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          Big Bang Santé: un voyage vertigineux dans la médecine de demain

          VIDÉO - Pour sa troisième édition, le Big Bang Santé du Figaro a apporté aux quelque 750 participants un éclairage nourri sur notre avenir, à travers quatre thématiques: la nanomédecine, la santé à domicile, l'intelligence artificielle et l'homme augmenté.

          Plus de trente personnalités de tout premier plan sont venues au Big Bang Santé pour partager leur vision d'une médecine dont nous peinons à suivre les évolutions et les enjeux. «La préhistoire nous donne une petite leçon: l'innovation précède toujours le changement de comportement. Il y a systématiquement un moment d'inertie avant que l'homme ne s'adapte aux innovations» avertit d'emblée le paléontologue Yves Coppens, le «père de Lucy», qui se dit confiant pour le futur. Ce thème, comme tous ceux abordés au cours de cette journée riche, a passionné l'auditoire de quelque 750 personnes et déchaîné les participants sur les réseaux sociaux, 4500 tweets ayant été publiés sur Twitter, où l'événement a figuré toute la journée en première place.

          «Demain on pourra supprimer toutes les cellules cancéreuses d'un patient en une seule injection.»

          Laurent Lévy, PDG de Nanobiotix

          L'avenir de la médecine se logera d'abord dans l'infiniment petit. Les nanotechnologies se montrent particulièrement prometteuses dans la lutte contre le cancer. 60% des cancéreux reçoivent une radiothérapie, or les rayons X génèrent des dommages collatéraux qui affectent les cellules saines. Pour remédier à ce problème, la start-up Nanobiotix a conçu un traitement qui consiste à injecter des nanoparticules dans la tumeur pour mieux la cibler. Cela permet de multiplier par deux l'efficacité de la radiothérapie, tout en limitant le risque de métastases. «Demain on pourra supprimer toutes les cellules cancéreuses d'un patient en une seule injection», s'est enthousiasmé le PDG de la société, Laurent Lévy. «Grâce aux nanoparticules, on pourra aussi modifier la combustion électrique du cerveau et réparer les cellules de personnes atteintes de maladies neurodégénératives» a-t-il prédit.

          Le paléontologue Yves Coppens.
          Le paléontologue Yves Coppens. Francois Le Guen

          L'avenir de la médecine est aussi intimement lié à l'informatique. Dès 2001, Jacques Marescaux réalisait «l'opération Lindbergh» en opérant depuis New York une patiente située à Strasbourg - une première mondiale. «Aujourd'hui des robots chirurgicaux sont capables de créer le clone digital d'un organe malade et de le superposer à l'image fournie par la caméra, grâce à la réalité augmentée, pour guider le chirurgien», a expliqué le professeur. Mais les ordinateurs ne vont pas seulement améliorer la dextérité des médecins, ils vont aussi augmenter leur cerveau. Là encore, ça bouge très vite. «Il y a un an, le robot Xiaoyi a passé avec succès le concours national de médecine en Chine», a rappelé Jacques Marescaux.

          À l'issue de cette première partie très dense, le public a profité d'une courte pause bien méritée. Les curieux ont tenté de se frayer un chemin parmi la foule amassée autour du robot da Vinci. Dotée de quatre bras - trois pour manipuler les outils et un pour la caméra - cette merveille de technologie remplace les bras du chirurgien pour les interventions les plus minutieuses, telles que la prostatectomie radicale.

          «Il y a un an, le robot Xiaoyi a passé avec succès le concours national de médecine en Chine.»

          Le professeur Jacques Marescaux

          De retour en salle, les participants ont pu admirer de splendides images de l'Antarctique commentées par Jérôme Chappellaz, directeur de l'Institut polaire français Paul-Émile Victor. Ce laboratoire de l'extrême étudie les réactions physiologiques et psychiques de l'humain lorsqu'il est poussé dans ses derniers retranchements. L'Agence spatiale européenne profite de cet environnement particulièrement inhospitalier - froid intense, manque d'oxygène, nuits sans fin et isolement prolongé - pour envoyer des astronautes et simuler des missions sur Mars.

