N°9 Novembre 1999 [svlogo.jpg] TESTS ET BATTERIES DE TESTS D'APPRECIATION DE LA VIGILANCE Sommeil et Vigilance N°9 [1]Sommaire [2]Tests et batteries de tests d'appréciation de la vigilance Didier LAGARDE et Denise BATEJAT [3]Le sommeil dans la dépression saisonnière Docteur Thierry FAIVRE [4]Le sommeil dans "à la recherche du temps perdu" Professeur Dominique Mabin [5]PROSOM: Association Nationale SFRS [6]Accueil du site Didier LAGARDE et Denise BATEJAT Institut de Médecine Aérospatiale du Service de Santé des Armées - BP 73 - 91223 BRETIGNY/ORGE Cedex [mapf1.jpg] Apprécier l'état ou le niveau de vigilance d'un sujet suppose que l'on sache définir exactement ce que l'on entend par vigilance. Or l'ambiguïté de ce terme existe depuis sa création. Pour Henry HEAD (1926) (in [7]11) le terme de vigilance représentait l'état d'efficacité physiologique maximale du système nerveux central. Autrement dit, pour lui, vigilance et attention soutenue signifient la même chose. Actuellement l'accord semble peu à peu se faire sinon sur une définition, du moins sur un sens commun à donner à ces mots. Pour le physiologiste, la vigilance est un état générique situant le sujet sur un continuum nycthéméral allant de l'état d'attention soutenue à l'état de sommeil profond. Il existe ainsi un lien direct entre vigilance et attention. Pour de faibles niveaux de vigilance, l'attention est quasi-nulle mais il ne s'agit pas d'une proposition réciproque. On peut être éveillé et non attentif de façon globale, ou non attentif à la tâche. Toute privation ou perturbation du sommeil est à l'origine de l'altération de l'état de vigilance. La vigilance est définie dans ce cas précis comme le maintien d'un éveil actif sous-entendant directement le maintien d'une performance, donc d'une attention soutenue. Pour le psychologue l'attention est l'application volontaire de l'esprit à son objet. Le concept se distingue de la vigilance qui est une condition nécessaire (être éveillé) mais non suffisante pour parler d'attention. L'attention doit plutôt être comprise comme l'attribution à chaque instant par le cerveau de ses ressources au fonctionnement d'un ou plusieurs de ses équipements et capacités intellectuelles (perception, mémoire, raisonnement, action). Pour les neuropsychiatres, l'attention n'est pas une faculté mais une qualité de l'activité mentale. Enfin pour les électrophysiologistes, on peut distinguer l'attention focalisée, de la réaction d'orientation, de l'attente et du retrait d'attention. L'attente et l'attention focalisée ayant été individualisées par des rythmes électrocorticaux distincts (rythme mu et rythme bêta) ([8]5). Ainsi, très tôt, le phénomène de vigilance a fait l'objet d'études visant à mettre en évidence ses composants afin de trouver les tests les plus appropriés pour les évaluer. Parmi les nombreux auteurs ayant travaillé dans ce domaine, il faut citer MACKWORTH (1948) puis WARM et JERISON (1984) qui ont nettement mis en évidence que le niveau de vigilance (et donc l'attention soutenue) était affecté par le moment de la journée, la charge mnésique, le background de la situation vécue, le type de cible à discriminer, les modalités sensorielles explorées, ainsi que par de nombreux autres paramètres ([9]3). L'intérêt de l'appréciation de la vigilance globale d'un sujet ou de son attention soutenue à un instant " t " est grand et concerne à la fois des situations pathologiques (troubles du sommeil) et des situations physiologiques (situation de privation de sommeil, de perturbation du rythme veille-sommeil), ainsi que des études de recherches sur les effets des drogues stimulantes ([10]4). 1 - Mesures subjectives de la vigilance 1. 1. L'agenda de sommeil Très utilisé en clinique mais aussi en recherche, il permet de donner un relevé fidèle des principaux horaires et durées de sommeil pendant une période d'une ou plusieurs semaines. 1.2. Les échelles Les échelles visuelles analogiques utilisées sont nombreuses ; celle de BOND et LADER (1974) permet d'explorer par auto-évaluation de nombreux états : éveil, capacité de concentration, mais aussi anxiété et thymie. L'échelle comprend 16 dimensions qui se présentent sous la forme de 16 lignes de 10 centimètres sur lesquelles le sujet de situe par rapport aux extrêmes des dimensions inscrites en début et fin de ligne à l'aide d'un trait vertical. Ces échelles peuvent être implantées sur ordinateur ([11]6). L'auto-évaluation de la probabilité de s'endormir dans diverses situations de la vie quotidienne peut être effectuée à partir de l'échelle de somnolence de STANFORD. L'échelle établit un score de somnolence à partir de la probabilité de s'endormir dans des situations habituelles (in [12]2). 