Ukraine: "S'il déclenche la guerre, Poutine sait qu'il deviendra un paria"

Par Marie Le Douaran, publié le
Vladimir Poutine veut-il faire la guerre en Ukraine? Ce ne serait pas une bonne stratégie à long terme, selon les éditorialistes.

Vladimir Poutine veut-il faire la guerre en Ukraine? Ce ne serait pas une bonne stratégie à long terme, selon les éditorialistes.

REUTERS/Ina Fassbender

Face à une valse hésitation entre guerre et paix, les éditorialistes occidentaux estiment que Vladimir Poutine assoit son pouvoir à court terme, mais n'emploie pas une bonne stratégie pour l'avenir.

"L'Ukraine vaut-elle une guerre ?" Le Figaro se pose la question ce lundi, alors que les troupes russes sont stationnées en Crimée depuis ce week-end. Deux jours après que les parlementaires russes ont donné carte blanche à Vladimir Poutine pour une intervention en Ukraine, la guerre n'est pas déclarée mais les moindres faits et gestes du président russe sont observés. Poutine lancera-t-il l'offensive pour "défendre les Russes et les russophones d'Ukraine"? 

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La situation a pris une tournure diplomatique dimanche alors que les Occidentaux menacent Moscou de sanctions économiques tout en éssayant d'éviter une escalade. Un numéro d'équilibriste commenté dans la presse ce lundi. Pour La Croix, "l'intense ballet diplomatique international a ressemblé à une démonstration d'impuissance. (...) De l'ONU à l'Otan, en passant par l'Union européenne, il n'y a guère d'action concrète à mettre en oeuvre pour contrer les démonstrations belliqueuses du maître du Kremlin."  

"Poutine est confiant parce que les Européens sont plus intéressés par l'argent que par le fait de l'arrêter" alerte Politico, qui ne croit pas à l'influence occidentale dans ce dossier. Face à un Vladimir Poutine déterminé et calculateur, pourquoi les Occidentaux "iraient-ils affronter l'ours russe au nom d'un pays auquel nul ne peut promettre sérieusement d'entrer un jour dans l'UE ?" interroge à son tour Le Figaro. "Il y a fort à parier que Poutine gardera les mains libres en Ukraine. Sauf débordement de violences, les Occidentaux, toute honte bue, ne feront rien" conclut l'éditorialiste. Poutine serait-il déjà vainqueur? 

Sauver l'honneur

Personne n'est en mesure de dire quelle sera l'issue de cette crise, ni ce que veut réellement le président russe. Mais pour de nombreux éditorialistes, il s'agit avant tout de ne pas perdre la face. "La révolution de Kiev est vue comme une défaite pour Moscou et comme une victoire pour l'Otan, donc la Russie devait agir" résume le Guardian

C'est peut-être une question d'honneur qui pourrait désamorcer le conflit: "Les Etats-Unis et l'Union européenne ont peu de leviers efficaces pour forcer le président Poutine à faire marche arrière" constate le New York Times, "mais ils doivent lui signifier clairement que cela coûte cher pour la réputation internationale et les relations économiques. Moscou pourrait exiger plus d'autonomie pour la Crimée, l'annexer, laisser les Russes de Crimée déclarer leur 'indépendance' ou accentuer les difficultés économiques de l'Ukraine. Mais avec ces actions, M. Poutine sait que son gouvernement deviendra un paria". Une perspective qui peut effrayer quand on sait les ambitions de rayonnement international de la Russie. 

Garder le contrôle

Evidemment, Moscou gagnerait une guerre en Ukraine, note Foreign Policy. L'opinion publique, de plus en plus importante en Russie, y est favorable, souligne The Independent. A court terme, "la pression populaire ne va pas à la retenue, mais à l'action. La position de Poutine reflète un consensus national selon lequel la place naturelle de l'Ukraine, même indépendante, est dans le giron de la Russie et que Moscou ne peut pas rester les bras croisés tandis que l'Occident conspire à lui arracher. 'Qui a perdu l'Ukraine?' est une question qui peut réellement éroder le pouvoir de Poutine." Or, s'il y a bien une chose que Poutine craint, c'est de perdre le pouvoir. Peut-il faire autrement que suivre l'opinion publique? 

Pour Foreign Policy, "le seul espoir de l'Ukraine est que Poutine calcule les coûts et les bénéfices" d'une intervention, et se rende compte que les bénéfices sont moindres. Du côté des Russes, "il y aura peut-être un enthousiasme temporaire à voir le drapeau russe flotter à Donetsk, mais il retombera vite lorsqu'ils se rendront compte que ces régions sont un énorme fardeau économique". La stratégie ne serait donc pas payante. 

Moins impulsif, plus calculateur, le président russe semble temporiser et jauger les réactions occidentales. D'abord très silencieux, il a réussi un coup en plaçant la Crimée au centre de l'échiquier diplomatique en quelques heures. Mais pour le Washington Post, le maître du Kremlin commet une grave erreur pour l'avenir. "L'intervention en Crimée vient d'une erreur de jugement plus profonde sur la réversibilité du processus qui a conduit à l'éclatement de l'Union soviétique en 1991. Plus la Russie pataugera dans cette stratégie de revanche, plus les troubles empireront" écrit l'éditorialiste, pessimiste. 

