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13.01.2011

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RADIOACTIVITÉ :
quels risques pour la santé et l'environnement ?

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Tchernobyl, le début de la crise de confiance

Le 26 avril 1986, l'explosion de l'un des réacteurs de la centrale de Tchernobyl en Ukraine fait brutalement prendre conscience qu'un accident grave est possible avec le nucléaire.

© CSI (d'après IRSN)

Conjugué à la divulgation de fausses informations sur le trajet réel du nuage radioactif, Tchernobyl a marqué le début d'une défiance de l'opinion publique française envers les experts du nucléaire. L'exigence actuelle de transparence et de débat public sur le nucléaire en général, et la gestion des déchets en particulier, y trouve très certainement ses racines.

À ce jour, aucun accident grave n'a été recensé avec des déchets radioactifs issus du nucléaire civil. Relativement méconnue mais liée au nucléaire militaire, l'explosion d'une cuve de déchets radioactifs (produits de fission mélangés à du nitrate d'ammonium) en 1957 à Khychtym, dans l'Oural, a contaminé toute une région et peut-être même au-delà, comme dans le cas de Tchernobyl, mais sans qu'un bilan n'ait été rendu public.

Vingt ans après, la région est toujours contaminée

À ce jour, Tchernobyl est le seul accident grave issu du nucléaire civil. Selon l'Onu*, le bilan officiel lié aux radiations est d'une cinquantaine de morts parmi les pompiers sévèrement irradiés les premiers jours et de neuf enfants décédés d'un cancer de la thyroïde.

La vile fantôme de Pripyat, à une dizaine de kilomètres de la centrale de Tchernobyl
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La vile fantôme de Pripyat, à une dizaine de kilomètres de la centrale de Tchernobyl

Mais il s'agit d'un bilan non définitif : l'Onu prévoit jusqu'à 4 000 décès supplémentaires parmi les personnes les plus exposées. En outre, ce bilan reste controversé. Il ne prend en compte que le quart des 800 000 personnes ayant nettoyé le site et ne comptabilise pas toutes les pathologies graves relevées chez les enfants**.

Par ailleurs, des Biélorusses et des Ukrainiens habitent toujours dans des zones contaminées. Autre conséquence de la catastrophe : le déplacement de centaines de milliers de personnes avec un impact sanitaire, social et économique majeur dont on n'a pas encore évalué tous les effets.

* « Chernobyl's Legacy : Health, Environmental and Socio-Economic Impacts », rapport publié le 5 septembre 2005. ** Seuls les 200 000 travailleurs qui étaient sur place en 1986 et 1987 et qui ont reçu les doses de radioactivité maximales ont été suivis. Quant aux maladies (immunitaires, génétiques…) relevées chez les enfants, les experts de l'Onu ne les considèrent pas en lien avec la radioactivité.

Hanford, le site le plus contaminé des Etats-Unis : Entre 1943 et 1963, neuf réacteurs producteurs de plutonium et cinq usines de retraitement ont été construits à Hanford (État de Washington, États-Unis) à des fins militaires. Arrêtées depuis la fin des années 80, ces installations ont généré d’importantes quantités de déchets liquides de haute activité. Un certain nombre de cuves contenant ces déchets ont fui, contaminant une partie du sous-sol. Des opérations de décontamination du site ont été entreprises depuis une dizaine d’années mais sont encore loin d’être terminées.
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Hanford, le site le plus contaminé des Etats-Unis

INES : une échelle de gravité

Conséquence de Tchernobyl, une échelle de classement des incidents et accidents nucléaires a été mise en place par l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) en 1991, à l'instar de ce qui existe pour les séismes.

Baptisée INES (International Nuclear Event Scale) et appliquée par une soixantaine de pays, cette échelle concerne les installations nucléaires civiles*, ainsi que le transport des matières nucléaires. Elle comprend huit niveaux (de 0 à 7), les évènements de niveau 0 étant sans importance pour la sûreté. À l'autre extrémité, l'accident de Tchernobyl en 1986 (classé niveau 7) et celui de Khychtym dans l'Oural en 1957 (classé niveau 6).

En France, chaque année, l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN)** classe, en moyenne, plusieurs centaines d'évènements au niveau 0, une centaine au niveau 1 et un ou deux incidents au niveau 2.

* En France, depuis 1998, cette échelle concerne aussi les installations nucléaires militaires. ** Appelée aussi DGSNR, Direction générale de la sûreté nucléaire et de la radioprotection.

Les risques liés aux sources radioactives

En dehors du nucléaire civil et militaire, d'autres secteurs (médical, industrie, recherche) utilisent des matières radioactives qui peuvent s'avérer particulièrement dangereuses en cas d'actes de malveillance ou d'accidents*.

