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L’écriture comptable des bayles des archevêques de Narbonne, Bernard de Fargues (1311-1341) et Gaubert du Val (1341-1347)

Marie-Laure Jalabert

Résumés

La destruction de la quasi-totalité des sources archiépiscopales narbonnaises rend plus précieux les fragments originaux qui nous sont parvenus. Les fonds des Archives secrètes vaticanes ont préservé près d’un millier et demi de folios consacrés à la gestion pratique de la seigneurie des archevêques de Narbonne entre 1334 et 1347. La quasi-totalité se compose de comptabilités dressées par les bayles, représentants de l’archevêque chargés de la gestion locale d’une portion de la seigneurie. Bien que très lacunaire, chronologiquement et géographiquement, ce corpus permet de dresser un tableau relativement clair de la pratique de l’écrit comptable par l’administration archiépiscopale et de son évolution dans cette portion du Languedoc médiéval. L’étude du support, toujours du papier, et notamment des filigranes, met en évidence une similitude avec les situations italiennes. Si les différents archivages ont pu porter atteinte au format originel, nous privant, par la même occasion de certaines mentions ou notes marginales, les documents sont en bon état général de conservation. La mise en page, le plus souvent soignée, révèle que ce sont des documents techniques et non pas d’apparat. Documents de travail ou exemplaires soumis à l’examen d’auditeurs, ils sont partiellement surchargés d’annotations de mains différentes de celles des scripteurs habituels, ce qui peut les transformer en véritables brouillards.

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Texte intégral

  • 1  En effet, à la suite de l’érection de Toulouse au rang d’archevêché, Jean XXII, en 1318, donne ran (...)
  • 2  La seigneurie des archevêques de Narbonne dépasse du cadre du diocèse : elle s’étend aussi sur le (...)

1Quand on connaît la richesse des archives consulaires de la ville de Narbonne, on imagine aisément ce que pouvait être celle de l’archevêché, alors le troisième de France pour les revenus, bien qu’il ait subi plusieurs démembrements1. Mais la tourmente révolutionnaire d’août 1793 a fait partir en fumée l’ensemble des sources archiépiscopales narbonnaises. Heureusement, les hasards de l’histoire et du travail des archivistes ont permis la conservation, dans les Archives secrètes du Vatican, de fragments originaux de comptabilités que je me propose de vous présenter ici. Ces comptes concernent la seigneurie des archevêques, c’est-à-dire la mense archiépiscopale2. Connue en détail grâce au Livre Vert de Pierre de La Jugie (1347-1375), cette seigneurie est administrée dans le cadre strictement seigneurial des baylies, y compris pour les prélèvements de type ecclésiastique. Chaque bayle est le représentant local direct de l’archevêque. Il gère l’ensemble de ses biens et de ses revenus et en rend compte au travers des écrits qui nous sont parvenus.

Les rescapés d’un naufrage

2En fonction du type de rédacteur ou commanditaire et en fonction de leur finalité, ces sources peuvent être réparties en trois catégories, comme l’indique la figure 1. J’exclus d’emblée de mon présent propos l’inventaire des dépouilles de Bernard de Fargues (1311-1341) et les quelques notes de l’inventaire après décès des châteaux de Gaubert du Val (1341-1347), car ces documents sont spécifiques puisqu’ils relèvent d’une initiative pontificale. Les autres fragments sont des écrits à proprement parler comptables. Trois émanent de l’administration archiépiscopale centrale : il s’agit de deux versions d’un compte du trésorier de Bernard de Fargues (1339-1341, Guillaume Boursier) et d’un très bref extrait d’un compte du dernier chancelier de Gaubert du Val (1346, Raymond Contastini). Les autres documents ont été rédigés, directement ou pas, par des bayles. Il s’agit de deux journaux des dépenses ordinaires de la maison archiépiscopale de Narbonne et surtout de douze fragments de comptabilités, sur lesquels j’ai centré mon exposé.

Fig. 1 : Typologie des sources conservées au Vatican.

Émanation de

Références

Lieu/type

Rédacteur

Couverture chronologique

Autorité pontificale

Coll. 148, f° 47-149

Dépouilles de Bernard de Fargues

Morerius de Moreriis

1341-1347

Coll. 152, f° 1-8

Inventaire après décès, Gaubert du Val

Johanes Regis (Jean Rey)

