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Raccourcis * Résumé * Plan de l'article * Citer cet article * Sommaire du numéro Voir aussi * Sur un sujet proche Regards croisés sur l'économie 2009/2 (n° 6) * Pages : 268 * ISBN : 9782707158765 * DOI : 10.3917/rce.006.0149 * Éditeur : La Découverte * À propos de cette revue * Site de la revue __________________________________________________________________ Alertes e-mail Sommaire des nouveaux numéros ____________________ Voir un exemple (BUTTON) S'inscrire ➜ ALERTES EMAIL - REVUE Regards croisés sur l'économie Votre alerte a bien été prise en compte. Vous recevrez un email à chaque nouvelle parution d'un numéro de cette revue. Erreur lors de l'enregistrement de votre alerte. Vous avez déjà enregistré cette alerte. Vous pouvez gérer vos alertes depuis le menu Mon cairn.info. Fermer __________________________________________________________________ Article précédent Pages 149 - 158 Article suivant * Ajouter à ma bibliographie * Supprimer de ma bibliographie * Télécharger au format PDF * Version imprimable Réconcilier environnement, marché et progrès technique 1 Depuis longtemps, les amateurs d’idées reçues opposent lutte pour la préservation de l’environnement et économie de marché. Ce point de vue est particulièrement celui des altermondialistes, pour qui le capitalisme, avec ses injustices (réelles) et ses crises périodiques, n’apporte que chômage et destruction de la planète par la recherche systématique du profit dans une vision exclusivement court-termiste ; mais il est tout autant celui des ultra-libéraux, opposés à toute forme d’intervention publique, de contrôle, de taxe, de marché organisé, même s’il s’agit de préserver notre planète, et donc notre avenir à tous. Pour eux, la « main invisible » chère à Adam Smith suffira à résoudre tous les problèmes. 2 Ces visions manichéennes sont bien sûr aussi absurdes l’une que l’autre. Le marché n’est pas, par essence, l’ennemi de l’environnement, ni l’environnement l’ennemi du marché. Il suffit de mettre en place les incitations nécessaires et d’éclairer l’horizon à long terme pour que les marchés jouent en faveur du développement durable et non plus contre lui. 3 De même, le progrès scientifique, qui inspire des craintes irraisonnées à certains et conduit à une application abusive du principe de précaution – nos concitoyens redoutent aujourd’hui, pêle-mêle, les organismes génétiquement modifiés (OGM), l’énergie nucléaire, les nanoparticules, les ondes électromagnétiques, et même le bruit des éoliennes… – est en réalité un allié et non un ennemi de l’environnement. Une opportunité d’investissements massifs dans les technologies vertes 4 La base d’une relance verte est bien sûr la mobilisation de fonds, publics et privés, pour investir dans les nouvelles technologies – qu’il s’agisse des voitures électriques, des énergies renouvelables, de la dépollution des sols ou des rivières, ou de la valorisation des déchets – et pour économiser l’énergie partout où cela est possible, à commencer par les secteurs des transports et du bâtiment, fort négligés jusqu’ici. 5 La facture d’une politique efficace de protection de l’environnement est importante, mais elle est loin d’être insurmontable. Diverses approches l’estiment aux environs de 1 % du produit mondial, soit à peu près 500 milliards de dollars par an [1][1] Le chiffre de 1 % du produit mondial est donné par.... 6 La crise économique offre à cet égard une chance inattendue, que les gouvernements devraient savoir mieux saisir. En effet, face à l’effondrement de la demande, des plans de relance keynésiens ont été lancés un peu partout, et les autorités ont accepté d’oublier temporairement toutes les limites mises à la dépense publique. Les programmes de relance mis en place aux États-Unis comme en Europe ou en Chine se chiffrent par centaines de milliards de dollars [2][2] Près de 800 milliards de dollars aux États-Unis, soit..., atteignant non pas 1 ou 2 points de produit intérieur brut, mais 5 % à 7 % du produit national en moyenne. Les moyens colossaux ainsi dégagés pourraient fournir l’occasion de répondre complètement aux besoins de la croissance verte, et de réussir une relance économique qui soit en même temps l’accomplissement d’un véritable programme écologique au service du développement durable. 