Cela fait bien longtemps que le prix Nobel de la paix a basculé dans le grand n'importe quoi. Son attribution cette année à Barack Obama le confirme une fois de plus. Obama n'a aucun bilan en terme de paix et de maintien de la paix. Pour l'instant, c'est juste un espoir. Ces premières déclarations et prises de position sont en rupture nette avec la politique de l'administration Bush. Il a clairement affiché une ligne politique multilatéraliste, il a annoncé sa volonté de retrait des troupes US d'Irak et qu'il cherche à se sortir du bourbier afghan. Mais pour l'instant, il n'a rien fait. C'est comme si on avait attribué le prix Nobel de la paix à Richard Nixon en 1969, quand il a annoncé, tout juste élu, que les USA allaient se retirer du Vietnam. Les USA ont effectivement mis fin à la guerre du Vietnam et Kissinger a obtenu le prix nobel de la paix pour cela, mais en 1973, une fois la paix conclue.

Le prix Nobel de la paix est vicié par l'extension démesurée de son champ. Qu'est ce que la "paix" ? C'est vaste, tellement vaste que ça autorise tout et n'importe quoi. Je distingue trois types de prix Nobel.

Il y a d'abord le prix Nobel de la Paix au sens strict du terme, qui récompense les personnes et organisme ayant oeuvré contre la guerre et contre les conflits dans le monde, de manière très concrète, sur le terrain. C'est par exemple le prix Nobel de l'an dernier, Martti Ahtisaari, médiateur international depuis plus de 30 ans ou Jimmy Carter, observateur international. C'est aussi le prix attribué à des politiques ayant conclu une paix après un long conflit (John Hume et David Trimble pour l'Irlande du Nord). C'est enfin le prix attribué aux organes internationaux dont l'action est d'éviter la guerre comme l'ONU et ses filiales.

Il y a d'autres prix nobel qui sont déjà plus loin de la paix, mais comme on dit en droit parlementaire "non dépourvu de tout lien". C'est par exemple Mohamed Yunus et son combat pour le micro-crédit, C'est l'UNICEF, c'est Wangari Muta Maathai, militante pour le développement. Le raisonnement est que favoriser le développement, c'est favoriser la paix. C'est un peu lointain, mais ce n'est pas totalement faux.

Et il y a la troisième catégorie qui me gêne terriblement, celle des icônes médiatiques et des prix nobel ethnocentriques. On a eu Al Gore, maintenant on a Obama. Quel lien avec la Paix ? Il faut le chercher. Ils sont en fait récompensés parce que "bien-pensants" et conformes aux opinions politiques des membres (scandinaves) du jury. Cela m'a frappé en 1995, quand le prix nobel a été attribué à un activiste antinucléaire l'année même de la reprise des essais nucléaires français. En 2003, le jury récidive avec le prix accordé à Shirin Ebadi, "militante" des droits de la femme dans un pays musulman. Là, on est sur un combat purement politique pour faire triompher les valeurs occidentales dans un pays qui ne semble pas disposer à les adopter spontanément.

Barack Obama a pour mérite essentiel, à ce stade de sa carrière, de n'être qu'une icône médiatique. C'est vraiment trop juste, à mon avis, pour justifier un prix Nobel de la Paix. Attendons que les troupes US aient quitté l'Irak, voire qu'elles se soient retirés d'Afghanistan et là, oui, un prix Nobel de la Paix pourrait se justifier. Mais maintenant non.