15 janvier 1347

Administration archiépiscopale centrale

I.E. 244, f° 91-101

Comptes du chancelier

Raymond Contastini

24 juin 1346 – 4 janvier 1347

Coll. 146, f° 185-229

Comptes du trésorier

Guillaume Boursier

20 octobre 1339-décembre 1340

I.E. 180, f° 149-180

Comptes du trésorier

Guillaume Boursier

Toussaint 1339 - 11 avril 1341

Bayles

I.E. 106A, f° 1-91

Alaigne

Guillaume Boursier

1er juin 1337- Noël 1338

I.E. 172, f° 1-104

Alaigne

Guillaume Boursier

Noël 1338 - 1er mai 1339

I.E. 181, f° 1- 94

Alaigne

Guillaume Boursier

1er mai 1339 – Noël- 24 juin 1340

Coll. 146, f° 72-184

Alaigne

Guillaume Boursier

1er mai 1339 – Noël- 24 juin 1340

I.E. 244, f° 3- 91

Alaigne

Guillaume Rollandi

mars 1346 - septembre 1346

Reg. Av. 122, f° 489-551

Canet-d’Aude

Aymeric Solas

de Noël 1334 au suivant

I.E. 249, f° 65- 109

Canet-d’Aude

Raymond Capioni

1er mars 1346 - 10 janvier 1347 - 20 mai

I.E. 249, f° 1- 64

Montels

Gasbert Jordani

du 1er juin 1346 - 20 mai 1347

I.E. 244, f° 102- 251

Narbonne

Barthélemy de Piru

mars 1346 –janvier 1347

Coll. 152, f° 64-128

Narbonne

Barthélemy de Piru

1er janvier 1347 – 20 mai 1347

Coll. 146, f° 1-52

Coll. 152, f° 136 -171

Journal des dépenses ordinaires

Barthélemy de Piru

mars 1346 –janvier 1347

Barthélemy de Piru

1er janvier – 19 mai 1347

Coll. 148, f° 150-220

Quillan

Bernard de Canceiolo

24 juin 1346 – 1er janvier 1347-20 mai 1347

Coll. 152, f° 17-49

Sigean

Pons Bodelli

juillet – décembre 1346

La répartition chronologique des extraits

3Les comptes se répartissent sur trois moments plus ou moins brefs, entre 1334 et mai 1347. Je les présente ici dans l’ordre décroissant d’abondance. L’écrasante majorité concerne l’archiépiscopat de Gaubert du Val (1341-1347) : neuf comptes dont les journaux. La personnalité de cet archevêque et surtout sa fonction de Camérier, de 1319 à son décès, ne sont sans doute pas étrangères à cette « concentration ». Sans doute contrôlait-il la gestion de son diocèse depuis la Curie où il était retenu. Mais, s’il s’est fait envoyer les comptabilités à Avignon, le reste n’a pas été conservé. La trentaine d’années de l’archiépiscopat de Bernard de Fargues (1311-1341) est proportionnellement moins représentée : six comptes pour sept extraits. Cinq manuscrits consignent des données postérieures à la nomination de Pierre de La Jugie mais il ne s’agit que des quatre premiers mois (du 10 janvier au 20 mai).

  • 3  Le 1er mai 1341
  • 4  Le 1er janvier 1347.

4À l’exception du compte de la baylie de Canet-d’Aude de 1334, daté du beau milieu de l’archiépiscopat de Bernard de Fargues, tous les autres correspondent aux changements de titulaire : les années 1340-41 pour le décès de Bernard de Fargues3 et les années 1346-1347 pour celui de Gaubert du Val4. Toutefois, aucune des comptabilités de la première vague n’inclut la vacance ni le début de l’archiépiscopat suivant, alors que celles de 1346 se prolongent, incluant la vacance de dix jours en janvier 1347 et les premiers mois après la nomination de Pierre de La Jugie. Cette chronologie ciblée est sans doute la traduction d’une volonté de la Chambre Apostolique de récupérer la documentation comptable dans le cadre du prélèvement des dépouilles. Les archives pontificales ont pu entrer en possession des documents narbonnais par ce biais.

5À cause de ces importantes lacunes chronologiques, on ne saurait parler de « séries ». Les extraits sont ponctuels, isolés, mais quelques-uns sont pourtant consécutifs. Trois d’entre eux contiennent deux exercices, toujours inférieurs à une année. L’un, à la fin de l’archiépiscopat de Bernard de Fargues, concerne la baylie d’Alaigne, du 1er mai 1339 à Noël puis de cette fête au 24 juin 1340, et les deux autres, à cheval entre Gaubert du Val et Pierre de La Jugie, portent sur la baylie de Canet-d’Aude du 1er mars 1346 au 10 janvier 1347 et ensuite jusqu’au 20 mai, ainsi que sur celle de Quillan du 24 juin 1346 au 1er janvier 1347 puis au 20 mai aussi.

6Plus remarquable, pour Alaigne, deux extraits différents s’enchaînent : le premier de Noël 1338 au 1er mai 1339 précédant celui que je viens de citer. L’ensemble forme une suite de dix-huit mois consécutifs.

La répartition géographique des extraits

  • 5  Si l’on se réfère à ce qu’indique le Livre Vert de Pierre de La Jugie ; mais dans les comptes, le (...)

7Aux lacunes chronologiques se superposent des manques géographiques. La figure 2 met en lumière une double disparité dans cette répartition des extraits de compte. Les douze fragments ne portent que sur six des neuf5 baylies de la seigneurie. Aucun compte n’a été conservé pour les baylies de Capestang, de Villerouge-Termenès et de Pia, donc indépendamment de l’appartenance au diocèse de Narbonne.

Fig. 2 : Carte de distribution des comptabilités conservées.

Fig. 2 : Carte de distribution des comptabilités conservées.
  • 6  Il tient la tête du palmarès des rédacteurs avec sept manuscrits.
  • 7  Collectorie146, f°185. Anno domini 1339, 9 die mensis octobris, Ego Guillelmus Burserii fui factus (...)
  • 8  Une lettre de Clément VI datée d’Avignon le 9 juin 1343 mentionne que Guillaume Boursier a été inc (...)

8Deux baylies sont surreprésentées dans le corpus : Narbonne et Alaigne. Cela semble logique pour Narbonne puisqu’elle est à la fois le siège d’une baylie et de l’administration archiépiscopale centrale. La production écrite était d’autant plus importante. L’explication pour le Bas-Razès est moins évidente. Elle peut venir du bayle en titre à la fin des années 1330. Courant 1337, Guillaume Boursier6 prend en charge la gestion d’Alaigne laissée en déshérence par le bayle Pierre de Nucibus. Le 9 octobre 13397, il est nommé trésorier de la maison archiépiscopale. Il cumule les deux fonctions et les productions comptables écrites. Si son prédécesseur a été convaincu d’incurie, lui sera accusé de malversations. La conservation de ses registres peut s’expliquer aussi par la volonté de faire la clarté sur ses détournements8.

9Donc, en dépit de l’importance du nombre de folios (presque 1 150 pour les seuls comptes des bayles), « fragments » est le seul terme qui convient pour qualifier les documents comptables narbonnais, noyés dans les épais registres composites des archives du Vatican. Il s’agit pourtant là de sources d’une richesse incroyable, tant dans le fond que dans leur forme, qui permettent de mieux cerner l’écriture de la gestion seigneuriale des archevêques de Narbonne, dans le deuxième quart du XIVe siècle.

