Un octogénaire aide sa femme à mourir, trois ans avec sursis requis L'épouse de l'octogénaire était atteinte de dépression depuis plusieurs années. Elle avait déjà fait plusieurs tentatives de suicide. Le tribunal correctionnel de Saint-Étienne juge un octogénaire qui avait aidé son épouse malade à se suicider. Le tribunal correctionnel de Saint-Étienne juge un octogénaire qui avait aidé son épouse malade à se suicider. © JACQUES DEMARTHON Le parquet de Saint-Étienne a requis mardi une peine minimum de trois ans de prison avec sursis à l'encontre de Jean Mercier, 87 ans, jugé pour avoir aidé son épouse à mourir en 2011. Le procureur de la République, Jean-Daniel Regnauld, a reproché au prévenu non pas d'avoir aidé sa femme à se suicider, mais la non-assistance à personne en danger, en estimant que M. Mercier aurait pu appeler les secours dans le laps de temps entre l'absorption de médicaments mortelle et le décès de son épouse. "Il avait possibilité d'agir et il ne l'a pas fait parce qu'il avait peur de se faire réprimander si elle revenait à la vie", a dit M. Regnauld. "Ce n'est pas très glorieux, mais il avait peur d'elle", a ajouté le magistrat. "Si vous pensez que je suis l'homme décrit par le procureur, je suis un lâche qui mérite la prison sans sursis", a déclaré le prévenu au tribunal. Le jugement a été mis en délibéré au 27 octobre. Jean Mercier, 87 ans, a dit n'avoir "pas de regrets" et réclame une loi digne de ce nom sur la fin de vie. "Je n'ai pas de regrets. Ce serait le cas si, au contraire, je ne l'avais pas fait" et "ce qui m'importe, c'est que la loi change, car la mort est un sujet qu'on n'ose pas aborder sereinement", a-t-il expliqué lors d'une conférence de presse mardi matin avant l'audience. "La moindre douleur lui devenait insupportable, j'ai fait semblant de ne pas comprendre la première fois en lui apportant les médicaments normaux", a-t-il raconté au sujet de son épouse. Josanne, 83 ans, souffrait de douleurs chroniques dues à l'arthrose depuis trois ans. Elle était également dépressive depuis 30 ans et avait fait plusieurs tentatives de suicide. Jusqu'au 10 novembre 2011, jour où son mari accepta de l'aider à décapsuler une quantité importante de médicaments et de lui apporter un verre d'eau, pour qu'elle les avale. Il avait attendu qu'elle décède pour appeler un médecin. À 14 heures, Jean Mercier, qui souffre de la maladie de Parkinson et d'un cancer de la prostate, comparaît devant le tribunal correctionnel de Saint-Étienne. Il encourt cinq ans de prison et 100 000 euros d'amende, selon son avocat Me Mickaël Boulay qui va plaider la relaxe. C'est un "geste d'amour" de son client qui "a prêté assistance à un acte libéré d'une personne qui avait son libre arbitre", souligne le conseil. La fin de vie va revenir à l'Assemblée Jean Mercier est soutenu par Jean-Luc Romero, président de l'Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD), présent à Saint-Étienne mardi. En octobre, le projet de loi sur la fin de vie va revenir à l'Assemblée et, "coïncidence" selon lui, "trois affaires importantes" sur le sujet vont se succéder dans les semaines à venir : Jean Mercier, Vincent Lambert et le Dr Bonnemaison. Le 29 septembre, la justice administrative se réunit sur la fin de vie de Vincent Lambert, patient victime de lésions cérébrales jugées irréversibles par les experts médicaux, à la demande de l'un de ses neveux. L'ex-médecin urgentiste va être pour sa part rejugé en appel du 12 au 24 octobre pour l'empoisonnement de sept patients en fin de vie dans un hôpital de Bayonne. Pour Jean-Luc Romero, Jean Mercier "est une victime de la loi française". En février, le tribunal de Saint-Étienne avait rejeté une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) soulevée par la défense, relative à l'assistance au suicide, qui estimait que la loi française devait intégrer les règles dégagées par la Convention européenne de droits de l'homme, en faveur de l'émergence d'un droit au suicide assisté. En juin, le Sénat avait rejeté en première lecture la proposition de loi sur la fin de vie. Le texte doit maintenant repartir pour une deuxième lecture à l'Assemblée nationale.