Retour Florence
Retour accueil
Le Printemps de Botticelli


 

 C'est une peinture sur panneau de bois de dimensions 2,03m x 3,14m peinte vers 1478. Elle fut commandée par les 2 frères Medicis : Lorenzo et Giovani di Pierfrancesco. Elle illustre le poème de Politien consacré au règne de Vénus.
    Le décor du Printemps est une prairie semi-circulaire où abondent les herbes et les fleurs peintes sur fond sombre, tussilage, myosotis, petites jacinthes, bleuets, iris, pervenches, oeillets, pâquerettes. Des orangés émaillés de fleurs blanches et de fruits dorés encerclent la prairie et derrière eux se dresse une rangée d'épicéas. On reconnaît le décor décrit par Boccace dans le prologue de la troisième journée du Décaméron.
    Debout devant le myrte qui se dresse au milieu de la haie se trouve Vénus, sous une voûte de branches d'orangers. C'est donc le jardin de Vénus, assimilé dans l'imagination de Botticelli au jardin des Hespérides qui donnait son titre au tableau aux inventaires des 17 et 18e siècles. La mythologie situe le jardin des Hespérides à l'Occident (au couchant). C'est là que poussent les pommes d'or dédiées à Vénus, gardées par les Hespérides, filles d'Atlas et par un dragon.
    A l'époque hellénique, les fruits d'or furent identifiés à des agrumes, totalement exotiques dans le monde gréco-romain. Elle est couramment admise sous la Renaissance italienne. Les fleurs et les oranges indiquent que nous sommes au Printemps et plus précisément au mois de mai, le mois printanier par excellence. Les orangers se dressent sur un pré et même s'ils sont trop serrés pour nous laisser voir vraiment le paysage, nous apercevons à l'extrême droite des montagnes bleues, une rivière à leurs pieds et une plaine vert olive, tandis que sur la gauche nous entrevoyons la même plaine, une vallée et des montagnes moins hautes.
    Pour la Renaissance, une femme amoureuse et mariée incarne la déesse de l'Amour et du mariage. Son attitude cambrée qui lui donne un ventre proéminent était jugée fort belle et seyante pour une femme du XVe siècle. Son ample robe blanche s'orne d'une soutache sous la poitrine et de flammes ou de rayons dorés brodés ainsi que sur le col qui symbolisent sans doute les feux de l'Amour.
    Le collier est un croissant d'or incrusté de rubis dont il rappelle le pourtour resplendissant comme la lune qu'Aphrodite porte dans les hymnes homériques. Un serre-tête est posé sur son grand voile transparent (coiffure des femmes mariées de qualité au XVe siècle). Elle lève la main droite vers les trois Grâces (filles de Zeus appelées Aglaé, Euphrosyne et Thalie) pour attirer l'attention sur ce que fait son fils Cupidon: enfant blond aux ailes blanches, les yeux bandés d'un tissu blanc. Son carquois rouge flotte derrière lui. Il tire une flèche à pointe enflammée sur la première Grâce de gauche.
    Flora est adorée par les Sabins. C'est la divinité des fleurs et du Printemps. Afin d'expliquer cette attribution, Ovide a rattaché Flora à un mythe grec et l'a assimilée à la nymphe Chloris que Zéphyr épousa en lui accordant tous les pouvoirs de la floraison printanière.
    Zéphyr, personnification divine du printemps, apporte la fraîcheur et la pluie bienfaisante aux climats brumeux d'Italie. Jeune homme ailé, il glisse doucement dans l'espace et annonce l'humide printemps. Il s'unit à Chloris, déesse de la végétation nouvelle qui donne le jour à un fils Carpos, le fruit.
    Les trois Grâces, filles de Zeus (Euphrosyne, Aglaé et Thalie) , président à la conversation et aux travaux de l'esprit. Thalie est une muse d'origine champêtre.