7 Tel n’est malheureusement pas le parti qui a été retenu le plus souvent : au-delà des sommes considérables – et sans doute nécessaires – vouées au sauvetage du secteur financier, on peut regretter que beaucoup de moyens aient été consacrés à des investissements classiques, au mieux neutres et souvent nuisibles sur le plan écologique, tels que la construction de nouvelles autoroutes (qui contribuent à la fois à l’augmentation de la circulation, et donc des émissions de CO[2], et à la destruction de la biodiversité). Il est vrai cependant – et c’est nouveau – que les plans de relance actuels incluent aussi un volet environnemental non négligeable, tant aux États-Unis qu’en Europe, ou dans les pays émergents [3][3] Le volet environnemental des plans de relance est de.... En France par exemple, les moyens dégagés vont permettre d’accélérer la construction de lignes de TGV et d’édifier de nouveaux bâtiments publics ou privés aux normes de consommation énergétique très améliorées. La « prime à la casse » elle-même, qui a dopé efficacement l’industrie automobile en France et en Allemagne comme aux États-Unis, peut paraître contestable dans la mesure où elle encourage un mode de transport polluant ; mais elle a surtout l’effet utile de débarrasser le marché de véhicules anciens beaucoup plus polluants que les nouveaux modèles. Le volet « vert » des plans de relance a aussi permis de donner un élan supplémentaire aux énergies renouvelables, qu’il s’agisse de solaire, d’éolien, de biomasse, de la construction de grands barrages ou de centrales électriques nucléaires. Inciter les entreprises à s’inscrire dans ce mouvement 8 Cependant, l’investissement public ne peut pas tout faire. Il faudra bien d’ailleurs que les budgets reviennent vers l’équilibre et que la dépense publique diminue si l’on veut éviter une augmentation décourageante de la fiscalité. Il est donc essentiel que le relais soit pris par l’investissement privé. 9 Pour y parvenir, il faut retourner en faveur de l’environnement les mêmes lois économiques qui ont jusqu’ici conduit à sa mise en danger. Il faut et il suffit pour cela qu’il devienne rentable d’économiser l’énergie, de réduire les émissions polluantes et d’investir dans les énergies renouvelables, les technologies propres, la protection de la biodiversité ou le retraitement des déchets. 10 L’intervention publique a alors pour but d’infléchir les choix en décourageant les comportements anti-écologiques et en valorisant les efforts accomplis. Les moyens pour y parvenir sont connus : * réduire les taxes (intérieures ou à l’importation) sur les produits verts [4][4] Par exemple, l’Union européenne et les États-Unis ont,.... Les crédits d’impôts mis en place pour encourager les voitures électriques ou les chauffe-eau solaires en sont un exemple ; * valoriser la tonne de carbone économisée. Deux systèmes complémentaires existent pour cela : celui du plafonnement des émissions avec échange de permis sur un marché tel qu’il fonctionne en Europe (marché ETS) mais aussi de plus en plus à l’étranger, du Canada à l’Australie et au Japon, et bientôt aux États-Unis [5][5] On sait que le Président Obama s’est engagé sur la... ; et celui de la taxe carbone, déjà en vigueur dans les pays scandinaves depuis les années 1990. Son introduction, annoncée en France pour 2010 sous le nom de « contribution climat-énergie », est une sage décision, même si elle se situe, au départ, à un niveau trop bas (17 € la tonne) pour être pleinement incitative ; * encourager l’« investissement socialement responsable » des entreprises, tant par la législation que par les initiatives collectives de ces entreprises. Ces efforts devraient permettre à de nouvelles activités vertes de se développer rapidement. Le champ qui leur est ouvert est immense : maîtrise de l’eau, protection des forêts et des terres arables, recyclage des déchets, isolation des bâtiments, développement des énergies renouvelables, des transports écologiques, de la chimie verte, mais aussi de services spécialisés d’ingénierie de l’environnement ou de mesure et contrôle de la pollution. Des métiers comme la mise à disposition temporaire de biens (voitures, équipements, logements) vont se développer. Une stratégie payante à la fois en termes financiers et en termes de développement durable consiste, en effet, à substituer à la vente d’un bien la fonction d’usage : au lieu de céder à un « consommateur final » des biens dont la durabilité importe peu à l’entrepreneur, il les met à disposition en en conservant la propriété et en y intégrant au fur et à mesure les perfectionnements qui les préservent [6][6] Ou bien, il loue successivement le même bien à plusieurs.... 