          Damien Desmedt, DG d'Intuitive Surgical France.
          Damien Desmedt, DG d'Intuitive Surgical France. Francois Le Guen

          Deuxième thème de ce Big Bang Santé, la santé à domicile concentre beaucoup d'espoirs alors que le vieillissement de la population fait exploser le nombre d'affections de longue durée - celles-ci coûtent plus de 90 milliards d'euros par an en France. «Un patient chronique traité à domicile coûte environ 200 euros par jour, c'est dix fois moins cher que lorsqu'il est à l'hôpital» a souligné Isabelle Vitali, directrice de l'innovation chez Sanofi, lors d'une passionnante table ronde.

          «Un patient chronique traité à domicile coûte environ 200 euros par jour, c'est dix fois moins cher que lorsqu'il est à l'hôpital.»

          Isabelle Vitali, directrice de l'innovation chez Sanofi

          Le laboratoire français s'est lancé depuis une dizaine d'années dans l'e-santé. Il a développé avec l'éditeur de logiciel Voluntis l'application mobile Diabeo, qui calcule les doses d'insuline en fonction de différents paramètres d'un patient diabétique comme sa glycémie, son alimentation et son activité physique. «Grâce à la télémédecine, les patients deviennent plus autonomes et plus libres. Mais attention au revers de la médaille, il y a un risque d'isolement et de perte de relation avec le corps médical» a mis toutefois en garde Laure Guéroult-Accolas, présidente de l'association Patients en réseau.

          La matinée s'est achevée avec le généticien Jean-François Mattei. L'ancien ministre de la santé fonde beaucoup d'espoir sur les techniques émergentes qui permettront de corriger le génome et donc de résoudre un grand nombre de maladies… De quoi résister à la tentation eugéniste. Le professeur a profité de sa tribune pour critiquer la révision en cours de la loi bioéthique dont le périmètre inclut l'extension de la procréation médicalement assistée (PMA) alors qu'il n'y a «aucun enjeu scientifique - elle est déjà pratiquée depuis quarante ans!». La question de la PMA déchaîne les foules et étouffe tout le reste. «Les vrais sujets sont passés sous silence», a-t-il dénoncé.

          Le généticien Jean-François Mattei.
          Le généticien Jean-François Mattei. Francois Le Guen

          L'après-midi a démarré sur les chapeaux de roues par un hommage très rafraîchissant aux grands inventeurs de notre temps par Bruno Halioua. Petit exploit, le professeur d'histoire à La Sorbonne a livré en un quart d'heure, montre en main, une histoire de l'innovation en médecine. Où on a appris que la première téléconsultation datait de 1967 et que l'invention de l'échographie dérivait du sonar équipant les sous-marins!

          Six mois après la sortie du rapport Villani, on ne pouvait évoquer l'avenir de la médecine sans parler d'intelligence artificielle, le troisième thème de la journée. La France a une vraie carte à jouer dans cette discipline. Dotée d'ingénieurs, de mathématiciens et de médecins de qualité, elle a «tout ce qu'il faut pour devenir leader mondial de l'intelligence artificielle dans la santé», a lâché Nikos Paragios, le PDG de la start-up TheraPanacea qui utilise l'IA au service de la radiothérapie. Pour autant, les entrepreneurs du secteur butent sur la frilosité des capital-risqueurs.

          «On manque d'investisseurs suffisamment audacieux et patients pour parier sur des technologies qui n'ont pas encore de marché or c'est seulement comme ça qu'on créera des leaders tricolores.»

