Les parents hélicoptères
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Hier, Joseph Facal signait une chronique très émouvante. Ma femme a même versé quelques larmes en la lisant, au resto.
Il parlait de la difficulté, pour un parent, de lâcher prise, de laisser son enfant «faire sa vie».
Il disait que son fils de 17 ans venait tout juste d’avoir son permis de conduire, et que la possibilité que celui-ci ait un accident l’inquiétait.
« Ces temps-ci, un party n’attend pas l’autre. J’ai déjà le sommeil léger. Maintenant, je ne dors plus tant que je ne l’entends pas rentrer à la maison. », écrivait-il.
LA POUDRE D’ESCAMPETTE
Je me suis beaucoup reconnu dans le texte de Joseph. Moi aussi, je m’inquiète en pensant à ce qui pourrait arriver à mes filles adolescentes.
Mon aînée, qui a 19 ans, est partie en Amérique du Sud avec un sac à dos, et je regarde mon courriel tous les jours pour voir si elle ne m’a pas écrit.
J’espère qu’elle ne fera pas d’auto-stop. Qu’elle ne boira pas trop. Qu’elle ne fera pas confiance au premier beau gars qu’elle rencontre. Qu’elle portera un gilet de sauvetage si jamais elle fait du bateau, etc.
Pas facile de voir son enfant s’éloigner, devenir indépendant...
Cela dit : se pourrait-il qu’on s’inquiète trop ?
Quand je pense à tout ce que je faisais quand j’étais jeune, je me demande comment ma mère a fait pour ne pas mourir d’inquiétude.
J’avais neuf, dix ans, je partais le matin avec mon vélo trois vitesses et ne revenais qu’à l’heure du lunch (quand je ne le sautais pas...). Ma mère n’avait aucune idée où j’étais. Je lui disais que j’allais au parc à quelques pâtés de maisons, mais, la plupart du temps, je n’y restais qu’une demi-heure.
Le reste du temps, j’allais sur le bord du fleuve. Ou sur la rue Wellington. Ou chez un chum. Ou dans la ruelle. Ou sous un balcon. Ou à la piscine, à l’autre bout de la ville.
On marchait sur les toits des garages. On entrait dans des usines désaffectées. On jouait à la cachette dans des champs. On se fabriquait des bazookas avec des canettes vides et de l’huile à briquet. On essayait d’attraper des couleuvres.
Une bêtise n’attendait pas l’autre.
Et il n’y avait pas de téléphone cellulaire. On partait, et on n’était pas joignable.
La paix, la sainte paix.
LES PARANOS
Aujourd’hui, quel parent laisserait son enfant partir ainsi ? Tout juste si on ne coud pas un système de géolocalisation dans chacune de leur culotte, avec un micro et une mini-caméra.
Fiston va au parc ? On y va avec lui, et on n’apporte même pas de livre pour pouvoir le surveiller. Et si jamais il mange du sable, on sort le baril de Purell et la trousse de premiers soins.
Des vrais fous.
Le monde est-il vraiment plus dangereux qu’avant, ou sommes-nous devenus paranos à cause de l’omniprésence des médias ?
Il y en avait, des maniaques et des pédophiles, quand j’étais jeune (quand j’étais dans les scouts, il y avait un prêtre qui avait la main particulièrement baladeuse...), mais on ne passait pas notre temps à nous conter des peurs et à paniquer.
On vivait.
Pourquoi avons-nous si peur, maintenant ?