Grève : l’Unsa et la CFDT prêtes à sauter du train

Alors que l’exécutif a accepté leurs amendements au Sénat, les deux syndicats devraient appeler à sortir du conflit. Mais attendent la fin de la procédure législative, le 13 juin, pour sauter le pas.
Sortira, sortira pas de la grève débutée le 3 avril ? La question agite le gouvernement, la direction de la SNCF, les quatre organisations syndicales de l’entreprise (CGT, Sud, Unsa, CFDT) ainsi que les parlementaires qui examinent le projet de loi sur la réforme ferroviaire. A Saint-Denis, près de Paris, au siège social de l’entreprise publique, l’affaire semble tranchée : «La question n’est pas de savoir si la grève est terminée, mais à quelle date elle va s’achever», analyse un haut dirigeant. Presque au même moment, dans la nuit de jeudi à vendredi, les sénateurs avancent d’une case vers la fin du conflit. Ils adoptent une série d’amendements qui retouchent sérieusement la première mouture du texte votée par l’Assemblée nationale.
Besace
Quelques jours auparavant, des représentants de la CFDT et de l’Unsa débarquaient au Sénat avec des projets d’amendements dans leur besace. Reçus par Hervé Maurey, le président centriste de la commission de l’aménagement du territoire, et Gérard Cornu, le rapporteur LR du texte. Les suggestions des syndicalistes sont non seulement écoutées, mais entendues. Sur les conséquences de l’ouverture à la concurrence notamment, les sénateurs adoucissent le texte. Dans le cas où la SNCF perd un appel d’offres sur une ligne régionale au profit d’un autre opérateur, la plupart des cheminots ne seront pas obligés d’aller travailler chez le nouvel exploitant. Mieux : ceux qui choisissent d’être transférés et regrettent ensuite leur décision pourront retourner à la SNCF si un emploi similaire est disponible.
A lire aussi La mobilisation ralentit, Macron fonce
Lors de l’examen de ces dispositions, le vote passe comme une lettre à la poste et la ministre des Transports, Elisabeth Borne, donne un avis favorable. Les conditions semblent donc réunies pour une sortie de crise, en tout cas pour l’Unsa et la CFDT. Au moment du vote du Sénat, Laurent Berger, le secrétaire général de la CFDT, estime ainsi qu’«à un moment, il faudra passer à autre forme de mobilisation, c’est-à-dire la construction d’un accord d’entreprise». Et, une fois le texte adopté, Roger Dillenseger, le patron de l’Unsa ferroviaire, fait preuve d’optimisme : «Nous avons eu des avancées. Nous sommes dans un moment important du mouvement», indique-t-il à Libération. Pour Patrick Jeantet, le PDG de SNCF Réseau (propriétaire des 30 000 km de voies ferrées), «deux des syndicats ont accepté la main tendue du gouvernement. Il n’y a plus de raison de faire grève».
Agenda
De la coupe aux lèvres, il reste néanmoins un peu de chemin. D’abord parce que cette loi doit être finalisée devant une commission mixte paritaire (CMP) composée de députés et de sénateurs. Une étape indispensable - qui interviendra le 13 juin - pour harmoniser les modifications apportées par le Sénat après le vote de l’Assemblée. D’ici là, aucun syndicat, même le plus ouvert à une sortie de crise, ne veut bouger, par crainte d’une modification de dernière minute devant la CMP. Ensuite, c’est à qui acceptera d’appeler en premier à la fin de la grève. Le rôle semble taillé sur mesure pour l’Unsa, deuxième organisation syndicale de la SNCF. Elle voudrait cependant éviter de sortir du conflit seule, et compte sur la CFDT pour l’accompagner. Reste que tous les syndicats ont en tête la suite du calendrier. En novembre, des élections professionnelles sont programmées à la SNCF, et le positionnement de chacun sur la grève aura forcément un impact. Les syndicats qui sortiront les premiers du conflit craignent de le payer dans les urnes.
Le vote définitif du texte ne signifie pas pour autant que les négociations sont terminées. La fin du statut des cheminots, au 1er janvier 2020, suppose qu’à cette date une convention collective soit prête pour tous ceux qui seront recrutés à la SNCF et dans les autres entreprises ferroviaires qui opéreront en France. Ce document devra préciser les conditions de rémunération, les déroulements de carrière ou encore le temps de travail. Et ce pour les dizaines de métiers que compte le transport ferroviaire. Les syndicats ont intégré cet agenda et savent qu’ils seront aussi jugés sur les acquis de cette convention collective au regard de ce qu’offrait le statut historique des agents de la SNCF. Le retour au calme social dans le rail français risque de se faire davantage à l’allure d’un train Corail que d’un TGV.
-
Crise du rail
SNCF : le Sénat entrouvre la porte d'une fin de conflit
Une série d'amendements adoptés en accord avec les recommandations de l'Unsa et la CFDT pourraient conduire d'ici à une quinzaine de jours à un appel à la fin de la grève par ces deux syndicats.
-
Rail
Réforme ferroviaire : «Je souhaite qu’une fois le texte voté, les syndicats réfléchissent à arrêter la grève»
Gérard Cornu, rapporteur du projet de loi sur la réforme SNCF au Sénat, est à l'origine de plusieurs amendements qui reprennent les propositions de l'Unsa et la CFDT.
-
Edito
Dogmatisme
Macron 2, Mélenchon 0 ? A l’automne, avec une certaine honnêteté, le leader de La France insoumise, devant l’échec de la mobilisation contre la loi Pénicaud,...
-
Décryptage
Trois futurs fronts pour l’opposition
Avant même la fin officielle du conflit sur la réforme ferroviaire, l’exécutif, à la recherche d’économies pour faire baisser le déficit, se lance dans plusieurs dossiers à risque.
-
Merci de l'avoir posée
«Surmenage» : ceux qui travaillent à l'Assemblée relèvent-ils du droit du travail ?
Alors que les députés ont enchaîné séances de nuit et week-ends, focus sur les règles qui s'appliquent aux élus, collaborateurs et fonctionnaires.
-
Marathon
Agenda législatif : l'Assemblée au bord de la surchauffe
Après la loi agriculture, les députés siègeront à nouveau ce week-end pour débattre de la loi sur le logement. Un rythme effréné causé par l'embouteillage de projets de loi en discussion.
-
CHECKNEWS
Qui sont les membres du CAP 22 et quel est leur parcours ?
Selon les Echos, le «Comité action publique 2022» va proposer un plan d'économie de 30 milliards d'euros au gouvernement
-
Opposition
«Ça finira par prendre…»
Pour l’opposition de gauche, la «marée humaine» du 26 mai n’était qu’une étape contre Macron. Et a, malgré la mobilisation en demi-teinte, permis de premières convergences.
-
Tribune
Il faut défendre la SNCF !
Il ne s’agit pas de préserver un «statut privilégié», mais plutôt la réalisation concrète d’un espoir de justice et d’égalité née il y a plus d’un siècle.
-
Récit
Congrès CFDT : Berger garde la main et cherche un second souffle
Le secrétaire général du syndicat a été largement réélu jeudi et a sorti les griffes contre le gouvernement.