elle sʼadresse à la préfecture de Lille — et plonge dans les méandres de lʼadministration. « Ils ne savaient pas trop quoi faire de moi. Ici des apatrides, il nʼy en a pas beaucoup », se souvient-elle. Selon lʼOffice français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA), environ 1 000 personnes seraient enregistrées en tant quʼapatrides en France. Commence alors un jeu de ping-pong entre la préfecture, lʼOffice français de lʼimmigration et de lʼintégration (OFII), et lʼOFPRA. Railya obtient finalement un titre de séjour, sur lequel elle est reconnue comme apatride. Lʼadministration française fournit également à Railya un titre de voyage, « une sorte de petit livret avec des pages en carton ». La personne chargée de le lui délivrer à la préfecture sʼexcuse en le lui tendant : elle le trouve « très moche ». Publicité Durant cette période, elle se rend au Kazakhstan pour voir sa famille, grâce à ce fameux titre de voyage, qui lui fait office de passeport. Mais retourner dans le pays ou elle est née et a grandi se révèle être un vrai parcours du combattant. Sa mère, qui a 77 ans, doit dʼabord lui faire parvenir une invitation officielle quʼelle ne peut obtenir que dans un bureau situé à 200 kilomètres de chez elle. Ensuite seulement, Railya peut faire sa demande de visa. Et pendant le voyage, le calvaire continue : les policiers nʼont bien souvent jamais vu de titre de voyage comme celui de Railya, et le triturent dans tous les sens. « Il nʼy avait pas de vol direct, et à toutes les frontières on était retenus deux ou trois heures », nous raconte-t-elle. Trouver un travail : un parcours du combattant pour les apatrides Pour trouver un travail, cʼest le même combat. « En entretien, lorsquʼon me demandait ma nationalité et que je répondais "apatride", les gens ne savaient pas ce que cʼétait », raconte Railya. « Je devais à chaque fois tout expliquer, dire quʼil ne fallait pas avoir peur. » Peine perdue. Comme la majorité des étrangers non-européens qui arrivent en France, les premières années, Railya doit renouveler son permis de séjour tous les 12 mois. « Au moindre problème, jʼétais très stressée. Cette peur était toujours en moi. » Railya, 42 ans, dans le centre-ville de Lille, l'un des endroits qui a le plus compté dans son processus d'obtention de sa nationalité (Photo : UNHCR/Benjamin Loyseau) Un jour, au détour dʼune conversation à lʼoccasion de lʼun de ces renouvellements, elle apprend par hasard quʼen tant quʼapatride, elle nʼa pas besoin dʼattendre les quatre ans de mariage nécessaires pour demander la nationalité française. En 2011, elle dépose donc une première demande. Celle-ci lui est refusée parce quʼelle nʼa pas de travail. « Cʼétait un cercle vicieux ! Je ne pouvais pas trouver de travail parce que jʼétais apatride, et je ne pouvais pas sortir de lʼapatridie parce que je nʼavais pas de travail. » En 2015, elle refait une demande, cette fois en tant quʼépouse dʼun citoyen français. En février, sa demande est enfin acceptée. « Après lʼappel de la préfecture, jʼétais incapable de réfléchir pendant deux jours. La seule chose que jʼavais dans ma tête, cʼest la chanson « Free », de Stevie Wonder », dit-elle en riant. « Jʼai réalisé au fur et à mesure. Je me disais "Ah maintenant je peux faire ça ! Et aussi ça…" » Publicité Des mesures peu coûteuses permettraient de prévenir les futurs cas dʼapatridie Selon Céline Schmitt, porte-parole pour le HCR, « Il est relativement facile pour les États de mettre en place des mesures permettant de prévenir les futurs cas dʼapatridie, et ce sont des mesures qui ne sont pas coûteuses. » Le HCR demande aux États de réformer les lois qui empêchent les mères de transmettre la nationalité à leurs enfants, dʼaccorder la nationalité aux enfants nés sur leur sol, sʼils devaient être apatrides, et encourage les pays qui accueillent des réfugiés à bien délivrer des certificats de naissance aux enfants qui naissent lors de leur exil. Au cours de la décennie passée, les Nations unies estiment ainsi à 4 millions le nombre de personnes apatrides qui ont finalement obtenu une nationalité. Pour autant, des situations causant lʼapatridie perdurent dans le monde, et pour le moment, seuls 64 États ont ratifié la Convention internationale de 1961, qui vise à prévenir ce problème. Railya, elle, a pu passer un mois dans sa famille au Kazakhstan cet été, usant du « bonheur de voyager avec un passeport français ». Elle a également repris des études — une licence professionnelle de commerce international — qui comportent un séjour en Pologne. « Avec mon ancien titre de voyage, je nʼaurais jamais osé commencer cette formation », avoue-t-elle. Pour la première fois de sa vie, à lʼâge de 42 ans, elle va également pouvoir voter. « Cela a aussi agi sur mon comportement », conclut-elle avec aplomb. « Avant, je restais toujours à lʼécart, dans mon coin. Maintenant, les choses sont en train de changer. » Suivez Lucie Aubourg sur Twitter : @LucieAbrg Tagged:FRANCE Dernière étape pour t'abonner à la newsletter VICE... ____________________ (BUTTON) Je m'inscris En vous abonnant à la newsletter de VICE, vous acceptez de recevoir des courriers électroniques qui peuvent contenir de la publicité ou du contenu sponsorisé. Publicité * About * Partner * Jobs * Shop * VICE TV * Concours * C.G.U. * POLITIQUE DE CONFIDENTIALITÉ * © 2021 VICE MEDIA GROUP