Dans une imprimerie, un ouvrier lit le journal satirique «Le Canard enchaîné».
Dans une imprimerie, un ouvrier lit le journal satirique «Le Canard enchaîné». - DELAGE JEAN-MICHEL/SIPA

T.L.G.

Le Palmipède a cent ans. La première version du Canard enchaîné, lancé le 10 septembre 1915, a connu cinq numéros avant d’être « sabordée » par son fondateur Maurice Maréchal. Il reparaîtra finalement l’année suivante dans une nouvelle formule. Hebdo satirique, le Canard est aussi devenu un journal d’investigation majeur à partir des années 1970, révélant de nombreuses affaires qui ébranlèrent la Ve République. Petit florilège (non exhaustif).

L’affaire des diamants de VGE

Le 10 octobre 1979, l’affaire des diamants éclate. Le Canard enchaîné révèle que des diamants de 30 carats, d’une valeur d’un million de francs, auraient été remis à Valérie Giscard d’Estaing par Jean-Bédel Bokassa, président de la République centrafricaine. L’histoire remonterait à 1973, à l’époque où VGE était ministre des Finances. Le président affirme que le produit de ces cadeaux a été versé à des œuvres humanitaires centrafricaines. Le « Watergate parisien » ternit l’image du président pendant sa campagne. Il est battu par François Mitterrand en 1981.

Des scandales d’appartement

Juin 1995, le Canard épingle Alain Juppé, tout nouveau Premier ministre de Jacques Chirac. Lui et sa famille bénéficieraient de logements à bas prix. Il est notamment accusé d’avoir ordonné en 1993 la baisse du loyer de son fils alors qu’il était adjoint à la mairie de Paris. Un jeune avocat, un certain Arnaud Montebourg, l’attaque alors pour « prise illégale d’intérêts ». « Je reste droit dans mes bottes et je ferai mon travail », lance-t-il sur TF1. Quatre mois plus tard, le parquet de Paris classe l’affaire, à condition qu’Alain Juppé déménage.

L’hebdomadaire a révélé d’autres scandales du même genre. En 1995, les logements sociaux des enfants du maire de Paris Jean Tiberi sont révélés. Dix ans plus tard, le journal satirique s’attaque à Hervé Gaymard, qui loge avec sa famille dans un duplex parisien de 600 m2 payés 14.400 euros par mois par l’Etat. Le ministre de l’Economie est forcé de démissionner et rembourse près de 60.000 euros à l’Etat. En 2014, les rénovations de l’appartement de fonction du secrétaire général de la CGT, Thierry Lepaon, le poussent vers la sortie. Il sera finalement blanchi par l'enquête interne diligentée par le syndicat quelques mois après sa démission.

La déclaration fiscale de Chaban-Delmas

En janvier 1972, le Canard enchaîné dévoile la feuille d’impôt du Premier ministre. Seuls 16.806 francs sont déclarés pour un revenu imposable de 72.400 francs. Le journal révèle aussi que Jacques Chaban-Delmas n’a pas payé d’impôt sur le revenu pendant quatre ans. Ceci par le biais d’un moyen légal, l’avoir fiscal. Mais les conséquences politiques sont désastreuses, et minent sa campagne présidentielle de 1974.

Le prêt d’un million de Bérégovoy

En février 1993, le Palmipède dévoile le prêt, sans intérêts, d’un million de francs consenti en 1986 à Pierre Bérégovoy pour l’acquisition d’un appartement parisien. La signature est celle de l’industriel Roger-Patrice Pelat, un ami de François Mitterrand. Dans les médias, la suspicion s’installe sur l’intégrité du Premier ministre, qui lors de son discours de politique générale, a fait de la lutte contre la corruption un de ses objectifs. Le 1er mai, Pierre Bérégovoy se suicide sans un mot d’explication. « Toutes les explications du monde ne justifieront pas qu’on ait pu livrer aux chiens l’honneur d’un homme et finalement sa vie », lance François Mitterrand devant le cercueil de son ancien ministre.

Les faux électeurs de Paris

A partir de 1997, Jean Tiberi est suspecté d’avoir organisé un système de fraude électorale dans son fief. Selon le Canard, 3 à 4.000 électeurs auraient été inscrits illégalement par le RPR dans le 5e arrondissement de Paris. Il est finalement condamné en 2009 à dix mois de prison avec sursis, 10.000 euros d’amende et trois ans d’inéligibilité. En mars 2015, la Cour de cassation rejette le pourvoi de l’ancien maire de Paris et de son épouse Xavière.

Les vacances d’Alliot-Marie en Tunisie

Des vacances polémiques. En février 2011, le journal révèle que Michèle Alliot-Marie a séjourné en Tunisie, en décembre 2010, après les premières manifestations contre le président Ben Ali. Elle aurait également bénéficié de largesses de la part d’un homme d’affaires proche du pouvoir.

Quelques semaines plus tôt, la ministre des Affaires étrangères avait été critiquée pour avoir soutenu le régime tunisien et notamment proposé, « le savoir-faire de nos forces de sécurité, qui est reconnu dans le monde entier, permette de régler des situations sécuritaires de ce type ». MAM dénonce la « campagne indigne » menée contre elle, mais démissionne à la fin du mois.

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