Des fragments au milieu des registres pontificaux

  • 9  Avec les Obligationes (reconnaissances de dette) et Solutiones (quittances) et Diversa Cameralia. (...)
  • 10  Les documents narbonnais ne sont pas les seuls « étrangers » des collections pontificales. Valérie (...)

10Les documents narbonnais ont été insérés dans trois des collections d’archives pontificales. Seul le plus ancien, concernant la baylie de Canet-d’Aude en 1334, figure dans les Registres d’Avignon où étaient recopiées les pièces que l’administration pontificale voulait avoir à disposition. Les autres se répartissent dans les Collectories et dans les Introitus et Exitus, deux des quatre collections d’archives de la Chambre Apostolique9 selon une répartition qui semble obscure. Comme d’autres, ils n’ont pourtant pas lieu d’y être10. En effet, il ne s’agit ni de registres de perception des revenus et des dépenses arrivant de chacune des Collectoreries de la Chrétienté, ni de livres des recettes et des dépenses de la Chambre. Seuls le relevé des dépouilles de Bernard de Fargues (Collectorie 148, folios 47-149) dressé par Morerius de Moreriis et l’inventaire après décès des biens de Gaubert du Val par Jean Rey (Johanis Regis, Collectorie 152, folios 1-8) intéressent directement la Curie avignonnaise. Mais comme ces archives comptables narbonnaises présentent des similitudes de forme avec les documents de ces collections (documents comptables, composés chronologiquement ou déjà organisés en chapitres), elles ont été classées avec. La collation s’est faite dans une logique à la fois géographique, par province ecclésiastique, et chronologique, notamment dans les Collectories. Mais cette règle connaît maintes entorses, comme le montre la figure 3. Un exemple : le volume 146 des Collectories fait se succéder un extrait de 1346 sur Narbonne, puis un sur Alaigne et un autre sur Narbonne qui sont datés de 1339-1340.

Fig. 3 : Classement des sources concernant la seigneurie des archevêques de Narbonne par volume de conservation.

Références

Lieux

Type et période

Coll.146

f° 1-52

Narbonne

dépenses ordinaires du palais, mars à septembre 1346

f° 72-184

Alaigne

recettes et dépenses de la baylie, 1er mai 39 – Noël - 24 juin 1340

f° 185-229

Narbonne

recettes et dépenses du trésor, 20 octobre 1339 - décembre 1340

Coll.148

f° 47-149

Dépouilles de Bernard de Fargues, 1341-1347

f° 150-220

Quillan

recettes et dépenses de la baylie du 24 juin 1346 inclus au 1er janvier 1347

Coll.152

f° 1-8

Inventaire après le décès de Gaubert du Val, 15 janvier 1347

f° 17 - 49

Sigean

recettes et dépenses de la baylie, juillet à décembre 1346

f° 64 - 128

Narbonne

recettes et dépenses de la baylie, 1er janvier 1347 – 20 mai 1347

f° 136 -171

Narbonne

dépenses ordinaires, 1er janvier – 19 mai 1347

I.E. 106A

f° 1-91

Alaigne

recettes et dépenses de la baylie, fin 1337- Noël 1338 (a.s.)

I.E. 172

f° 1-104

Alaigne

recettes et dépenses de la baylie, 1338 puis Noël 1338 au 1er (mai) 1339

I.E. 180

f° 149- 180

Narbonne

recettes et dépenses du trésor, 1339-1340

I.E. 181

f° 1-94

Alaigne

recettes et dépenses de la baylie, 1er mai 1339 – Noël – 24 juin 1340

I.E. 244

f° 3- 90

Alaigne

recettes et dépenses de la baylie, 1er juin 1346 - 1er juin 1347

f° 91 - 101

chancelier

comptes du chancelier Contastini

f° 102- 251

Narbonne

recettes et dépenses de la baylie, 24 juin 1346 - 3 janvier 1347

I.E. 249

f° 1- 64

Montels

recettes et dépenses de la baylie, 1er juin 1346 – 10 janvier 1347 – 20 mai

f° 65-109

Canet-d’Aude

recettes et dépenses de la baylie, 1er mars 1346 – 10 janvier 1347 – 20 mai

Reg. Av. 122

f° 489-551

Canet-d’Aude

recettes et dépenses de la baylie de Noël 1334 au suivant

  • 11  Olivier Poncet, Les entreprises éditoriales liées aux archives du Saint-Siège. Histoire et bibliog (...)

11Bien que les reliures modernes donnent une improbable cohérence d’ensemble, l’hétérogénéité de ces compilations d’archives de provenances diverses est éminemment visible dans le « physique » des volumes, souvent difficiles à manier en raison des différences de taille et d’état des documents qui les composent11.

La matérialité des comptes

Un support unique à multiples facettes : papiers, filigranes et cahiers

  • 12  Toute la première partie du volume 148 des Collectories, sur le procès de Bernard Turtis, est rong (...)
  • 13  Celle de l’Introitus et Exitus 180 f°149 à 180, apparaît sur les cinq premiers folios puis s’estom (...)

12Les documents narbonnais sont, en général, en bon état de conservation, alors que certains autres éléments du même volume peuvent être très abîmés12. Où qu’ils aient été conservés avant le dernier travail de collation et de reliure, nos comptes l’ont été dans des conditions satisfaisantes. Les tâches d’humidité ou de moisissure sont rares. Elles ne sont gênantes que dans deux documents13. En revanche, un trou qui s’évase dans l’épaisseur du second journal nous prive d’un nombre croissant d’informations au fur et à mesure de la lecture.

Le papier

  • 14  L’encre a d’ailleurs eu tendance à baver et quelques traces anciennes d’humidité sont visibles. In (...)