Tendre la main à l'UE?

"La politique étrangère de Moscou est guidée par le seul but de maintenir son influence sur son 'étranger proche'" explique Le Guardian. C'est exactement cette notion qui est en jeu avec l'Ukraine et plus particulièrement avec la Crimée, en majorité russophone

Mais est-ce une bonne stratégie pour demain? Pas pour le Washington Post: "Ce que Poutine ne comprend pas, c'est que le centre de gravité de l'ex-URSS s'est déplacé vers l'ouest. L'opportunité pour Poutine est à l'exacte opposée de sa vision atavique de la restauration (de l'empire soviétique, ndlr). C'est seulement en se déplaçant vers l'ouest, vers l'Europe, que la Russie peut inverser son piège démographique et politique". Pas sûr que cela fasse partie des plans du maître du Kremlin dans l'immédiat. 

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12 commentaires

Pamina13

Pamina13

Poutine ne veut pas la guerre . Devant une situation qui ne pouvait perdurer pour la Russie, il a pris les mesures qui s'imposaient . Les Etats Unis suivis par leurs toutous occidentaux, ne peuvent pas dicter leur loi à tout le monde .

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Pamina13

Pamina13

Et alors ?@lballoo :

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lballoo

lballoo

Est-il possible d'accepter un tel mensonge ?! - Dmytro Boulatov, ministre - j'ai cru que c'est une blague mais non, il est effectivement ministre !!! Cette individu qui avait prétendu avoir été crucifié est maintenant Ministre de la Jeunesse et des Sports ! Changer des ordures avec des ordures dont certaines n'ont fait que retourner leurs veste ce n'est pas bon. Pour faire un changement il faut tous simplement rendre inéligible ceux qui sont pourris ou supposé pourris sans pour autant leur couper la tête (à la mode 1789 !) Malheureusement c'est souvent ceux qui ont retourné leurs vestes qui ont continué de manipuler le pouvoir !

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AlDu36

AlDu36

Même des mesures de rétorsions économiques sont inenvisageables. Les investissements étrangers en Russie sont trop importants, en particuliers allemands bien sûr, mais aussi français, et les contre-mesures du Kremlin feraient très mal. Il ne faut pas oublier qu'en économie ouverte les activités de chacun sont solidaires de celles des autres. Il suffit que la bourse de Moscou dévisse pour que celles d'Europe se replient, que les cours du gaz et du pétrole fassent un bond, que les monnaies soient déstabilisées. L' UE n'a nul besoin de replonger dans une crise dont elle sort à peine pour raison politique, d'autant que cela rendrait impossible une aide efficace à l'Ukraine. La situation dans ce pays a échappé aux négociateurs, à eux de maîtriser ce qui relève de leur pouvoir, à savoir leur propre attitude. Nous payons aujourd'hui non seulement notre politique facile en matière d'armement conventionnel mais surtout une ouverture des frontières totalement débridée qui nous fait dépendre, notamment, des pressions de Poutine mais, au delà, de son allié chinois. Et c'est bien autre chose...

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jlanglois

jlanglois

@lballoo : " Le monde est un endroit magnifique pour lequel il vaut la peine de se battre. " Du même Hemingway...

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jlanglois

jlanglois

@lballoo : Les petites cellules grises soviétiques, fortes de leur budget, n'ont pas été foutues de gagner leur guerre en Afghanistan, et l'on connait le résultat de leur successeur américain. Les gros budgets ne font pas forcément les vainqueurs...

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lballoo

lballoo

" Beaucoup sont des fascistes qui s'ignorent mais le découvriront le moment venu " Ernest Hemingway, Pour qui sonne le glas

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lballoo

lballoo

Budget militaire mondial (chiffres de 2011) - 1735 milliards des $ dont : - 711 milliards sont dépensés par les États-Unis (41 % du budget mondial), -143 milliards par la Chine - en troisième position la Russie avec 71 milliards - quatrième et cinquième position : Royaume-Uni et France avec 62 milliards ! Qui a encore des petites cellules grises est prié des les utiliser même si le courant est fort !

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TG74000

TG74000

Une chose est sûr après cet événement qui j'espère se résoudra diplomatiquement, c'est que l'Europe ne pourra pas continuer de faire l'impasse sur sa défense et peut être même devra se réarmer.

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le tché

le tché

la russie qui et deuxième exportateur de pétrole et de gaz , et quatrième en or , qui s échange en dollar c est tout bénefe pour poutine . Le rouble qui baisse , c est une exportation d arme russe qui va faire un record de contrat pour 2014 . Un euro qui baisse va faire mal a l' Allemagne , qui voulait le garder en l état , car c est exportation son élever , par contre c est bénéfique pour la France . Si la crise continu jusqu a octobre , ce sera le jackpot pour la russie .

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Schmoko68100

Schmoko68100

No love No life ...

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TG74000

TG74000

Jeux olympiques de Berlin en 1936, crise des Sudète en 1938, Daladier - Chamberlain 1938.... Mais non, l'histoire ne se répète jamais...... de la même manière.

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