Charlène Cotte, mère du petit Bastien, mort après avoir été enfermé dans une machine à laver.
Charlène Cotte, mère du petit Bastien, mort après avoir été enfermé dans une machine à laver. - BENOIT PEYRUCQ / AFP

Hélène Sergent

Dans les allées de la salle d’audience numéro un de la cour d’Assises de Melun, les soupirs fusent. Cette deuxième journée a été éprouvante. Dès l’ouverture des débats, les photos du corps meurtri du petit Bastien, trois ans, mort enfermé dans la machine à laver le 25 novembre 2011, ont été diffusées aux accusés, avocats et jurés. La diffusion des clichés des bleus et des plaies a été suivie par près de neuf heures de débats, conclues par l’audition de la mère de Bastien.

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Amnésie générale

La tête constamment inclinée vers le sol, les mains jointes sur le devant du corps, les cheveux ramassés en chignon, Charlène Cotte est restée évasive et avare en détail et précisions, irritant passablement la présidente de la cour. Contredisant les déclarations de sa fille aînée, Marie, âgée de cinq ans au moment des faits, l’accusée assure ne pas se souvenir avoir enfermé Bastien dans le placard de l’entrée pour le punir, avant que le garçonnet ne soit saisi par son père et enfermé dans la machine. « Ce soir-là quand je suis rentrée avec les enfants de l’école, j’ai puni Bastien dans sa chambre. C’est son père qui le punissait dans le placard », a-t-elle affirmé.

« Pourquoi vous ne vous en souvenez pas aujourd’hui ? Pourquoi tout le monde devient amnésique dans ce dossier ? », s’est emportée la présidente. Ajoutant des éléments nouveaux -son conjoint l’aurait menacé de mort pour l’empêcher de sortir Bastien du lave-linge- et réfutant ses versions passées des faits, Charlène Cotte est restée tout au long de son audition comme en dehors de son propre procès.

Jugée pour complicité de meurtre sur un mineur de moins de 15 ans, Charlène Cotte n’a cessé de justifier son incapacité à sauver Bastien par la peur que lui inspirait son conjoint : « Je n’étais plus là, j’étais comme un robot, il était assis à côté de moi sur le canapé-lit et je faisais tout ce qu’il me disait ». Un argument questionné par la présidente : « Pourquoi entre votre peur et l’enjeu vital pour votre fils vous choisissez la peur ? », « Je ne sais pas », répétera inlassablement la mère.

Une distance déroutante

Une attitude qu’a toutefois tenté de comprendre la Président : « Madame, on a diffusé les photos de votre enfant à la sortie de la machine à laver, on a entendu la colère de votre frère, on a vu les larmes de l’institutrice de Marie et Bastien et vous, vous parlez avec une voix de préadolescente, vous mettez de la distance, pourquoi vous semblez afficher une telle distance, une absence d’émotion par rapport à des faits aussi violents, hors normes ? ».

Dans un silence de plomb, la jeune femme s’est expliquée : « J’ai toujours gardé en moi les choses, je me suis construit une bulle, je n’arrive pas à exprimer ce que je ressens, mon fils est là et sera toujours là mais je n’arrive pas à pleurer, à montrer mon émotion physiquement, peut-être qu’un jour ça sortira… ». « La détention m’a fait grandir. Si cela se passait aujourd’hui, je ne l’accepterais pas. » Puis de conclure : « J’ai pris plus de caractère (…) J’ai retrouvé un certain bonheur ».