1.3. Les questionnaires Ils permettent d'évaluer qualitativement et quantitativement le sommeil soit après la prise de médicaments agissant sur le sommeil (Questionnaires de LEEDS), soit dans les 24 heures qui précèdent une hospitalisation (Questionnaire du St Mary's Hospital). Le questionnaire de HORNE et OSTBERG permet de déterminer la typologie circadienne (matin-soir). Enfin, en psychiatrie, on utilise parfois l'index de qualité du sommeil de PITTSBURGH (in [13]1). 2 - Mesures objectives de la vigilance 2.1. Les méthodes électrophysiologiques Parmi les méthodes électrophysiologiques utilisables pour apprécier le niveau de vigilance d'un sujet, c'est le MSLT (Multiple Sleep Latency test) ou TILE (Test Itératif des Latences d'Endormissement) qui est le plus utilisé. 2.1.1. MSLT (ou TILE), il est basé sur le postulat selon lequel un sujet s'endort d'autant plus rapidement qu'il est somnolent. Il mesure cinq fois dans la journée le temps mis par un sujet à s'endormir en suivant une procédure stricte et reproductible développée par Mary CARSKADON, basée sur l'apparition des premiers stades électrophysiologiques du sommeil (in [14]6). C'est ainsi qu'une latence d'endormissement supérieure à 10 minutes traduit une vigilance normale, entre 5 et 10 minutes une somnolence modérée et inférieure à 5 minutes une somnolence sévère. Les résultats obtenus chez des sujets sains fluctuent en moyenne entre 10 et 20 minutes. 2.1.2. Le M.W.T. (Maintenance of Wakefulness Test) ou test de maintien de l'éveil mesure la capacité à rester éveillé. Les sujets, dans un environnement proche de celui mis en œuvre dans le TILE, ont pour instruction de rester éveillé sans mettre en œuvre un comportement incompatible avec le sommeil. Les latences d'endormissement sont en moyenne supérieures à 18 minutes chez les sujets sains, 10 minutes chez les narcoleptiques. (MlTLER 1982) ([15]8). 2.1.3. Le M.A.S.T. (Modified Assessment of Sleepiness Test) combine les deux tests précédents :3 M.S.L.T. + 2 M.W.T. dans la journée. La technique de passation de ce test pose un certain nombre de problèmes non encore résolus (ROEHRS et ROTH 1992) ([16]10). Par ailleurs le M.S.L.T. et le M.W.T. n'évaluant pas le même éveil, il s'agit de tests complémentaires. Chacun ayant sa spécificité, le M.S.L.T. pour l'évaluation de l'hypersommie et le M.W.T. pour l'évaluation des traitements. 2.1.4. Le test d'atténuation du rythme alpha réalisé toutes les deux heures permet de déterminer le coefficient d'atténuation de l'alpha (rapport de la puissance moyenne de l'alpha yeux fermés sur la puissance moyenne de l'alpha yeux ouverts). Plus ce rapport est élevé et plus le sujet est éveillé, plus ce rapport est bas et plus le sujet est somnolent([17]2). 2.1.5. L'EEG en ambulatoire et de longue durée Il est utilisé en clinique pour vérifier la durée et l'horaire des épisodes de sommeil spontanés dans différentes pathologies, mais aussi en recherche pour évaluer, par exemple, la puissance de l'effet éveillant d'un psychostimulant lors d'une situation de privation de sommeil en comptabilisant le nombre d'épisodes de microsommeil ou l'évolution des différentes bandes de fréquence ([18]6). 2.1.6. Les potentiels évoqués correspondent à la réponse électrique du cerveau à des stimuli répétitifs et sont présentés comme des corrélations électriques d'activités cognitives. Trois types de potentiels liés à l'événement peuvent correspondre à des mesures de la vigilance cérébrale : les réponses évoquées simples, l'onde P300 et la variation contingente négative. Ces réponses apparaissent modifiées chez des sujets privés de sommeil et chez des narcoleptiques en comparaison avec des témoins reposés (modification d'amplitude et de latence) ([19]2). 2.2. Les tests de vigilance Les tests de vigilance reposent sur la détection de signaux présentés à des intervalles de temps aléatoires pendant des périodes de temps prolongées et sans repos. L'origine de ces tests, provient d'études réalisées par MACKWORTH pour la R.A.F. à l'issue de la seconde guerre mondiale et ayant permis de mettre en évidence que le repérage d'ennemis à partir d'une console radar était fortement altéré après 30 minutes d'observation continue. Un des premiers tests parmi les plus connus est le test de l'horloge qui consiste à repérer sur une longue période, le nombre de fois où l'aiguille au lieu de se déplacer d'un cran toutes les secondes, se déplace de deux crans à la fois (ce signal intervient de façon aléatoire 12 fois toutes les 30 minutes). Généralement un bon test de vigilance associe un effet de cohérence entre le stimulus présenté et la réponse associée, et un bon apprentissage de la tâche 2.3. Autres tests De nombreux autres tests ne répondant pas strictement aux critères définis ci-avant, sont aussi utilisés pour apprécier le niveau de vigilance des sujets. 