          Nikos Paragios, PDG de TheraPanacea

          «On manque d'investisseurs suffisamment audacieux et patients pour parier sur des technologies qui n'ont pas encore de marché - or c'est seulement comme ça qu'on créera des leaders tricolores» a déploré le dirigeant grec, qui a travaillé cinq ans aux États-Unis. «La France peut se targuer de nombreuses start-up de qualité dans l'IA, mais pas de grands groupes» a renchéri Yves L'Epine, DG du groupe Guerbet, qui a fustigé la lenteur des autorités à fixer un cadre réglementaire clair pour les chercheurs en IA. Or le temps presse et la concurrence se fait vive. «On fait de l'éthique pendant que les autres font du business…» a fustigé le dirigeant.

          La chercheuse Nataliya Kosmyna.
          La chercheuse Nataliya Kosmyna. Francois Le Guen

          Alors que les conférences et les tables rondes se sont enchaînées à un rythme soutenu tout au long de la journée (relayées par quelque 4500 tweets), un silence éloquent a envahi la grande salle de la maison de la Chimie lorsque Vincent, un cobaye humain équipé d'un casque muni d'électrodes, a déplacé une boule robotisée avec la pensée. La démonstration était orchestrée par la chercheuse Nataliya Kosmyna, docteure en informatique à l'université de Grenoble et spécialiste des interfaces hommes machines. Avec sa start-up Braini, cette femme coquette, même pas trentenaire, compte améliorer l'autonomie des personnes dépendantes en les rendant capables d'ouvrir une porte ou d'allumer une pièce simplement en imaginant ces actions.

          «Les transhumanistes constatent qu'on a fait le maximum pour atteindre notre plein potentiel et ils veulent aller plus loin n'est-ce pas légitime?»

          Pascal Picq

          Le paléoanthropologue Pascal Picq.
          Le paléoanthropologue Pascal Picq. Francois Le Guen

          En fin de journée, la médecine a fricoté avec la science-fiction lorsque le Big Bang s'est penché sur l'homme augmenté. Comme l'a rappelé Jean-François Toussaint, professeur de physiologie à l'université Paris Descartes et ancien champion de France de volley-ball, l'être humain semble avoir atteint ses limites depuis une vingtaine d'années - en termes de taille, de performances sportives ou encore d'espérance de vie.

          Le QI régresse, l'obésité gagne du terrain. «Les transhumanistes constatent qu'on a fait le maximum pour atteindre notre plein potentiel et ils veulent aller plus loin - n'est-ce pas légitime?» s'est interrogé le paléoanthropologue Pascal Picq.

          Le fugturologue Joël de Rosnay.
          Le fugturologue Joël de Rosnay. Francois Le Guen

          Quitte à aller dans la prospective, le futurologue Joël de Rosnay a conclu la journée en livrant sa vision du monde pour… l'an 2500. Un monde dans lequel nous souscrirons à un contrat de maintenance de notre santé, sur le même principe que celui de nos voitures aujourd'hui ; dans lequel les cerveaux humains seront connectés à un grand réseau neuronal planétaire auquel ils apporteront leur créativité ; et dans lequel nous pourrons communiquer avec les abeilles et les plantes grâce à des programmes de traduction automatique. L'homme pourra aussi télécharger et ingurgiter un livre en quelques secondes. Pour autant, la rencontre entre individus aura toujours de la valeur. Alors, qui sait, le Big Bang du Figaro existera peut-être encore…

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          25 commentaires
          • Avatar Abonné
            Le Goulay

            Fifo:: c'est tout a fait ça "En France on fait de l'éthique quand les autres font du business"et on passe à coté .j'en veux pour preuve Théraclion !une société française utilisant les ultrasons thérapeutiques. sous contrôle. La combinaison de la thérapie par ultrasons focalisés à l'imagerie par échographie, pour un traitement précis, individualisé et non invasif.C'est un appareil fabuleux reconnu dans ce nombreux pays dont la France et qui en France végète littéralement ,faute de financement.c'est lamentable!Quel gâchis..et ce serait une économie pour la Sécurité sociale.et pour nous tous C'est la France!!