13Le support sur lequel ces documents sont rédigés est toujours du papier. Les textures et les couleurs diffèrent selon les documents, mais ces papiers sont tous relativement épais et rigides, similaires à ceux importés d’Italie. Une exception, cependant : celui du deuxième cahier du compte de Barthélemy de Piru, pour Narbonne, est plus souple, proche du buvard14.

  • 15  Charles-Moïse Briquet, Les filigranes, New York, 1977, p. 8 : il y en a habituellement sept à dix (...)

14La vergeure, alternance de lignes horizontales claires et foncées en transparence sur le papier, est large, assez marquée et relativement homogène d’un compte à l’autre. Elle est plus large dans le troisième compte de Guillaume Boursier pour la baylie d’Alaigne (1339-1340, Collectorie146, folios 72-184) et dans celui de Raymond Capioni pour Canet-d’Aude (1346-1347, Introitus et Exitus 249, folios 65-109). Seul se démarque par l’alternance de vergeures larges et fines, le papier du Registre d’Avignon 122, cas particulier, puisque le support n’est pas « narbonnais ». Les lignes de vergeure sont coupées perpendiculairement par la trace des chaînettes, généralement bien visibles, dont l’espacement varie, pour l’ensemble du corpus, de 43 à 50 mm. Ces relevés correspondent, notamment à ce que Ch.-M. Briquet constate pour un papier de format ordinaire (32 sur 45 cm environ) au XIIIe siècle et dans la première moitié du XIVe15, probablement d’origine italienne.

Les filigranes

15Plus remarquable encore que les vergeures et les empreintes des chaînettes, le filigrane. Il est l’empreinte d’un motif métallique fixé sur la forme qui sert à la fabrication de chaque feuille. Il s’imprime en négatif sur la couche de pâte encore gorgée d’eau et sert de signature matérielle de l’atelier. Ce marqueur est assez peu déchiffrable pour nous, car nous ne connaissons pas la date de mise en usage de chaque filigrane, ni quels ateliers les ont utilisés et selon quelle chronologie. Il est aussi impossible d’évaluer le temps qui s’est écoulé entre le jour où la feuille a été fabriquée et celui où elle a été écrite. Toutefois, l’étude des filigranes donne une idée de la façon dont les scripteurs préparaient leurs supports d’écriture. Dans un même registre, voire dans chacun des cahiers le composant, tous les bifeuillets peuvent ne pas porter un filigrane identique. C’est le signe que les feuilles étaient utilisées au fur et à mesure des besoins, sans tenir compte de leur provenance. Il s’agit d’une « matière première » relativement coûteuse qu’il ne faut pas gaspiller.

16L’ensemble des pages du corpus révèle une quinzaine de figures différentes. Certaines ne sont pas toujours identifiables à première vue. Le type présent dans le plus grand nombre de comptes se compose de deux cercles reliés par une croix (de 100 à 105 mm de haut, diamètre invariable de 30 mm, Fig. 1). Bien que C.-M. Briquet signale de multiples nuances, ils sont ici très similaires. Le seul écart constaté se trouve au folio 81 de l’Introitus et Exitus 181 : il ne doit pas être délibéré, mais plutôt le résultat d’un accident survenu à la forme métallique.

Fig. 4 : Filigrane 01.

Fig. 4 : Filigrane 01.

17Viennent ensuite à égalité les cloches et les arbalètes dans quatre comptes chacune. Les représentations des cloches (Fig. 5) sont nombreuses, leur taille toujours proche de 50 mm de haut sur 30 mm dans la plus grande largeur. Les arbalètes (Fig. 6) présentent de légères différences : tige pommée et étrier en forme de cœur ou tige lisse et étrier classique.

Fig. 5 : Filigrane 02.

Fig. 5 : Filigrane 02.

Fig. 6 : Filigrane 03.

Fig. 6 : Filigrane 03.

18Les pinces ou tenailles (Fig. 7) ainsi que les fioles (Fig. 8) sont présentes chacune dans deux comptes. Les tenailles répertoriées par les ouvrages de Briquet et Mosin-Traljic sont typiquement italiennes et ne correspondent pas tout à fait à celles des comptes qui ont une tête arrondie et des manches peu espacés. Il en va de même pour les fioles, dont la suspension est plus ou moins longue.

Fig. 7 : Filigrane 04.

Fig. 7 : Filigrane 04.

Fig. 8 : Filigrane 05.

Fig. 8 : Filigrane 05.
  • 16  Charles-Moïse Briquet rappelle que Zonghi a cru voir dans cette forme un miroir, ici la confusion (...)
  • 17  Collectorie 148, f°150-221
  • 18  Selon Charles-Moïse Briquet, ce filigrane est extrêmement abondant et, si tous les papiers qui le (...)

19Chacune des onze autres formes n’est présente que dans un seul compte. Les folios du Registre d’Avignon 122 sont marqués d’un d’élégant flacon (Fig. 9)16 à haut col et cabochon, totalement inconnu des deux répertoires. Le compte de Quillan17 présente (outre les deux cercles) la lettre « S » (Fig. 10), pommée sur tige également pommée (70 mm de haut sur 50 mm de large) des folios 183 à 203 et, sur quatre folios, une belle représentation d’ange ailé (Fig. 11), marchant, couronné, tenant une crosse et non pas une croix comme sur les modèles de référence. Une forme de fruits sur tige (Fig. 12), poires ou figues, entourés de deux feuilles18 jalonne le premier compte de B. de Piru pour Narbonne (folios 64 à 128 de la Collectorie152). La fin du compte de Montels (folios 51 à 64 de l’Introitus et Exitus 249) présente un très beau peson (Fig. 13) de 70 mm sur 30 mm de large et celui de Canet-d’Aude un superbe bœuf, très détaillé dont aucun exemplaire approchant ne figure dans les deux répertoires. Pour Narbonne et Alaigne, on trouve aussi un saucisson ou balle de tissu (Fig. 14) (50 mm de haut), un étendard (Fig. 15) (90 mm sur 45 mm dans la plus grande largeur) qui n’offre que deux exemples, ainsi que des figures animales dont aucune n’est répertoriée : une tête de licorne (Fig. 16)orne les folios du début du compte ; les folios 92 et 101 (seulement) portent un animal cornu bondissant de grande taille (Fig. 17), un bouc ou un bouquetin de 80 mm sur 70 mm dans les plus grandes dimensions. La dernière forme est très alambiquée, de dimensions différentes d’un folio à l’autre, étroite ou plus trapue, elle pourrait représenter un « R » ou un « P ».