11 L’environnement devient aussi un secteur d’activité de plus en plus porteur pour les entreprises : on estime le marché mondial de l’ensemble des « éco-industries » ou « technologies propres » (clean techs) à quelque 600 milliards d’euros annuels, soit déjà 1,5 % du produit mondial, avec une croissance annuelle de 5 % à 10 % [7][7] Plus étroit (environ 150 milliards de dollars), le.... Un récent rapport de l’Organisation internationale du travail estime qu’une centaine de millions d’« emplois verts » existent déjà dans le monde et souligne que ces activités sont plus intensives en main-d’œuvre que d’autres. 12 On attend des énergies nouvelles 220 000 emplois chez nous (le seul développement de l’énergie éolienne a déjà créé 45 000 emplois directs en Allemagne) et 2 millions à l’échelle européenne. Le secteur du bâtiment offrirait aussi 235 000 postes nouveaux liés à l’environnement en France – 1 million à l’échelle européenne. Le président américain Barack Obama a promis de son côté la création dans les prochaines années d’au moins 5 millions d’emplois « verts ». 13 On peut ajouter à tout ceci le développement des nouveaux services financiers liés au développement durable : financement de programmes de dépollution, de captage de gaz à effet de serre (GES), de replantation ou de biodiversité permettant de récupérer des crédits carbone ; activités légales associées ; couvertures financières à partir d’indices climatiques ; assurance non seulement des catastrophes naturelles liées au changement climatique mais aussi des risques liés à l’application des lois pollueur-payeur ou au développement des OGM ; capital-risque spécialisé dans les clean techs. 14 On le voit, tous les éléments économiques d’une relance verte sont là ; son succès dépend d’une volonté politique suffisante pour la mettre en place. Les perspectives offertes par les progrès des technologies vertes 15 Dans cet effort, les investisseurs pourront s’appuyer sur les vastes perspectives offertes par les nouvelles technologies. Chacun des secteurs de l’environnement peut bénéficier de changements décisifs grâce à des innovations concrètes. 16 Dans les transports, les progrès récents comme le système stop and start, la récupération de l’énergie du freinage et les pots catalytiques ont déjà beaucoup réduit la consommation et les émissions des véhicules automobiles. Les voitures hybrides thermiques/électriques permettent une réduction encore plus substantielle. Surtout, les progrès des accumulateurs mettent enfin les constructeurs en mesure d’obtenir à des conditions moins onéreuses des voitures électriques silencieuses et non polluantes, idéales au moins pour la circulation en ville. À terme, la propulsion par hydrogène (soit par alimentation directe sous forme liquide, soit à travers une pile à combustible) pourrait changer totalement la situation. 17 Dans le domaine de l’habitat et de l’urbanisme, les nouvelles technologies vont permettre de réaliser des immeubles « à énergie positive », c’est-à-dire procurant davantage d’énergie qu’ils n’en consomment, en alliant l’énergie solaire ou éolienne, les ventilations naturelles et la récupération de chaleur à de nouveaux matériaux isolants et à des toits et murs végétalisés. Certains seraient même capables de pivoter pour suivre la lumière. Bien d’autres progrès technologiques sont en cours : des murs chauffants ou climatisants ; des vitrages ou des murs totalement autonettoyants (grâce à des oxydes de titane), ou utilisant les propriétés anti-microbiennes des ions d’argent ; l’éclairage soit en lumière naturelle distribuée par fibres optiques, soit par des diodes électroluminescentes (LED), et à terme par des diodes organiques (OLED) en matières plastiques transparentes qui permettront de disposer de murs, plafonds, vitres éclairant la nuit ou chauffants. 