La concurrence équitable, l’autre bataille du Brexit

Eclipsé par les discussions sur la pêche, le sujet délicat des subventions publiques aux entreprises a été au centre de débats houleux. L’accord limitera les possibilités de dumping entre le Royaume-Uni et l’Union européenne.

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Publié le 28 décembre 2020 à 10h01

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Le premier ministre britannique Boris Johnson avant sa conférence de presse sur l’accord trouvé avec l’UE, à Downing Street, Londres, le 24 décembre 2020.

Au poker des négociations, le 24 décembre 2020, les Britanniques ont « abattu leurs cartes au tout dernier moment », confie une source européenne. Si leur « joker » était la pêche, les questions des aides d’Etat, des subventions aux entreprises et, plus largement, de la concurrence équitable étaient au centre du jeu. Les Européens avaient à cœur d’éviter une course au dumping via des subventions publiques aux entreprises qui viendraient fausser la concurrence sur le marché européen. « Le Royaume-Uni est un partenaire très intégré à l’économie européenne avec un appétit de divergence et de concurrence déclaré », rappelle Elvire Fabry, de l’Institut Jacques-Delors.

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En février 2020, au commencement des négociations, l’Union européenne (UE) souhaitait que le régime des aides d’Etat britannique soit pleinement aligné sur le régime européen. Il en était hors de question pour le gouvernement de Boris Johnson, désireux de retrouver sa souveraineté et craignant, de surcroît, qu’une telle demande permette à la Cour de justice de l’UE, via l’accord, d’influencer indirectement le droit britannique. Naviguant entre les lignes rouges, les négociateurs ont fini par trouver un terrain d’entente. Chaque partie pourra décider de son régime d’aides d’Etat, mais en s’accordant sur quelques grands principes et définitions en commun.

Mesures de rétorsion

Le Royaume-Uni devra se doter d’une autorité indépendante de contrôle des subventions publiques. Il sera possible de contester le bien-fondé d’une aide d’Etat devant les juridictions nationales. Mais, si le Royaume-Uni ou l’Union européenne estime que l’autre partie accorde des subventions qui distordent la concurrence, il sera envisageable de déclencher un processus de consultations et de médiation via l’un des vingt-trois sous-comités conjoints dont va accoucher l’accord.

Point crucial : des mesures unilatérales de rétorsion, comme des droits de douane, pourront être prises si l’une des deux parties a des preuves qu’une subvention viendra perturber « de façon significative » le commerce et les investissements. Les Britanniques ont mis de l’eau dans leur vin car ils ne souhaitaient pas que des sanctions soient si faciles à dégainer. Ces mesures de rétorsion pourront être à leur tour contestées devant un tribunal arbitral.

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« L’accord ne ressemble pas à notre offre initiale, reconnaît une source européenne, mais c’est davantage que ce qu’on peut trouver dans d’autres accords de libre-échange avec le Canada ou le Japon. » Pour Aurélien Antoine, professeur de droit public à l’université Jean-Monnet de Saint-Etienne, « l’accord est un bon exemple d’équilibre au sujet des aides d’Etat. Il n’y a pas d’alignement législatif imposé au Royaume-Uni. Mais il existe un alignement des notions juridiques, des définitions ». Les Britanniques n’auront pas les coudées franches pour faire diverger leurs règles relatives à l’octroi d’aides d’Etat. « Le Royaume-Uni sera en position de conserver son autonomie réglementaire, mais ne pourra pas se permettre de divergence significative sans perdre les avantages négociés », ajoute Elvire Fabry.

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