Fig. 9 : Filigrane 06.

Fig. 9 : Filigrane 06.

Fig. 10 : Filigrane 07.

Fig. 10 : Filigrane 07.

Fig. 11 : Filigrane 08.

Fig. 11 : Filigrane 08.

Fig. 12 : Filigrane 09.

Fig. 12 : Filigrane 09.

Fig. 13 : Filigrane 10.

Fig. 13 : Filigrane 10.

Fig. 14 : Filigrane 11.

Fig. 14 : Filigrane 11.

Fig. 15 : Filigrane 12.

Fig. 15 : Filigrane 12.

Fig. 16 : Filigrane 13.

Fig. 16 : Filigrane 13.

Fig. 17 : Filigrane 14.

Fig. 17 : Filigrane 14.

20Si l’on considère maintenant ces données sous le double angle chronologique et géographique, plusieurs remarques s’imposent. Certains filigranes se retrouvent dans des comptes de façon diachronique et pour plusieurs baylies, comme le souligne la figure 18.

Fig. 18 : Répartition chrono-géographique des filigranes.

Type de filigrane

1337-1341

1346-1347

Cercles reliés

Comptes du Trésor, 1340, Coll. 146, fol. 185-229 ;

Dépouilles, 1341, Coll. 148, fol. 47-149 ; Alaigne, 1339-40, I.E. 181, fol. 1-94.

Quillan, 1346, Coll. 148, fol. 150-221

Cloches

Alaigne, 1339-40, Coll. 146, fol. 71-184, Alaigne, 1339-40, I.E. 181, fol. 1-94, Dépouilles, 1341, Coll. 148, fol. 47-149

J. Rey, 1346 Coll. 152, fol. 1-8

Arbalètes

Alaigne, 1339-40, I.E. 181, fol. 1-94

Journal de B. de Piru, 1346, Coll. 146, fol. 1-52 ;

Sigean, 1346, Coll. 152, fol. 17-49 ; Journal de B. de Piru, 1346, Coll. 146, fol. 1 à 52 ;

Narbonne, B. de Piru, 1346, I.E. 244, fol.102 sq

Pinces

Comptes du Trésor, 1340, I.E. 180

Montels, 1346, I.E. 249, fol.1-64

Fioles

Alaigne, 1339-40, Coll. 146, fol. 71-184 ; Alaigne, 1339-40, I.E. 172

  • 19  Dans des comptes de Quillan, la marque des deux cercles reliés par une croix domine, mais deux aut (...)
  • 20  Archives municipales de Narbonne, CC 2352, 1352 pour le premier registre conservé.

21Que des ateliers de fabrication de papier perdurent ne pose guère de problème. La répartition géographique soulève en revanche des questions sur l’approvisionnement en papier, tout autant que sur les lieux et les dates de rédactions de ces exemplaires, car il est bien délicat de décider si ce sont là des documents rédigés dans chaque baylie et apportés à Narbonne, ou bien des transcriptions narbonnaises de documents provenant des baylies. Les rubriques d’achats de papier sont rares dans ces comptes et la provenance n’est qu’exceptionnellement indiquée : seul le bayle B. de Piru nomme un marchand de Narbonne (Collectorie 152, folios 117) en 1347.Les mentions éparses soulignent toutefois l’importante consommation qui en est faite et semble indiquer qu’on commande au fur et à mesure mais la présence de filigranes différents dans les mêmes cahiers19 montre que les scribes ont la possibilité de puiser dans des stocks fournis et diversifiés. L’administration archiépiscopale, centrale ou locale, n’avait en tout cas pas de fournisseur de papier spécifique ni exclusif. Les registres des clavaires20 de la ville de Narbonne présentent, par exemple, le même filigrane en forme de fruits (Fig. 19).

Fig. 19 : Registres des clavaires.

Fig. 19 : Registres des clavaires.

Les cahiers

22Chaque document comptable se compose de plusieurs cahiers et la plupart sont encore assez facilement repérables. Tous les comptes n’ont pas le même nombre de cahiers et tous les cahiers n’ont pas le même nombre de bifeuillets (en général de 10 à 14). On peut aussi constater un écart du nombre de feuillets avant et après couture mais sans conséquence pour la compréhension : des feuillets restés vierges au moment de la rédaction ont été probablement découpés. À l’inverse, les folios de la fin du compte de Sigean (49 v° à 62) sont restés, bien que blancs, au-delà de la conclusion datée du 17 janvier 1347.

  • 21  Collectorie 146, f°185 à 229. Cette partie fait défaut au doublon Introitus et Exitus 180, f°149 à (...)
  • 22  Guillaume Boursiern’annonce que les recettes venant des bayles, du chancelier et autres, alors que (...)

23Tous les comptes sont reliés mais certains seulement sont protégés par une couverture en parchemin, probablement dès le XIVe siècle mais postérieurement sans doute àla rédaction. La couverture en parchemin du compte du trésor21 porte un titre plus long et plus détaillé que l’introduction figurant en haut du premier folio22 : c’est un rajout postérieur à la rédaction qui date de 1340 car y figure la mention du décès de Bernard de Fargues par l’expression « bone memorie ». La reliure de ce compte, rendu à la Chambre apostolique, semble bien avoir été réalisée par l’administration centrale.