18 Dans la vie quotidienne, l’éco-conception – c’est-à-dire l’utilisation de matériaux conçus dès le départ pour être renouvelables – va se répandre. De nouvelles fibres textiles, matières premières de vêtements, de garnitures ou d’emballages, et des matières plastiques rapidement biodégradables, issues du vivant et renouvelables, sont déjà produites à partir de végétaux, en utilisant l’amidon ou la cellulose des plantes [8][8] Deux grandes familles se détachent : les bioplastiques.... On tire d’épluchures ou même d’huile de ricin des objets aussi variés que des chaussures de sport, de la vaisselle jetable, des bouteilles et des emballages de plantes. Le gain environnemental est énorme : un sac en bioplastique se résorbe naturellement en trois à huit semaines, contre cent à quatre cents ans pour les plastiques traditionnels ! Ces produits, qui ne représentent encore qu’une part infime (quelques millièmes) de la consommation, devraient donc se développer vite et remplacer largement, à terme, le pétrole, source actuelle de la plupart des matières plastiques. 19 Par ailleurs, les progrès de la recherche permettent aussi aujourd’hui d’utiliser des produits naturels aussi courants que… des champignons pour remplacer fibre de verre ou matières plastiques en tant qu’isolants. On redécouvre les vertus de fibres comme le sisal, naturellement anticorrosif et biodégradable, pour fabriquer sacs et emballages. Le chanvre et le lin, peu coûteux et produits sans aucun traitement chimique, pourront remplacer la laine de verre pour isoler ou renforcer les matériaux [9][9] Ils servent déjà à fabriquer des pièces automobiles.... Les fibres textiles intégreront des micro-capsules contenant du charbon actif, du parfum, des produits traitants, etc. Et des « emballages intelligents » permettront de détecter rapidement les produits d’alimentation périmés ou contaminés, notamment par l’intermédiaire de puces RFID [10][10] Par exemple, 10 universités canadiennes ont formé avec.... 20 Dans le domaine de la lutte contre la pollution sont en cours de mise au point des piles électriques écologiques ressemblant à une carte de crédit, des microsphères capables de nettoyer le sang des victimes de pollutions chimiques radioactives ou biologiques, des revêtements de sol absorbant des produits dangereux [11][11] Comme le goudron dépolluant récemment introduit en.... Plus largement, des bactéries extrêmement résistantes, comme par exemple Deinococuus radiodurans, vont de plus en plus pouvoir jouer le rôle de microbes éboueurs capables de débarrasser sol, eau, air de matières chimiques très dangereuses [12][12] Telles que le thrichloroéthane ou le perchloréthylène,.... On sait aussi de mieux en mieux stimuler des plantes naturellement capables de stocker les polluants en les tirant de sols gorgés d’herbicides, de pesticides, de nitrates ou de métaux lourds. Des procédés sont en cours de développement pour faire produire de l’électricité par des bactéries se nourrissant d’eaux usées, etc. 21 Les énergies nouvelles vont devenir progressivement plus performantes grâce à des innovations concernant les éoliennes, mais surtout l’énergie solaire avec une nouvelle génération de cellules photovoltaïques à couche mince, de nouveaux matériaux permettant d’utiliser toutes les longueurs d’ondes de la lumière, des cellules solaires plastiques souples (et donc enroulables/déroulables) et bon marché, etc. Des projets expérimentaux visent par ailleurs à transformer directement le gaz carbonique en hydrocarbures en utilisant la technologie des nanotubes de carbone. Le stockage de l’énergie venant de sources intermittentes (vent, soleil, vagues, etc.) pourrait être assuré en produisant par électrolyse, pendant les phases actives, de l’hydrogène qui restituerait ensuite, pendant les phases de nuit ou de calme, l’énergie accumulée en faisant fonctionner une pile à combustible [13][13] Il existe déjà quelques centrales mixtes solaire-hydrogène,... ; on peut y voir la préfiguration d’une « économie hydrogène » complète. Les biocarburants actuels, contestés à cause de la concurrence qu’on les accuse de faire aux productions alimentaires, seront relayés par de nouvelles générations tirées de plantes comme le panic ou le jatropha, qui offrent des rendements beaucoup plus élevés sans empiéter sur les terres arables actuelles. De véritables « biorafineries » pourraient même fonctionner à partir d’algues riches en lipides fournissant du biodiesel, ou même de simples prairies par transformation de l’herbe en acide lactique. 