certaines thèses admises, je fais remonter cette modernité aux XV-XVIes siècles, avant la formulation des classifications raciales, la fabrication du concept de race humaine comme variété d'une espèce humaine. Deux événements, liés à l'histoire de l'Occident, marquent le début de l'histoire du racisme: la découverte du Nouveau Monde et d'une -- milieu du XXe siècle. C'est la position optimiste: l'antiracisme se résumerait à combattre une idéologie morte, «l'aryano-sémitisme», à en éliminer les dernières traces postnazies. Une autre thèse postule l'existence d'un ethnocentrisme quasi inné chez les êtres humains; le racisme, qu'il se fonde sur les classifications raciales élaborées par -- vient renforcer des préjugés de classe ou de caste, etc. Le racisme contemporain s'appuie beaucoup plus sur des différences culturelles, prétendument irréductibles, que sur l'inégalité biologique des races. Si Le Pen s'en tenait à la thèse de l'inégalité des races (1) telle que la récusent les généticiens, il ne réussirait pas à nourrir idéologiquement tant de sympathisants. Les réactions des scientifiques «durs» sont pleines de bonnes intentions, mais leur efficacité est limitée. L'autorité de la science ne saurait suffire à disqualifier une représentation sociale: la notion de race fonctionne comme mythe, comme mystique, comme représentation sociale efficace, aussi peu fondée soit-elle au plan scientifique. C'est pourquoi il est regrettable qu'en -- sciences sociales, malgré quelques explorations méritoires. Faut-il supprimer le mot «race»? Cela présuppose une conception très naïve du mot: en détruisant un mot, on ferait disparaître l'imaginaire négatif qui lui est lié! Remplacer «race» par «ethnie, «culture» ou «mentalité» reviendrait au même. La racialisation des opinions et croyances n'est pas seulement liée à l'emploi de tel ou tel mot. Il -- (1) En septembre, à la suite des déclarations de Jean-Marie Le Pen sur l'inégalité des races, le Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples (Mrap) a notamment réagi en diffusant une motion dans le milieu scientifique. Celle-ci, rédigée par le généticien Albert Jacquard, qui réaffirme l'absence de fondement scientifique du concept de race, a recueilli des centaines de signatures de chercheurs, ingénieurs, techniciens et enseignants, ainsi que le soutien de plusieurs sections syndicales de chercheurs.