  • 23  Ce qui explique l’incohérence de plusieurs rubriques du double exemplaire du compte d’Alaigne (Col (...)
  • 24  Collectorie 148, f°150-220, 1346
  • 25  330 sur 225 mm pour le Registre d’Avignon.

24Différents archivages ont pu entraîner aussi des atteintes à l’intégrité des folios originaux. La couture interne de certains cahiers a été tranchée et les folios volants n’ont pas toujours été reliés dans un ordre satisfaisant23. Pour donner une relative harmonie aux volumes des collections actuelles (folios de 280 sur 210 mm), le rognage ou recadrage des bords externes a fait perdre toutes ou partie des indications marginales des folios. Cela perturbe aussi les relevés de mesures en modifiant la taille de la feuille, comprise entre 280 sur 200 mm24et 295 sur 225 mm25.

25En revanche, il y a eu respect au moins de certaines farcissures originales, peu nombreuses : des insertions de justificatifs, obligations, assignations, quittances qui parsèment certains des registres. En effet, comme le but principal de ces comptes était le contrôle de la gestion des bayles, chaque opération comptable, et surtout les dépenses, devait s’appuyer sur un document écrit. Certains ont été insérés et reliés, sont parvenus jusqu’à nous.

26Le compte d’Alaigne contenu dans la Collectorie 146 offre deux autres types de documents rajoutés lors de la reliure. Le premier est un « outil de travail » formé de deux petits billets oblongs collés l’un en dessous de l’autre (folio 82) : un calendrier de paiement des différents revenus dus à l’archevêque et un tableau de correspondances du codage littéral permettant de repérer le mois de chaque opération comptable. Le second est un petit cahier in-quarto (220 sur 155 mm), totalement différent du reste de la structure, bien que folioté en continu de 103 à 112. Cousu dans le sens de la lecture et déséquilibrant ainsi un peu l’ensemble, ilindique, d’une main hâtive, des opérations omises dans le compte de 1339.

Mises en page, encres, écritures

La mise en page

27La présence d’un folio blanc entre les différentes parties (recettes, dépenses, bilans) n’est pas systématique ; entre les différents chapitres non plus. De nombreux feuillets sont anopistographes, mais d’une manière générale, les blancs ne sont pas un élément structurant de la présentation.

28La première page de ces comptes ne manifeste aucune ostentation. Ce sont des documents techniques et non pas d’apparat. La page de garde du premier compte d’Alaigne débute par une initiale monochrome ornée qui ne peut cependant pas être qualifiée de lettrine. Il semble aussi que le scribe se soit fait plaisir en commençant le « Sequitur » de quelques titres par une lettre serpentiforme, impossible à réaliser sous la dictée.

29La plupart des chapitres débutent en haut d’un folio, indifféremment recto ou verso. Certaines rubriques sont si courtes, que plusieurs figurent sur la même page, mais le titre de chapitres plus longs peuvent aussi se trouver en milieu de page. Les titres sont souvent centrés et encadrés, en général, très sobres, d’une écriture qui ne diffère pas de celle du corps de texte, pas même en taille de caractère.

30La lisibilité est facilitée par l’organisation du texte. La justification est bien respectée. Il s’agit souvent d’un dispositif en trois colonnes dont la largeur varie avec la rubrique et parfois le folio. La réglure verticale se fait par pliage ou par pointe sèche. Le corps des items est aligné dans la partie centrale du folio. Certains sont précédés d’un pied-de-mouche dans la marge de gauche, signe décoratif en forme de « ¶ » qui indique un retour à la ligne. Primo en début de paragraphe, Item pour les alinéas suivants peuvent être accentués. Chiffres et unités sont rejetés dans la marge droite. Des accents ou des jambages identifient les bâtons des unités. L’alignement des chiffres romains en colonnes individuelles est général, mais certaines sommes du compte de Quillan placent les sous et les deniers les uns en dessous des autres, rendant la lecture et plus encore l’addition, moins évidentes. En revanche, les unités, toujours abrégées, respectent un ordre cohérent et décroissant. Les unités monétaires utilisées sont la livre, le sou, le denier, l’obole ; les unités de volumes sont déclinées : muid, setier, émine, quartière, migère et pugnière, pour les grains et muid, charge, barral et quarton pour le vin. Les items longs de plusieurs lignes sont ramassés du côté droit par une accolade simple ou plus ondulée et un bout-de-ligne conduit l’œil à la colonne chiffrée pour faciliter la lecture. Les marges de pli ont été utilisées pour les annotations, sans doute postérieures, mais dont les auteurs restent inconnus.

Les encres et les mains

31Les encres utilisées vont du noir au bistre (Reg. Av. 122, folios 489-551, Introitus et Exitus 181, folios 1 à 94, Introitus et Exitus 180, folios 149 à 180, Introitus et Exitus 244, folios 1-252). Les folios 88 et 89 de la Collectorie 146 ont une encre presque jaune et l’encre est plutôt grise pour la Collectorie 146, folios 185-229. La recharge de la plume est bien identifiée chez certains scripteurs et des différences de couleur permettent de percevoir des corrections minimes.

32Les écritures sont presque toujours très lisibles, relativement fluides et appliquées, mais sans excès. Certaines pages sont mêmes élégantes. Les graphies sont proches, d’un compte à l’autre alors qu’il y a forcément des scripteurs différents en fonction des baylies et, peut-être, des époques. Au sein d’un même compte, les écarts ne permettent pas toujours de trancher entre l’intervention d’une nouvelle main et un changement de rythme ou de condition de travail.

