Voyages-sncf.com, l’ami américain

La SNCF s’est brûlé les doigts dans ce qui n’aura été qu’un partenariat avorté avec Airbnb, la bête noire des hôteliers.
Une entreprise publique peut-elle, pour relancer une activité en berne, dérouler le tapis rouge à une multinationale américaine aux moyens quasi illimités au risque d’accélérer «l’ubérisation» de tout un secteur ? C’est le cas d’école auquel vient de se confronter la SNCF, qui s’est brûlé les doigts dans ce qui n’aura été qu’un partenariat avorté avec Airbnb, la bête noire des hôteliers.
Confronté à une baisse de fréquentation - et de rentabilité - de ses TGV intégralement financés sur deniers publics, le transporteur ferroviaire, qui se présente désormais comme un opérateur global de mobilités, avait cru trouver la bonne astuce marketing pour prouver à ses usagers que leurs voyages pouvaient «rapporter de l’argent», et notamment contribuer au règlement de leur billet sur les lignes à grande vitesse : les millions de clients de voyages-sncf.com, premier site de commerce électronique de l’Hexagone, étaient incités à louer leur logement en leur absence sur Airbnb et recevaient en échange de leur inscription sur le site un bon d’achat financé par la plateforme américaine à valoir sur un billet de train. Un juteux accord pour les deux parties, qui faisait d’Airbnb un distributeur de pouvoir d’achat pour le compte de la SNCF.
Devant la fureur des hôteliers, cette dernière a préféré renoncer et prendre le temps de réfléchir «aux conditions dans lesquelles les nouveaux modèles d’économie collaborative peuvent contribuer à la relance du tourisme en France». Franck Gervais, le très connecté patron de sa filiale en ligne, affirmait pourtant dans une interview au Journal du net que ce type de partenariat ne pouvait qu’inciter ses clients à voyager plus et serait donc également bénéfique in fine aux hôteliers. Ils pourraient par exemple dépenser l’argent gagné avec Airbnb en nuitées d’hôtel sur voyages-sncf.com, un service opéré par le géant américain du voyage en ligne Expedia, qui détient 49 % de la plateforme de réservation en ligne de l’entreprise publique ! La SNCF ferait mieux de s’allier avec des poulains numériques européens pour faire émerger des champions.