La technique picturale de Botticelli
    Le tableau est constitué de deux plans :
-le premier avec les personnages en clair
-le fond qui semble être là pour mettre les personnages en valeur.
Botticelli, au contraire de ses contemporains, attache peu d'importance à la perspective, mais beaucoup aux lignes et couleurs.
    Le paysage ne présente aucune ligne de fuite, exceptées deux trouées entre les orangers (à droite et à gauche) et s'arrête sur les verticales des troncs. Le rythme de ces troncs encadre Vénus, elle même disposée sur un fond de feuillage sombre pour mieux faire ressortir la clarté de sa personne. Elle peut faire songer à une statue de déesse antique à l'image de celles qu'on vénérait dans les temples. Elles étaient perchées dans des niches. Botticelli a voulu souligner la divinité de Vénus en l'auréolant d'un demi cercle en ciel comme le symbole de la voûte d'un temple où les troncs d'orangers représenteraient les colonnes.
    Par ailleurs la perspective volontairement secondaire se retrouve dans les dessins des personnages traités, non pas en volume, comme l'ont fait de nombreux peintres de la Renaissance, tels que Piero della Francesca, Mantegna, mais en couleurs et en lignes principalement.
    Ce qui frappe, c'est le contraste entre les personnages et le paysage sombre qui est là pour les mettre en valeur. Le paysage, principalement dans les verts foncés, est rythmé : en haut, par les cercles des oranges, en bas, par les taches de fleur et au milieu par des bandes de ciel bleu.
    Les personnages de Botticelli frappent tous par leur silhouettes longilignes (il y a plus de 8 fois la longueur de la tête dans le corps, contre 7,5 en général).
    Cela donne une impression longiligne et féminine fragile. Les formes sont légèrement sinueuses et maniérées (les mains sont très importantes dans une peinture, presqu'autant que le visage) (remarquez leurs positions en retrait).
    Il semble posé là de façon irrégulière, comme des êtres de lumière dans un paradis cultivé. En effet, ni l'ombrage de la forêt, ni le volume de leur corps, ne produisent d'ombre, soutenue sur la silhouette de leur présence. Il n'y a pas d'ombre non plus sur leur corps et c'est tout juste si quelques brins d'herbe timides viennent couper la forme de leurs pieds.
    Seul Zéphyr, en bleu, se faufile discrètement entre les arbres, mais n'est-ce pas le propre du vent que d'agir sans être vu !
    Les figures des femmes ont toutes le même type : ovale long, nez droit, une bouche sinueuse et légèrement charnue, des yeux en amande. Les cheveux sont traités par mèches, très bien délimités par un trait foncé. Leurs expressions semblent à la fois ingénues et paisibles. Le peintre leur a transmis toute son admiration pour le mystère fragile de la femme.
    Les hommes sont relégués aux extrémités du tableau et visiblement, Botticelli s'y est moins intéressé. Il n'y a pas le même élan de ligne ainsi que dans la recherche du visage idéal, aussi poussé que dans les figures féminines. Ils semblent n'être là que pour faire encore plus ressortir ces dernières.
    La lumière vient de la gauche (montrer les ombres-lumières). Cependant, tous les corps sont caractérisés par des traits foncés quand ils sont sur des fonds clairs (les bras des trois Grâces). Le rendu des mousselines transparentes des trois Grâces est principalement traité par des ondulations plus claires.
    Pour les couleurs, on peut distinguer trois endroits où le rouge apparait sur les divinités (Mercure, Vénus, Cupidon) sur ton froid comme le vert et les bleu pour mettre en valeur l'importance de ces trois personnages ainsi que le personnage de Flora en printemps. Le bleu de Zéphyr souligne le côté droit du tableau.
    En conclusion, par le thème du tableau comme par le rendu de sa peinture qui privilégie les lignes sinueuses et les couleurs fraîches, ainsi que le goût des détails, tout cela donne à l'ensemble une impression de grâce toute féminine. Botticelli exalte le mystère de la Femme et de l'Amour.

Haut de la page