33L’absence ou la discrétion des ratures et des surcharges donne aux documents une impression de clarté autant que la graphie. Certaines corrections sont des hésitations, des repentirs du scribe. Elles révèlent qu’il a recopié un document et que son attention a été prise en défaut ou que la graphie du document recopié n’était pas claire. En revanche, certains passages sont de véritables brouillards surchargés de corrections, de commentaires d’une autre main souvent hâtive et peu soigneuse. Les ratures apparaissent sous forme de traits ou d’une ample ondulation. Certaines parties du texte sont cancellées de traits entrecroisés, parfois presque rageurs. Les rectifications concernent très peu les chiffres ; ce sont plutôt des ajouts pour rendre plus précis l’item ou remplacer un nominatif fautif par un datif, lors d’attributions en argent ou en nature. Il est difficile de déterminer les annotations qui sont dues à la propre relecture du rédacteur, de celles faites par un vérificateur ou les auditeurs du compte.

34Au-delà de la diversité dans les détails, des lignes de convergence sur l’apparence de ces comptes se dégagent. Par leur mise en page en colonnes, l’alignement des unités, l’ensemble de ces documents offre des traits de modernité incontestable. Certes, la gestion de la présentation n’est pas impeccable, mais les efforts de clarté sont patents.

Conclusion

35L’étude n’a révélé ni disparité ni évolution de la matérialité de ces comptabilités.

  • 26  Un seul des registres possède un sommaire des chapitres, l’Introitus et Exitus 172. Or, d’après Ch (...)
  • 27  Introitus et Exitus 172, f°84 : Sequitur aliud compotum a festo natalis domini anno a nativitate c (...)

36Pourtant, ces documents soulèvent un certain nombre de questions au sujet de leur réalisation même. Ils ne paraissent pas être des exemplaires aboutis. Il est très curieux de constater, dans un même document, voire dans un même cahier, la juxtaposition de chapitres plutôt élégants et de véritables brouillons. Il s’agit donc de documents de travail26, peut-être à des stades d’élaboration intermédiaires. Ces comptes ont tous fait l’objet d’une relecture et d’annotations ou de corrections. G. Boursier utilise même un codage pour pointer les opérations en fonction des mois. Mais pourtant, des rubriques sont absentes. L’hypothèse de disparitions n’est pas toujours recevable. L’explication est ailleurs. Les incipit indiquent que des comptes ont été auditionnés. Mais, la procédure n’avait peut-être pas la rigueur qu’on serait en droit d’attendre aujourd’hui. En effet, Guillaume Boursier précise pour 1339, qu’il manque un certain nombre de données sur les carnelages, arrentements et procurations27. On peut donc hésiter sur le statut de ces comptes : outils de travail ou travail en cours.

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Notes

1  En effet, à la suite de l’érection de Toulouse au rang d’archevêché, Jean XXII, en 1318, donne rang d’évêché aux abbayes d’Alet et de Saint-Pons-de-Thomières. Pour créer ces deux diocèses, il enlève à celui de Narbonne des territoires au sud-ouest pour le premier et au nord pour le second. Ces créations permettent de maintenir à dix le nombre des suffragants narbonnais.

2  La seigneurie des archevêques de Narbonne dépasse du cadre du diocèse : elle s’étend aussi sur le récent diocèse d’Alet et sur la frange septentrionale du diocèse d’Elne, qui forment respectivement la baylie de Quillan et celle de Pia.

3  Le 1er mai 1341

4  Le 1er janvier 1347.

5  Si l’on se réfère à ce qu’indique le Livre Vert de Pierre de La Jugie ; mais dans les comptes, le Minervois est aussi qualifié de « baylie » bien qu’il soit géré globalement par le bayle de Canet-d’Aude.

6  Il tient la tête du palmarès des rédacteurs avec sept manuscrits.

7  Collectorie146, f°185. Anno domini 1339, 9 die mensis octobris, Ego Guillelmus Burserii fui factus thesaurarius reverendis patris in christo domini B. divina miseratione sancte Narbonensis ecclesia archiepiscopi et recepi a baiulis et cancellariis dicti domini et aliis diversis personis prout subsequitur.

8  Une lettre de Clément VI datée d’Avignon le 9 juin 1343 mentionne que Guillaume Boursier a été incarcéré à la Cour romaine pour avoir « malhonnêtement administré » les biens de Bernard de Fargues en tant que trésorier. Il est alors libéré parce qu’il a fourni des cautions suffisantes et s’est obligé sur ses biens à rembourser. Georges Daumet, Clementis Papae VI (1342-1352), Epistolae patentes, clausae et de Curia quae ad Franciam pertinent, n°216, p.66. Ces vols ont dû être découverts au moment de l’examen des comptes de Bernard de Fargues lors de la procédure des dépouilles. Les sources ne permettent pas de les dater ni de savoir s’ils portent sur la trésorerie ou l’administration de la baylie.

9  Avec les Obligationes (reconnaissances de dette) et Solutiones (quittances) et Diversa Cameralia.

10  Les documents narbonnais ne sont pas les seuls « étrangers » des collections pontificales. Valérie Theis signale que ceux concernant le Comtat-Venaissin sont surtout présents dans les Collectories et à un moindre degré dans les Introitus et Exitus ainsi que dans les Registra Avenionensia. (Le gouvernement pontifical du Comtat-Venaissin (vers 1207- vers 1350), thèse de doctorat, sous la direction de Jacques Chiffoleau, Lyon 2, 2005, p.84)

11  Olivier Poncet, Les entreprises éditoriales liées aux archives du Saint-Siège. Histoire et bibliographie (1880-2000), Rome, 2003, consacre une partie de sa bibliographie raisonnée à l’archivistique pontificale p. 136-148.

12  Toute la première partie du volume 148 des Collectories, sur le procès de Bernard Turtis, est rongée par les vers alors que le compte Quillan qui lui fait suite est indemne.

13  Celle de l’Introitus et Exitus 180 f°149 à 180, apparaît sur les cinq premiers folios puis s’estompe. L’autre est en haut des pages du compte de la baylie de Canet-d’Aude à partir du f°65 de l’ Introitus et Exitus 249.

14  L’encre a d’ailleurs eu tendance à baver et quelques traces anciennes d’humidité sont visibles. Introitus et Exitus 244, f°91 à 251, baylie de Narbonne, juin 1346 à janvier 1347.