2.3.1. Le test de barrage de signes ou test d'attention concentrée de TOULOUSE et PIERON évalue la performance attentionnelle du sujet dans une tâche d'attention focalisée. Le sujet doit repérer sur une page contenant 1600 signes, trois formes différentes qui lui sont présentées en début de page. La durée du test est de 10 minutes ; le score prend en compte à la fois la vitesse d'exécution et l'exactitude des réponses ([20]6). 2.3.2. Le taux de non-réponses à différents tests cognitifs et psychomoteurs, comme cela se voit lors de situations de privation de sommeil dans des tests de mémoire, de traitement mathématique, de temps de réaction, etc.... ou bien le nombre de pertes de contrôle essentiellement dans les tests de poursuite visuelle ([21]6). Cette "absence" pendant laquelle le sujet ne répond plus a été qualifiée dès 1959 par WILLIAMS, LUBIN et GOUDNOW du Walter Reed Army Institute du Maryland, de "lapse hypothesis". Ces absences sont probablement provoquées par de courtes (1 à 2 secondes) mais irrésistibles périodes de sommeil appelées "microsommeils" ou du terme anglo-saxon: "microsleep" ([22]11) (cf figure). 2.3.3. Le test de fréquence critique de fusion lumineuse (C.F.F.F. : Critical Flicker Fusion Frequency). Ce test mesure la fréquence seuil en Hertz, pour la quelle un stimulus discontinu visuel est perçu comme étant continu et vice versa. Il est approprié pour étudier l'éveil du système nerveux central et évaluer le stress et la fatigue d'un sujet lors de tâches à caractère cognitif ([23]7). 2.3.4. La pupillométrie. L'usage de la pupillométrie repose sur le postulat selon lequel une vigilance élevée va de pair avec une pupille dilatée et stable, alors qu'une vigilance diminuée et un état de somnolence vont de pair avec une pupille petite et instable. Il semblerait cependant que ce soit une méthode de mesure de la vigilance peu sensible ([24]9). 2.3.5. L'actimétrie de Poignet est une méthode de mesure pratique (actimètre de petite taille porté au poignet comme une montre) mais qui ne mesure pas le niveau de vigilance d'un individu. Elle mesure l'activité motrice et permet ainsi de déterminer les phases d'activité et de repos d'un sujet. Trop souvent, repos est confondu avec sommeil et activité avec éveil. Elle permet cependant d'établir très souvent des corrélations intéressantes entre activité motrice et mesures électrophysiologiques ([25]9). En conclusion, les tests et batteries des tests d'appréciation de la vigilance sont nombreux. Certains sont d'utilisation aisée au domicile du patient ou dans le cabinet médical (méthodes subjectives essentiellement), d'autres demandent à être utilisés en milieu spécialisé ou dans des centres de recherche (méthodes électrophysiologiques, tests informatisés, .... ). Quels qu'ils soient, leur utilisation et leur interprétation dépendent de règles bien définies qu'il est nécesssaire de respecter, la plupart des résultats dits contradictoires observés dans la littérature viennent d'un suivi de procédures différentes ou d'un environnement mal contrôlé. [mapf2.gif] Sessions * 1 = 3 h d'éveil * 2 = 7 h d'éveil * 3 = 15 h d'éveil * 4 = 19 h d'éveil * 5 = 27h d'éveil * 6 = 31 h d'éveil * 7 = 39 h d'éveil * 8 = 43 h d'éveil * 9 = 51 h d'éveil * 10= 55h d'éveil * Session de 11 à 14 = récupération Légende: Pourcentage de " non-réponse " lors d'un test psychomoteur de temps de réaction (SIRES battery) réalisé à l'occasion d'une privation de sommeil de 64 heures chez 16 sujets sains. Les courbes montrent l'intérêt de la prise de caféine à libération prolongée (STINERGIC) par rapport à la situation placebo. (Extrait de l'article: " Cognitive performance during a 64 hours sleep deprivation : interest of a slow release caffeine, par Ph. DOIREAU, D. BATEJAT, F. CHAUFFARD, M. ENSLEN, P. TACHON, S. PRADELLA et D. LAGARDE. AGARD conference proceedings N? 599 "Aeromedical support issues in contingency opérations "Rotterdam 29 september/1er October 1997. RTO/NATO 1998, ISBN 92-836-0059-2 : Quebec-Canada pp 12-1112-11. Bibliographie * 1 - BILLIARD. M. 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