22 Pour lutter contre le réchauffement climatique, un apport décisif sera la mise en œuvre de procédés enfin efficaces pour rendre les centrales thermiques au gaz ou au carbone propres en traitant et en stockant en sous-sol les gaz émis. S’il reste encore des progrès à faire dans cette voie, on peut espérer une percée avant 2020. En milieu marin, le « dopage » de cyanobactéries (algues bleues) pourrait permettre de fixer par photosynthèse d’importantes quantités de CO[2]. D’autres microorganismes seraient en mesure de capter une partie du méthane, également à la source de l’effet de serre. 23 S’agissant de préserver les milieux naturels, n’oublions pas que les plantes peuvent, à condition de ne pas refuser systématiquement le recours aux OGM, fournir un apport décisif en matière de protection contre toutes sortes de détériorations de l’environnement : résistance à la salinisation, à la sécheresse, aux intempéries extrêmes… La sélection ou la recombinaison génétique offrent, de plus, de nouvelles perspectives d’amélioration du rendement et de la valeur nutritive des céréales et d’autres productions alimentaires. Elles permettent enfin de développer la résistance aux prédateurs sans usage ou avec une utilisation réduite d’insecticides [14][14] La résistance aux prédateurs est notamment le fait..., dont les méfaits sur la santé humaine et animale se confirment de jour en jour. 24 On voit bien aujourd’hui se dessiner ainsi toute une « génoéconomie » de haute technologie, qui remplacera progressivement la pétrochimie pour le plus grand bien de l’écologie de la planète. 25 Chacun peut constater que la palette de possibilités offertes par le progrès technologique et scientifique est vaste. Heureusement d’ailleurs, car croit-on vraiment parvenir à ne serait-ce qu’approcher l’objectif très ambitieux retenu par le GIEC (et auquel la France a souscrit) d’avoir divisé par quatre nos émissions de GES d’ici à 2050 avec les seules technologies actuelles ? Croit-on pouvoir, au même horizon, nourrir plus de neuf milliards d’humains avec les seules ressources d’une agriculture « bio » remettant en honneur les façons culturales anciennes ? Croit-on pouvoir traiter efficacement nos montagnes de déchets sans continuer à détériorer gravement notre environnement, si on n’y applique pas toutes les ressources du progrès scientifique ? 26 Je ne prétends aucunement, comme l’a longtemps fait l’administration Bush aux États-Unis, que la science peut à elle seule résoudre les problèmes de la planète, mais elle y apportera une contribution décisive. De même que seule l’innovation scientifique a permis de réels progrès en médecine, triplant notre espérance de vie moyenne, c’est bien à la technologie que nous devons la « révolution verte » qui a permis de faire reculer la famine ou des fléaux comme la pullulation périodique de criquets. C’est pourquoi il faut absolument vaincre les peurs irrationnelles devant la science et l’innovation – y compris, j’y insiste, en matière d’OGM. Conclusion 27 Telles sont les clefs d’une « relance verte » réussie, qui non seulement ne sera pas ennemie de la croissance mais lui fournira de nouveaux aiguillons. L’optimisme est donc permis à la perspective d’un monde transformé à partir d’investissements judicieux dans les énergies nouvelles, l’économie d’énergie, la lutte contre la pollution et grâce à la mise en œuvre efficace des percées récemment faites dans le domaine de la recherche sur tous ces sujets. Les instruments du succès sont là. À nous de savoir les utiliser ! Notes [1] Le chiffre de 1 % du produit mondial est donné par le célèbre rapport Stern de 2006. D’autres estimations comme celle de l’OCDE et celle de l’Agence internationale de l’énergie, parues en 2007 et 2008, corroborent cet ordre de grandeur. Le chiffre de 2 % est parfois également avancé. L’Union européenne estime le coût de son propre programme pour le climat à 0,6 % de son PIB d’ici 2020. Pour