          • pacalou06

            Moi je propose qu’on injecte une rfid d’humanité, de justice et d’amour dans tous les membres de l’oligarchie mondialiste qui veut nous transformer en robots pour son plus grand bénéfice.

          • pacalou06

            Dieu nous a créés finis, toute cette ia est chimérique.

          • pacalou06

            Mr Rosnay, votre monde chimérique sera renversé par ordre divin.

          • Etirado

            Le progrès consiste à transformer l'homme en patient, c'est à dire l'Homme libre en sujet d'un système. Au profit de qui ? Que tout bien portant soit un malade qui s'ignore est un droit fondamental. Libre et mortel ou immortel et asservi, c'est toute la question.
            Le progrès offre plus de perspective d’asservissement que de perspective de liberté responsable. On en est là.

          • Fifo

            Le retard français est resume dans un phrase dans cet article: "En France on fait de l'éthique quand les autres font du business." On traine, tergiverse, on se plaint lève les bras au ciel. Les autres ne nous demandent plus notre avis.

          • KLOUK

            Tous ces gens ne pensent qu'au fric

          • camelia 32

            pour naitre sans bras sans doute? plus besoin de produits chimiques dans la bouffe, on fait ça dès la naissance? avec un ministre capable de nous dire "prouvez le que c est de la faute du medecin!"

          • Henriette du Mans

            "les cerveaux humains seront connectés à un grand réseau neuronal planétaire auquel ils apporteront leur créativité"

            Il sera alors plus difficile de lutter contre les intégrismes à moins bien entendu que ceux-ci ne soient éradiqués bien avant...

          • Avatar Abonné
            wilfrid chaperon

            Intéressant

            Mais avant de penser a connecter le cerveau a un vaste web neuronal -ou a converser avec les abeilles, occupons nous d apporter des solutions aux malades du cancer métastasé, a ceux atteints de maladies dégénératives.
            Tres peu de progres ont ete accomplis dans ces 2 domaines sur les 30 dernieres annees.

          • E-conoclast

            Le jour où on arrivera au moins à écourter un rhume on applaudira...

            La médecine est un fantasme.

          • Avatar Abonné
            Nap4

            Euh... il y avait un médecin dans la salle ? Non ? Normal, ils étaient occupés dans les déserts médicaux...

          • Padepipo

            Pure spéculation.....Ils disent peut être vrai, mais trop tôt...Ils jouent avec l'espoir...

          • ip94

            Tuer toutes les cellules cancéreuses ? Il nous prend pour des imbéciles Laurent Levy.

          • pacalou06

            Je ne veux pas être augmentée. Je suis et resterai une humaine croyante, conservatrice et fière de l’être.
            Satan a certes encore un temps. Son chant du cygne a commencé, grâce à Dieu.

          • Beagri 1

            Bravo a cette France qui cherche, réfléchit, invente crée, et guérit

          • HISTRIMONT

            Oui, vraiment une très belle journée, très riche et pleine de questionnements ! Merci au Figaro... Quel plaisir de voir que la France dispose de réels atouts, ce qui nous change de cette actualité centrée sur les boulets que nous avons à gérer. On peut juste regretter, mais cela sortait un peu du thème de cette journée, une réflexion plus poussée sur la manière dont il nous faudra gérer, un jour, cette évolution de l’humanité, en partie en tout cas, vers un mix entre la nature humaine et l’intelligence artificielle incorporée à cette nature humaine. Joël de Rosnay a brillamment présenté ce qu’il pressentait pour l’avenir du monde en 2100 et effectivement symboliquement en 2500. Humblement, je me permettrais de considérer qu’il raisonne en projection de ce que nous pouvons pressentir des progrès actuels alors que l’histoire nous montre que les évolutions se font oar rupture c’est à dire avec des découvertes qui révolutionnent complètement notre savoir et donc notre mode de vie... l’avenir dépasse notre imagination... et c’est tant mieux !!!