Nettoyage du site de Goiânia au Brésil
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Nettoyage du site de Goiânia au Brésil

Or, dans le monde, des millions de sources radioactives sont en circulation et des accidents sont parfois signalés, notamment lors de leur transport.

En 1987, l'accident de Goiânia au Brésil a montré l'ampleur des conséquences de la dispersion d'une source de césium utilisée en radiothérapie. Abandonnée, celle-ci fut démontée pour en récupérer le métal. Des enfants jouèrent avec la poudre qui, dans le noir, émettait une lumière bleue. Résultat : quatre morts et 249 personnes contaminées dans une zone de 64 km².

* Lors d'une conférence internationale à Bordeaux, en juin 2005, l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) a encore appelé à renforcer la sécurité de ces sources radioactives.

Tous exposés à de la radioactivité… : Qu'elle soit d'origine artificielle (imagerie médicale, radiotharapie, rejets du nucléaire, retombées atmosphériques de Tchernobyl ou d'essais militaires) ou naturelle (air ambiant qui comporte un gaz radioactif, le radon, rayons cosmiques lors d'un voyage en avion, alimentation qui délivre des éléments radioactifs à notre organisme, habitat en granite…), la radioactivité est continuellement présente dans notre vie quotidienne, à de très faibles doses. La dose moyenne annuelle à laquelle un Français est exposé est d'environ 4 mSv. En France, la réglementation autorise une dose annuelle liée à l'industrie nucléaire de 1 mSv maximum par habitant.
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Tous exposés à de la radioactivité…

Les effets des rayonnements : une affaire de dose

L'exposition à une forte dose de rayonnements (plusieurs milliers de millisieverts*) émis par une source radioactive (qu'elle provienne du nucléaire, du médical, de la recherche ou de l'industrie) entraîne immédiatement des lésions des tissus, de graves brûlures, voire la mort de l'individu. Si la personne survit, un cancer peut apparaître à plus long terme. Dans le cas d'une faible dose, l'exposition ne produit pas d'effet immédiat visible mais peut contribuer à la survenue d'un cancer des années plus tard**.

La radioactivité (3'40'') Regarder la vidéo
La radioactivité (3'40'')

Car la cible principale du rayonnement radioactif est l'ADN : le rayonnement provoque des lésions de notre patrimoine génétique qui peuvent conduire à l'apparition de mutations responsables d'un cancer. Au-delà de 100 millisieverts, le risque d'apparition d'un cancer est directement proportionnel à la dose reçue. Mais on ne dispose d'aucune certitude pour les doses inférieures à ce seuil (irradiations les plus fréquentes).

* Millisievert = mSv, unité de mesure permettant d'évaluer les effets des rayonnements sur un individu. Cette unité prend en compte le type de rayonnement, son intensité et la sensibilité du tissu biologique qui le reçoit. ** En juin 2005, une décision de justice a, pour la première fois, reconnu un lien de cause à effet entre la survenue d'un cancer de la thyroïde et l'exposition à des rayonnements chez un ancien militaire ayant participé aux essais nucléaires à Mururoa (Polynésie française). Jusqu'alors, ces essais étaient tenus pour inoffensifs par la France.

L'usine de la Hague
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L'usine de la Hague

Les rejets de La Hague

L'usine de La Hague est autorisée à rejeter dans l'eau et dans l'air environ mille fois plus d'éléments radioactifs à longue durée de vie qu'un réacteur nucléaire.

Néanmoins, au-delà de l'impact environnemental, il est difficile d'appréhender les risques sanitaires liés à ces rejets car il s'agit d'une exposition chronique à de faibles doses de produits et trop peu d'études ont été menées jusqu'à présent sur le sujet.

En 1995, une étude révèle un nombre de cas plus élevé de leucémies chez les enfants habitant près de l'usine de La Hague ; et des travaux complémentaires suggèrent un lien avec une exposition aux rejets de l'usine*. Mais d'autres études menées ultérieurement n'ont pas permis de confirmer ce lien**.

* Travaux publiés en 1995 dans les Statistics in Medicine et en 1997 dans le British Medical Journal.
** Études menées en 1997 et 2002 par un groupe pluraliste d'experts, le groupe de radioécologie du Nord-Cotentin.

Chaque année, une centaine de bateaux sillonnent les mers avec un chargement de matières nucléaires (déchets vitrifiés, combustible usé, combustible MOX…).
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Chaque année, une centaine de bateaux sillonnent les mers avec un chargement de matières nucléaires (déchets vitrifiés, combustible usé, combustible MOX…).

Les déchets sont-ils sûrs ?

S'ils sont bien gérés, il n'y a pas a priori de risques immédiats liés aux déchets nucléaires. Leur conditionnement et leur stockage sont adaptés aux rayonnements qu'ils émettent et à leur durée de vie. De plus, contrairement à certains produits chimiques (comme le mercure, le plomb ou le cadmium), la toxicité des déchets nucléaires ne fait que baisser : l'une des propriétés de la radioactivité est en effet de décroître jusqu'à disparaître totalement au bout d'un certain temps.

