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EXPOSITION LE MOUVEMENT DES IMAGES, ART, CINEMA A BEAUBOURG Rapprocher cinéma et arts plastiques
Boris Daireaux pour Evene.fr - Juin 2006 - Le 11/05/2006
L’ambitieuse exposition qui se tient au centre Pompidou jusqu’au 29 janvier 2007 entend révéler les liens intimes, profonds qui unissent les plasticiens contemporains au 7e art.
Une très vaste exposition
La première chose notable dans cette exposition, c’est la quantité d’oeuvres qui sont montrées et qui rappellent que le centre Pompidou dispose de réserves immenses pour produire de telles expositions. De la patience, en tout cas, il en faut pour parcourir cette exposition, vécue comme une passerelle entre l’art du XXe-début du XXIe siècle et le cinéma. De la patience et de l’attention. Car il y a des oeuvres remarquables auxquelles l’oeil, parfois fatigué, ne fait plus attention, mais qui se cachent, se dissimulent, dans un ensemble compact, fourni, peut-être trop vaste pour être digéré en une visite. On pourrait faire une liste longue comme le bras de travaux dont il faut se souvenir, mais celle-ci ne pourrait être exhaustive. Prenons donc comme postulat de départ de n’en retenir que quelques-unes.
De très belles choses à voir
Il y a, dans un coin, un peu à l’écart de l’exposition, des photos du couple Barbara et Mikael Leisgen dont les positions du corps donnent l’illusion que le soleil apparaît entre leurs bras ou qu’ils auraient inventé les nuages (‘La Création des nuages’, 1974). En reconstituant de manière humoristique et poétique la trajectoire d’une comète (‘Big Comet, 6-72° Sea’, 1973), le couple laisse augurer de ce qui va régir l’exposition : le mouvement ou plutôt le décalage par rapport à l’illusion du mouvement que crée le cinéma et qui est son essence même. L’humour, l’ironie, sont aussi les éléments dénominateurs communs aux grandes oeuvres de cette exposition et qui font leur force en tout cas. Humour, lorsque l’artiste californien John Baldessari tente de prendre en photo trois ballons alignés dans le ciel (‘Throwing Three Balls in the Air to get a Straight Line’, 1973). Humour, lorsque Richard Serra tente vainement d’attraper une feuille de plomb qui lui glisse indéfiniment entre les mains (‘Hand Catching Lead’, 1968). La série, le photomontage, ce sont encore des éléments qui rapprochent l’oeuvre d’art du cinéma. Warhol, avec sa série ‘Ten Lizes’, 1963, et la figure de l’actrice Liz Taylor, reprise dix fois, dresse une critique subtile, sous-jacente du système du cinéma hollywoodien.
Qu’est-ce que le cinéma, et comment fonctionne-t-il ? Le cinéma est une suite de pictogrammes animés à la vitesse de 24 images par seconde donnant l’illusion du mouvement. C’est donc une suite d’images dont le seul mouvement est celui créé par l’appareil qui les projette et non par les images elles-mêmes (Gilles Deleuze, 'Cinéma 1. L'image-mouvement', Les éditions de Minuit, Paris, 1983). Partant de l’essence du cinéma, de l’illusion du mouvement, le travail des artistes se révèle plutôt être un travail d’analyse, en amont du cinéma. Le plasticien joue sur les codes du cinéma, les révèle en trouvant de nouvelles formes qui partent de cette analyse. Ainsi, On Kawara peint des petits tableaux qui ne comportent qu’une date, celle où il a peint le tableau. La date de réalisation devient ici un élément isolé d’un film, créant par là une distance et une ironie avec le cinéma sur laquelle nombre d’artistes vont jouer dans l’exposition.
Reprise de codes
Une chose évidente est que les oeuvres les plus réussies jouent sur l’humour, le décalage, l’aspect sériel ou répétitif des situations. On peut citer ‘Le Ballet mécanique’, 1923-1924, de Fernand Léger mais, très subjectivement, l’auteur de cette critique s’arrête sur un film, ‘La Pluie’, de Marcel Broodthaers, plasticien belge décédé en 1976. L’artiste, dans cette petite pièce très courte, écrit une lettre à l’extérieur d’une maison devant laquelle il est assis. Soudain, la pluie, ou plutôt une fausse pluie (on s’aperçoit que le jet d’eau n’atterrit que sur sa tête et sur sa feuille), se met à tomber, créant des formes avec l’encre de la lettre. Ce film conjugue des éléments du cinéma avec des préoccupations qui sont celles d’un artiste. Ici, l’autodérision, l’absurdité de continuer à écrire sous la pluie sont bien les enjeux d’un artiste qui reprendrait des codes du cinéma pour créer sa propre mythologie personnelle.
Lorsque Warhol peint des séries sur des célébrités, il reprend un dogme du cinéma (des images qui se suivent en faisant croire au mouvement) mais ces images à lui restent la même image répétée pour faire la critique du star-system hollywoodien. Un peu à la manière d’un Mark Lewis qui ne fabrique que des films constitués d’un générique de début et d’un de fin. On peut citer, dans cette énumération, les saynètes comiques tournées par John Wood et Paul Harrison se mettant tous les deux en scène en mimant des mouvements ou des cascades au ralenti, mettant ainsi en avant les ficelles qui régissent le cinéma et l’illusion du mouvement. On pourrait également parler de Robert Longo peignant ses ‘Men in the Cities’, 1980-1999, qui montrent le mouvement décortiqué "plan par plan" de la chute d’un homme, évoquer les mouvements de la lumière dans les installations de Mona Hatoum ou Olafur Eliasson. Mais ce serait oublier un élément primordial que les artistes plasticiens ont repris au cinéma : le récit.
L’art au service du récit
Si l’on a dit que l’artiste reprenait ironiquement certains codes du cinéma, il y a un autre aspect du 7e art auquel il est beaucoup plus fidèle. C’est le récit, le sens de la narration. Dans ‘Le Droit Chemin’, les artistes suisses Fischli et Weiss campent deux animaux peluches qui se sont égarés et tentent de retrouver leur route. Dans ce film, c’est raconter une histoire qui intéresse les deux artistes, là encore à des fins personnelles puisqu’il s’agit de s’interroger sur des enjeux qui ont bien à voir avec l’art contemporain dans ce film.
Mais le récit, élément fondamental dans le cinéma, est au service d’un art qui n’a pas les mêmes finalités que le cinéma mais utilise volontiers les codes qui l’animent. En tout cas, ce petit film est un des clous de l’exposition, au même titre qu’une pièce extrêmement belle de Nan Goldin intitulée ‘Heartbeat’ (Battements de coeur), 2000-2001. C’est une oeuvre étrange, fonctionnant selon le principe d’une projection de diapositives montrant des couples d’amoureux dans des scènes intimes de leur vie. Ce qui fait le liant dans cette pièce, c’est la musique, composée par la chanteuse Björk, qui vient donner aux images fixes un sens extraordinaire du récit, de l’art de raconter une histoire sans dire un mot. Il y a un réel émerveillement devant ces êtres que nous ne connaissons pas, dont nous ne savons rien mais que la photographe prend en photo faisant l’amour ou riant tout simplement. Qu’est-ce qui fait que ces gens, dans des situations si intimes, ne nous gênent pas, mais parviennent au contraire à nous émouvoir ? Comment notre oeil s’acclimate-t-il de scènes si intimes ? C’est l’acuité du regard de la photographe qui saisit ces êtres écorchés sans les trahir. La beauté de cette installation ferait presque oublier tout le reste de l’exposition.
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