15  Charles-Moïse Briquet, Les filigranes, New York, 1977, p. 8 : il y en a habituellement sept à dix (espacés de 45 à 60 mm). De dix à quatorze, dans la seconde moitié du XIVe siècle, espacés de 28 mm à 40 mm. Ce monumental répertoire se réfère (4 volumes, 836 p) à très peu de documents languedociens. De même pour Vladimir Mosin, Seil M. Traljic, Filigranes des XIIe et XIVe siècles, Zagreb, 1957, 2 volumes, 854 p. Plus facilement accessible, la base de données en ligne : http://piccard-online.de ; http://bernstein.oeaw.ac.at

16  Charles-Moïse Briquet rappelle que Zonghi a cru voir dans cette forme un miroir, ici la confusion n’est pas possible (même en tenant le modèle vers le bas)

17  Collectorie 148, f°150-221

18  Selon Charles-Moïse Briquet, ce filigrane est extrêmement abondant et, si tous les papiers qui le portent sortent d’un seul battoir, ce devait être une papeterie importante.

19  Dans des comptes de Quillan, la marque des deux cercles reliés par une croix domine, mais deux autres filigranes s’intercalent : l’ange couronné aux f°165, 166, 204 et 205, le « S » sur tige aux f°183,184, 188, 191, 194, 195, 196, 200 et 203 alors que le 201 porte des cercles.

20  Archives municipales de Narbonne, CC 2352, 1352 pour le premier registre conservé.

21  Collectorie 146, f°185 à 229. Cette partie fait défaut au doublon Introitus et Exitus 180, f°149 à 180.

22  Guillaume Boursiern’annonce que les recettes venant des bayles, du chancelier et autres, alors que le titre de la couverture indique recettes et dépenses, assignées ou payées.

23  Ce qui explique l’incohérence de plusieurs rubriques du double exemplaire du compte d’Alaigne (Collectorie 146, f°72-184 et Introitus et Exitus 181, fol.1-94). Dans la Collectorie, il convient de rétablir l’ordre des folios ainsi : 89 v°, 127, 128, 129, 90  et dans l’Introitus et Exitus les folios doivent se succéder comme suit : 62, 82, 83, 84, 73, 74, 75, 63, 64. Cette erreur d’archivage est obligatoirement due à une reliure postérieure car elle est flagrante. Un compte ainsi inutilisable n’aurait pas été sauvegardé par l’autorité pontificale.

24  Collectorie 148, f°150-220, 1346

25  330 sur 225 mm pour le Registre d’Avignon.

26  Un seul des registres possède un sommaire des chapitres, l’Introitus et Exitus 172. Or, d’après Christian Guilleré, « la classification en rubriques au début du cartulaire et le fait que de nombreuses annotations en forme de gloses ou de références marginales ou de notae en forme de mains pour indiquer en exergue les passages dignes d’attention » est le signe d’un document de travail. (Llibre Verd de la ciutat de Girona (1144-1533), p.20)

27  Introitus et Exitus 172, f°84 : Sequitur aliud compotum a festo natalis domini anno a nativitate christi millesimo 339 usque ad primam dies [lacune] exclusive de receptis per dictum baiulum in foriscapis et aliis quibusdam receptis diversarum rerum tamen hic non computantur nombra arrendamentorum et carnalagiorum baiulie de Alanhano nec procurationis ecclesiarum visitatarum per dominum in dicta baiulia anno 40 39 exceptis quibusdam ecclesis baiulie de pinciano visitatis in dicto anno 39 de quibus computa et reddita nomine dominus Johanis de Granis baiulus de pinciano prout in computo suo dicti anni 39 potest videre.

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Table des illustrations

Titre Fig. 2 : Carte de distribution des comptabilités conservées.
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Titre Fig. 4 : Filigrane 01.
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Titre Fig. 5 : Filigrane 02.
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Titre Fig. 6 : Filigrane 03.
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Titre Fig. 7 : Filigrane 04.
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Titre Fig. 8 : Filigrane 05.
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Titre Fig. 9 : Filigrane 06.
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Titre Fig. 10 : Filigrane 07.
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Titre Fig. 11 : Filigrane 08.
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Titre Fig. 12 : Filigrane 09.
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Titre Fig. 13 : Filigrane 10.
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Titre Fig. 14 : Filigrane 11.
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Titre Fig. 15 : Filigrane 12.
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Titre Fig. 16 : Filigrane 13.
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Titre Fig. 17 : Filigrane 14.
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Titre Fig. 19 : Registres des clavaires.
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Pour citer cet article

Référence papier

Professeur agrégé, M.-L. Jalabert a préparé, sous la direction du Professeur Monique Bourin de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, un doctorat intitulé « Autour du Livre Vert, idéal et réalités de la seigneurie des archevêques de Narbonne de Gilles Aycelin à Pierre de La Jugie (1290-1375) ». Soutenue en 2007, cette thèse a été éditée pour le grand public, en 2009, sous le titre « Le Livre Vert de Pierre de La Jugie, Une image de la fortune des archevêques de Narbonne au XIVe siècle ». Cette recherche, centrée sur l’exploration d’une seigneurie ecclésiastique n’a pu laisser qu’une mince place à l’exploitation codicologique du très riche corpus réuni. L’auteur se consacre aussi, désormais, à l’approfondissement de la connaissance matérielle et formelle de ces sources relevant de l’écrit pratique au sein du LAMOP, Université Paris I Panthéon-Sorbonne. mljalabert@hotmail.com

Référence électronique

Marie-Laure Jalabert, « L’écriture comptable des bayles des archevêques de Narbonne, Bernard de Fargues (1311-1341) et Gaubert du Val (1341-1347) », Comptabilités [En ligne], 2 | 2011, mis en ligne le 05 septembre 2011, consulté le 26 janvier 2013. URL : http://comptabilites.revues.org/473

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