Donald Trump victorieux, Marine Le Pen exulte. La candidate du FN a été l'une des premières, au sein de la classe politique française, à saluer le président élu, ou plutôt à se satisfaire de la défaite des "élites" illustrée par Hillary Clinton. A l'instar de son numéro 2, Florian Philippot, elle a vu dans l'élection du milliardaire une manifestation de la "liberté" du peuple américain, et un signe encourageant pour son parti qui porte, lui aussi, un discours protectionniste et anti-immigration. Comme Donald Trump aux Etats-Unis, Le FN peut-il déjouer les pronostics des sondages en France et remporter le scrutin en mai prochain ? Le point avec Thomas Guénolé, politologue et enseignant à Science-Po.
LCI : Comment interprétez-vous la victoire de Donald Trump à la présidentielle américaine ?
Thomas Guénolé : Cette élection a déjoué tous les pronostics des instituts de sondages, qui n'ont pas pris en compte une partie de la population qui est allée voter. La quasi totalité des sondeurs et des journalistes ne l'avaient pas vu venir. Je vois dans cette victoire de Donald Trump une conséquence de l'hystérisation du système des médias de masse télévisuels aux Etats-Unis, qui a transformé cette campagne en match de catch. En outre, Donald Trump apparaissait comme le seul candidat anti-système de l'élection, le phénomène Bernie Sanders ayant été éliminé dès la primaire démocrate.
LCI : Marine Le Pen y voit une chance pour elle-même en 2017. Est-ce crédible ?
Thomas Guénolé : En France, il n'y a qu'un scénario dans lequel Marine Le Pen serait susceptible de remporter la présidentielle en mai 2017 : celui où elle affronterait un candidat impopulaire de l'aile droite de la gauche, en l'occurrence François Hollande, au second tour. Un scénario très improbable. A priori, nous ne sommes pas dans une configuration où la victoire d'un candidat identitariste est possible. D'autant qu'en France, vous n'aurez pas un seul candidat anti-système au premier tour de l'élection mais deux : Marine Le Pen, mais aussi Jean-Luc Mélenchon, qui ne cesse de monter dans les sondages.
LCI : Cette tendance au "rejet du système", selon les mots de Nicolas Sarkozy, est-elle aussi sous-estimée en France ? Les sondages peuvent-ils par exemple se tromper sur l'issue de la primaire à droite, où Alain Juppé semble en tête ?
Thomas Guénolé : J'ai dit à plusieurs reprises que les sondages sur cette primaire ne peuvent pas faire de prévision fiable car on ne connaît pas les caractéristiques de la population qui va voter. C'est la première fois dans la vie politique française que la droite organise une primaire ouverte. Après, en France, la seule personnalité "anti-système" comparable à Donald Trump, c'est Marine Le Pen.