la France, le projet de loi « Borloo 1 », plus ambitieux, retient un coût de 440 milliards d’euros d’ici 2020, soit 1,6 % du PIB du pays sur cette période. [2] Près de 800 milliards de dollars aux États-Unis, soit 7 % du PIB, 400 milliards d’euros pour les pays européens, soit 3,3 % du PIB, un peu plus de 400 milliards d’euros pour la Chine, soit 11 % du PIB. [3] Le volet environnemental des plans de relance est de 15 à 20 % du total aux États-Unis et en Europe. En Chine, il ne représente que 8 % du total (35 milliards d’euros sur 420) et est consacré surtout au traitement des eaux usées. [4] Par exemple, l’Union européenne et les États-Unis ont, fin 2007, proposé ensemble d’éliminer les taxes à l’importation sur une série de produits écologiques dont le marché représente plus de 400 milliards d’euros. [5] On sait que le Président Obama s’est engagé sur la création d’une bourse d’échanges de permis d’émissions, qui devrait intervenir dès 2011 et a été précédée d’initiatives privées ou régionales. En revanche, le Sénat australien vient (en août 2009) de rejeter le projet de création d’un marché local d’échange des permis d’émissions sur lequel le gouvernement de M. Kevin Rudd s’était engagé. [6] Ou bien, il loue successivement le même bien à plusieurs usagers, avec recyclage intégral en fin de course – ce qui est bien préférable à sa vente, d’un point de vue écologique. [7] Plus étroit (environ 150 milliards de dollars), le marché des énergies renouvelables croît, lui, de près de 30 % par an. [8] Deux grandes familles se détachent : les bioplastiques à base d’amidon (tiré de céréales comme le blé ou le maïs, de pommes de terre ou de betteraves), comme le « master-bi » produit par l’italien Novamont ; et ceux qui ont pour base la cellulose des plantes ou des arbres. Mais on tire même des bioplastiques de simples écorces d’oranges. [9] Ils servent déjà à fabriquer des pièces automobiles (tableaux de bord, panneaux de portes, isolants) et des tissus innovants. [10] Par exemple, 10 universités canadiennes ont formé avec le Conseil national de recherche le réseau Sentinel pour développer un papier d’emballage bioactif, changeant de couleur au contact d’un produit contaminé ; la création de filtres de papier dont la coloration indiquerait si une eau est potable ou non est aussi envisagée. La Finlande poursuit un projet similaire, pour commercialisation d’ici cinq à dix ans. [11] Comme le goudron dépolluant récemment introduit en France, qui ingère les molécules d’oxyde d’azote et les transforme par photosynthèse. [12] Telles que le thrichloroéthane ou le perchloréthylène, l’arsenic ou des particules radioactives. [13] Il existe déjà quelques centrales mixtes solaire-hydrogène, ou éolien-hydrogène. [14] La résistance aux prédateurs est notamment le fait de plantes OGM auxquelles un gêne « BT » a été transféré par génie génétique, mais elle peut aussi être obtenue par des produits naturels comme la laminarine fournie par des algues brunes, ou l’usage de nanoparticules de silicate. Plan de l'article 1. Réconcilier environnement, marché et progrès technique 2. Une opportunité d’investissements massifs dans les technologies vertes 3. Inciter les entreprises à s’inscrire dans ce mouvement 4. Les perspectives offertes par les progrès des technologies vertes 5. Conclusion __________________________________________________________________ Article précédent Pages 149 - 158 Article suivant Citer cet article ISO 690 Jurgensen Philippe, « Qu'attendre de la relance verte ? Le rôle des incitations et de la recherche », Regards croisés sur l'économie, 2009/2 (n° 6), p. 149-158. DOI : 10.3917/rce.006.0149. URL : https://www.cairn.info/revue-regards-croises-sur-l-economie-2009-2-page -149.htm Copier MLA Jurgensen, Philippe. « Qu'attendre de la relance verte ? Le rôle des incitations et de la recherche », Regards croisés sur l'économie, vol. 6, no. 2, 2009, pp. 149-158. Copier APA Jurgensen, P. (2009). Qu'attendre de la relance verte ? Le rôle des incitations et de la recherche. Regards croisés sur l'économie, 6,(2), 149-158. doi:10.3917/rce.006.0149. Copier Exporter la citation * RefWorks * Zotero (.ris) * EndNote (.enw) CAIRN.INFO : Chercher, repérer, avancer. 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