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    Décryptage

    TGV : un virage à trop grande vitesse

    Par Richard Poirot

    La SNCF a ordonné des «suspensions conservatoires» après les premiers éléments de l’enquête. le train roulait trop vite et il y avait trop de personnes à bord.

    Les mots sont choisis : «séquence de freinage tardif». Telle est la cause de l’accident d’un TGV lors d’une circulation d’essai technique qui, à ce jour, a provoqué la mort de 11 personnes. Concrètement, selon les premiers éléments révélés ce jeudi par la direction de la SNCF, le train roulait trop vite, près de 90 km/h au-dessus de la vitesse autorisée. Erreur humaine ? Guillaume Pepy, président de la compagnie ferroviaire, refuse d’employer cette expression. Pour l’instant.

    Que s’est-il passé ?

    L’enquête apporte des détails sur le déroulé du drame. L’essai visait à certifier ce tronçon de ligne à grande vitesse (LGV) reliant Paris à Strasbourg. Une ligne d’une centaine de kilomètres qui devait prolonger, en avril, le tronçon existant et ainsi relier les deux villes en une heure quarante-huit au lieu de deux heures vingt.

    L’accident est survenu à la sortie de cette nouvelle section rapide, juste avant le point raccordement avec la voie classique, ces derniers kilomètres qui mènent à la capitale alsacienne. Si, sur la ligne à grande vitesse, le train est monté comme prévu à 352 km/h, la vitesse à ce point de raccordement doit être bien plus basse. Sur la voie classique, elle est normalement limitée à 160 km/h, mais lors des circulations d’essai, l’équipe peut pousser le TGV jusqu’à la vitesse limite plus 10 %, ceci afin de solliciter les équipements au maximum. Soit jusqu’à 176 km/h. Or, les boîtes noires ont enregistré une vitesse de 265 km/h au moment d’aborder la courbe de raccordement. Le TGV a entamé sa décélération «au moins un kilomètre» trop tard, a déclaré Guillaume Pepy. Lors du déraillement, le train roulait à 243 km/h. Il s’est déporté vers l’extérieur et a quitté les voies juste avant de s’engager sur le pont ferroviaire du canal de la Marne, à quelques kilomètres de la gare de Strasbourg. Le train, parti de Meuse-TGV à 14 h 28, a déraillé à «15 heures 4 minutes et 42 secondes», précise l’enquête de la SNCF.

    Pourquoi cette vitesse excessive ?

    La survitesse est l’unique cause de l’accident, a précisé la direction. Aucune anomalie sur la rame ou sur l’infrastructure n’a été observée, selon l’audit interne mis en ligne jeudi midi. Mais la direction n’a donné aucun élément susceptible d’expliquer dans le détail les raisons qui ont conduit l’équipe de cabine à freiner trop tard. Guillaume Pepy a cependant parlé «d’erreurs de comportements humains à la fois dans la cabine et dans la relation entre la cabine et la rame». Des erreurs qui devront «être confirmées par l’enquête», a-t-il nuancé.

    Un point déjà pose problème : il y avait sept personnes dans la cabine de pilotage. Jacques Rapoport, président de SNCF Réseau, a précisé qu’il «n’y a pas de règle stricte» concernant le nombre maximal de personnes autorisées lors des circulations d’essai. Reste que, selon l’audit, ces nombreuses personnes constituent des «éléments perturbateurs» ayant pu conduire à cet accident. Les enquêteurs évoquent «le positionnement des présents en cabine» qui n’aurait pas permis «une vue optimale», sans en dire davantage. Les responsables de la conduite du train n’ont-ils, par exemple, pas pu voir des points kilométriques, ces panneaux situés sur le côté de la voie et sur lesquels ils se basent pour adapter leur vitesse ? Le rapport pointe aussi d’une «ambiance sonore», sans autre précision. Si Guillaume Pepy n’incrimine encore personne, il a tout de même annoncé «des suspensions conservatoires» après audition «des intéressés et de leur chaîne managériale». Des procédures disciplinaires seront aussi engagées «dès que l’enquête le permettra».

    Pourquoi y avait-il des enfants à bord ?

    Aucune personne, autre que celles nécessaires à la bonne conduite de l’essai, n’aurait dû se trouver à bord, avait rappelé le président de la SNCF dimanche. Or, la rame a accueilli 53 techniciens et passagers. La liste dressée et validée par les responsables de l’essai, elle, ne comportait que 49 noms. Quatre enfants et adolescents âgés de 10 à 15 ans figuraient parmi les passagers. «Une présence imprudente» assure Guillaume Pepy, pour qui il y a eu «un manque de rigueur dans la préparation de la liste et son contrôle».

    Parmi les mesures immédiates arrêtées par la direction, il est désormais prévu d’interdire la présence «de personnes n’appartenant pas à l’équipe projet». Une phrase lourde de sens. Elle valide ce que nombre de cheminots avouent : la présence de personnes non autorisées à bord de ces trains n’avait rien d’inhabituel, y compris durant ces phases de certification. «Quarante-neuf personnes pour un essai, ça paraît beaucoup», nous assure un représentant syndical. «C’est un secret de Polichinelle, assure un autre. De nombreux collègues ont pris des non-cheminots à bord. C’est une pratique connue, même si c’est interdit.» Une tradition désormais bannie.

    Richard Poirot
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