Il suffit donc en principe d'attendre (trois cents ans pour les déchets à vie courte et des centaines de milliers d'années pour les déchets à vie longue) pour se débarrasser de leur nocivité.

Le transport routier largement en tête : Le moyen de transport le plus utilisé pour les matières radioactives est le camion (80 % pour le nucléaire contre 62 % pour le secteur médical, l’industrie et la recherche), le train (16% contre 7%), le bateau (3,5 % contre moins de 1%) et l’avion (moins de 1% contre 31%). En 2004, on a recensé en France 66 incidents de transport de matières radioactives : 55 ont été classés au niveau 0 de l’échelle de gravité INES et 11 au niveau 1.  Sources : Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) et Autorité de sûreté nucléaire (ASN).
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Le transport routier largement en tête

Mais les déchets nucléaires peuvent être dangereux si une agression externe provoque leur dispersion : accident lors de leur transport, attentat sur un centre d'entreposage…

Par ailleurs, aujourd'hui, tant en France qu'à l'étranger, il y a encore beaucoup de déchets non conditionnés* ou à reconditionner (voir partie 1), qui peuvent potentiellement se disperser dans l'environnement.

* Les déchets sont dits conditionnés lorsqu'ils sont immobilisés dans un matériau durable et dans un conteneur pour éviter toute dispersion dans l'environnement.

Piscines : le maillon faible ? : En France, plus de 10 000 tonnes de combustible usé sont entreposées dans les piscines de La Hague pour refroidir quelques années avant d’être retraitées. Or, selon un scénario catastrophe imaginé au lendemain du 11-Septembre 2001, si suite à un attentat, l’une des piscines de La Hague était endommagée et se vidait, provoquant ainsi la fonte des gaines protectrices autour du combustible usé, le relâchement de radioactivité (césium 137) dans l’environnement serait majeur. Même si elle est contestée, cette hypothèse a conduit, par mesure de précaution, à la mise en oeuvre de mesures de sécurité exceptionnelles (missiles, puis radars) dans la région du Cotentin.
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Piscines : le maillon faible ?

Le risque terroriste

Attaque d'une installation nucléaire (centrale, usine de retraitement, centre de stockage de déchets…) ou d'un transport de matières radioactives, vol de matières nucléaires, fabrication d'une « bombe sale »*, dissémination d'une source radioactive dans un lieu public… ces scénarios catastrophe alimentent depuis longtemps l'univers de la fiction. Mais les attentats du 11-Septembre 2001, avec l'intervention de terroristes kamikazes ultra-préparés, leur ont donné une nouvelle crédibilité.

Outre la prévention du risque d'accidents, en particulier dans les centrales nucléaires (en ce sens, Tchernobyl a servi de modèle), la question majeure qui est posée aujourd'hui en terme de sécurité est donc : comment éviter un attentat sur une cible nucléaire ou le détournement de matières radioactives à des fins terroristes ? Cela ne concerne pas uniquement le nucléaire civil ou militaire mais aussi toutes les sources radioactives utilisées dans le médical, la recherche ou l'industrie. Au plan international, le 13 avril 2005, les Nations unies ont adopté une convention** pour une meilleure coopération entre les États contre le terrorisme nucléaire.

* Désigne une bombe conventionnelle entourée de matériaux radioactifs. ** The International Convention for the Suppression of Acts of Nuclear Terrorism devait être soumise à la signature des États dès septembre 2005.

Means a conventional bomb surrounded by radioactive materials.2. The International Convention for the Suppression of Acts of Nuclear Terrorism was to be submitted for ratification by individual States from September 2005.
L'usine iranienne de Natanz
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L'usine iranienne de Natanz

Le risque de prolifération nucléaire

Certaines matières radioactives (plutonium, uranium) liées au nucléaire civil peuvent être détournées à des fins militaires non autorisées. L'Iran a récemment annoncé son intention de reprendre les activités de son usine d'enrichissement d'uranium, arguant du fait que le Traité de non-prolifération nucléaire autorise la production de combustible pour des activités nucléaires civiles. Mais si l'uranium est fortement enrichi, il peut également servir à la fabrication d'une bombe.

Située à Natanz, l'usine iranienne était fermée depuis novembre 2004, suite à l'intervention de la France, de l'Allemagne et du Royaume-Uni, qui souhaitaient éviter un conflit direct avec les États-Unis. Le 10 janvier 2006, l'Iran annonce la reprise de ses activités de recherche nucléaire et lève les scellés placés sur des équipements et du matériel liés à l'enrichissement à Natanz. Les négociations se poursuivent malgré tout… dans un climat pour le moins tendu.

 
 

Mis en ligne le 23/09/05

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Mis à jour le 27/03/06

 

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