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Paru le : 11 mars 2002

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Une marée écologiste tente de faire barrage au canal de l’Ebre
ESPAGNE • Plus de 300 000 Catalans et Aragonais ont manifesté hier après-midi leur opposition au transvasement de 100 milliards de litres d’eau par an du fleuve Ebre vers les exploitations agricoles du sud du pays.

BENITO PEREZ
(AVEC LES AGENCES)

Un raz-de-marée. Quelque 300 000 Catalans et 30 000 Aragonais se sont répandus hier après-midi dans les rues de Barcelone et de Saragosse pour faire barrage au «Plan hydrologique national» (PHN). Elaboré par le gouvernement central de José Maria Aznar et cofinancé, en principe, par l’Union européenne, ce projet prévoit de transvaser une partie de l’eau de l’Ebre vers le sud du pays. L’impressionnante mobilisation d’hier représente un camouflet inédit pour le gouvernement conservateur. Elle lance également de la meilleure des façons la semaine de mobilisations barcelonaise en vue du Sommet européen du week-end prochain.
Barcelone, capitale de la Catalogne, et Saragosse, pour l’Aragon, sont au cœur des régions les plus touchées par le PHN, dont le coût est estimé à 4,2 milliards d’euros. Le gouvernement affirme que le transvasement de 100 milliards de litres d’eau par an vers les terres agricoles et les villes des régions de la côte méditerranéenne de Valence, d’Almeria et de Murcie, dans le sud-est, relève du simple partage des ressources excédentaires de l’Ebre, principal fleuve du pays.

GASPILLAGE OU RÉPARTITION?
Du côté des opposants, on met en avant le grave impact environnemental qu’aurait la diminution du débit de l’Ebre. Pas moins de quatre zones naturelles seraient menacées par ce projet.
Mais surtout, les mouvements écologistes dénoncent le gaspillage d’une ressource aussi vitale, pointant du doigt le développement de l’agriculture ultra-intensive - coûteuse en eau, énergie et coûts humains - pratiquée dans la fameuse «mer de plastique» des déserts du sud-est espagnol.
En réaction aux protestations populaires, le gouvernement vient de retoucher le projet, raccourcissant de 14% le trajet du canal et atténuant quelque peu son impact environnemental.

PAS DE MANNE EUROPÉENNE
Insuffisant, selon les opposants, dont les rangs ne cessent de grossir. Pour la seule ville de Saragosse, 30 000 personnes seraient descendues dans la rue hier. Mais les regards étaient surtout tournés vers Barcelone, où, aux dires des organisateurs, ils étaient quelque 400 000 à défiler sous le slogan «Pour une nouvelle culture de l’eau» (200 000 selon la police).
Les protestataires ont marché au son des fanfares et sous les couleurs rouge et jaune de l’Aragon et de la Catalogne. En tête des cortèges, ils brandissaient un gigantesque tuyau en plastique gonflable terminé par un nœud, l’emblème de cette lutte démarrée il y a plus d’un an.
«On pille l’Ebre sans aucune raison et nous ne le tolérerons pas», a déclaré Marcelino Iglesias, président du Gouvernement régional aragonais, interrogé par l’agence de presse espagnole Efe.
A une semaine du Sommet européen qui doit se tenir à Barcelone, les manifestants ont demandé que l’Union renonce à la subvention demandée par Madrid. En effet, le gouvernement de José Maria Aznar table sur un financement européen à hauteur de 30%.

MODÈLE DÉPASSÉ
Mais surtout, ils ont réclamé une approche plus écologiste et moins économiste du problème de l’eau. «Le principal problème du transvasement est qu’il consolide un modèle incompatible avec la notion de développement durable. Un modèle absurde qui pourtant se répand sur toute la côte méditerranéenne», a dénoncé Santiago Martín, du mouvement «Ecologistes en action».
Les manifestations se sont déroulées à l’appel d’une trentaine d’organisations écologistes, agricoles et syndicales. La Gauche unie, le Parti socialiste et des mouvements nationalistes locaux se sont joints au mouvement.

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