10 heures
         
         Malgré les marmites qui n'arrêtent pas de tomber, les sections 
          d'assaut des 5,6, et 7e compagnies du 2e bataillon, sous les ordres 
          des sous-lieutenants Salmon, Descubes et Menieux (les autres officiers 
          sont hors de combats) et les 10, 11,12e compagnies du 3e bataillon sous 
          les ordres du commandant Ymonet (qui se fera tué le premier en tête 
          de ses hommes ), se lancent à l'attaque des positions allemandes. Aucune 
          brèche n'est visible, les sections se font décimer par le tir des mitrailleuses, 
          les hommes ne peuvent que se fondre au terrain et attendre la nuit pour 
          rejoindre à la lueur des explosions les lignes françaises.
         Seul une centaine d'hommes de la 10e compagnie a pu trouver 
          une brèche dans les barbelés et se jeter à la baïonnette sur les défenseurs. 
          Un terrible corps a corps s'engage mais les Allemands reçoivent d'importants 
          renforts. Les soldats du 63e se retrouvent vite submergés, acculés, 
          isolés, ils se font massacrer les uns après les autres. 
        La 12e compagnie essaye de leur porter secours mais elle n'arrive 
          pas à percer et se fait décimer par les tirs de mitrailleuses qui la 
          prenne de flan, la 11e compagnie, subit le même sort, les braves de 
          la 10e se font anéantir jusqu'au dernier dans la tranchée qu'ils avaient 
          essayé de conquérir, il n'y aura pas de quartier et aucun d'eux ne reviendra 
          pour témoigner sur ce qu'ils ont vécu.
         
        18 heures
          
        Un nouvelle effort est demandé au régiment pour relancer l'attaque, 
          mais impossible de passer, tout le secteur est violemment bombardé, 
          les liaisons ne peuvent être établies régulièrement avec le PC du colonel.
         Ordre et contre-ordre arrivent, l'attaque est annulée, il était 
          temps, 15 officiers et 500 hommes ont été tués, les soldat du 63e n'ont 
          eu droit pendant deux jours et deux nuits de combats incessants sous 
          un temps exécrable, ni au sommeil, ni au ravitaillement, (pour se désaltérer, 
          ils en étaient réduits à boire l'eau croupie qui stagne au fond des 
          tranchées et des trous d'obus).
         Tard le soir, le colonel arrive enfin à obtenir que son régiment 
          soit relevé. Pendant la nuit du lundi 5 au mardi 6 avril 1915 , ce seront 
          des cohortes d'hommes transits, recouverts de boue et à la limite de 
          l'épuisement qui rejoindront les campements de Manonville et de Minorville 
          pour un repos qu'ils jugeront beaucoup trop court après ce qu'ils avaient 
          subi.
         Les journées de Régnieville seront 
          le facteur décisif qui déclenchera le refus de monter en ligne de la 
          5e compagnie, (voir page: Flirey le drame) 
          les hommes ne voulaient plus qu'ont les considérent comme du bétail, 
          ou des esclaves, revendication des plus légitimes.
         Ils étaient, et ils le savaient fort 
          bien car on le leur avait assez souvent répété, de l'école communale 
          à la caserne, des hommes libres, des citoyens de plein droit 
          qui composaient les armées de la république. 
        Malheureusement il faudra attendre 
          les grandes mutineries de 1917 pour que l'état-major prenne conscience 
          de cette évidence et accorde un peu plus d'importance aux hommes qu'au 
          matériel ou aux munitions.