La famille laïcité dans la base LM10 (Le Monde 10 ans - 91-00)


La base LM10

En marge de projets de recherche, une base documentaire, nommée LM10, a été constituée à partir des archives électroniques de 10 années du journal Le Monde : 1991 à 2000. Cette base totalise environ 200 millions de mots (à titre d'ordre de grandeur, rappelons qu'un roman de taille moyenne comprend de l'ordre de 100 000 mots. LM10 correspond à quelque 2 000 romans).

Dans LM10, chaque document (= article) est assorti d'un certain nombre de renseignements signalétiques :
Les rubriques les plus importantes (par ordre décroissant du nombre d'articles qui en relèvent) sont les suivantes :

"Expansions" disponibles des acronymes de rubriques

ANA             = Horizons - Analyses
ART             = Culture
ASP             = Arts et spectacles
AUJ             = Monde aujourd'hui
CAM             = Campus
CAR             = Carnet
COM             = Communication
DEB             = Horizons - Débats
ECO             = Economie
EMP             = Emploi
EMS             = Enseignemen-, Medecine, Science
ETR             = Etranger
EUR             = Espace Européen
EX1, SP1,EX2, SP2,EX3, SPA, SP3, XXX = Supplément exceptionnel
IDE             = Débats
IDF             = Ile de France
ING             = Informations générales
INI             = Monde Initiatives
IPC             = Informations pratiques Carnet
LIV             = Monde des Livres
LOC             = Heures locales
MAF             = Monde des Affaires
MCI             = Monde des Sciences
MDE             = Monde de l'Economie
PDE             = Elections présidentielles
POL             = Politique
PRP             = Elections présidentielles - Paris
REG             = Regions
RTV             = Radio Television
SAM             = Samedi
SOC             = Société
SPO             = Sports
TEM             = Temps Libre
USM             = Un seul Monde
VIS             = Monde sans Visa

Les genres les plus importants (par ordre décroissant du nombre d'articles qui en relèvent) sont les suivants :

NB
  1. Un certain nombre d'articles ne se voient pas assigner de genre et/ou de rubrique ;
  2. Un même article peut être attribué à la fois à plusieurs genres ;
  3. On ne dispose pas de la signification de toutes les indications de rubrique ou de genre ;
  4. Il est probable que sur 10 ans ont évolué les "frontières" des catégories employées pour classer les documents (un documentaliste peut avoir classé un article dans une rubrique et un autre un article similaire dans une autre) voir les catégories elles-mêmes (par exemple des rubriques peuvent apparaître et d'autres disparaître).

Etats de la base LM10

Chacun des articles de la base figure en plusieurs états, dont :
Cf. section suivante pour des exemples.

Le corpus Laïcité-LM10

Les articles en 'laï[qc]'

Ont été extraits de la base LM10 tous les articles comprenenant le patron (l'expression régulière) 'laï[qc]', c'est-à-dire laïc ou laïq.
Il y avait quelques intrus :
Une partie des documents correspondants ont été enlevés du corpus. Mais, à la suite d'une erreur de manipulation, il reste des documents comprenant :
Il y a donc, comme souvent du bruit, c'est-à-dire des documents non pertinents.

Le corpus final comprend 2 837 articles, soit au total de l'ordre de 3 300 000 mots.

Un article dans tous ses états (janvier 1991)

Texte "nu"

<doc n="179905"/>
LA RELIGION AU LYCÉE conférences au lycée Buffon , sous la direction de Danièle Hervieu-Léger .
Cerf , 158 p . , 79 F. UNIVERS SCOLAIRES ET RELIGIONS sous la direction de Jean-Paul Willaime .
Cerf , 152 p . , 95 F. ( 1 ) Sondages Sofres parus respectivement dans Télérama daté du 19 décembre 1990 et dans Universalia 1989 ( Encyclopaedia Universalis ) . ( 2 ) Régine Azria , Danièle Hervieu-Léger , Gilles Kepel , Patrick Michel , Jean-Paul Willaime . ( 3 ) Système d' aide aux enseignants mis en place par le rectorat . ( 4 ) Dictionnaire culturel de la Bible , Cerf Nathan . ( 5 ) Dans la revue Il est une foi , octobre 1990 .
Moïse et saint Augustin au lycée Est -il possible d' introduire à l' école , au nom de la tolérance , de la morale et de la culture générale , des cours de religion ?
C' est à l' école , sur le pavé public , dans les salles et les préaux que s' ausculte régulièrement le pouls de l' institution laïque et que se jaugent finalement les séquelles de ce que l' historien Emile Poulat appelait " la guerre des deux France " .
A la question : " Seriez -vous favorable à un enseignement de l' histoire des religions à l' école ? " , 58 % des Français ( contre 36 % ) répondent oui , dans un récent sondage de la Sofres publié par l' hebdomadaire Télérama .
Confirmant leur voeu exprimé en 1988 ( 1 ) : ils étaient alors 65 % ( contre 28 % ) .
Il n' y aurait donc plus crime de lèse-laïcité à intégrer dans la sphère publique la religion , autrefois résolument " privatisée " .
Les motivations d' un tel souhait sont de plusieurs ordres .
Avancées plus ou moins à part égales , on distingue ainsi quatre grandes tendances qui visent à introduire un tel enseignement : l' apprentissage de la tolérance , l' extension de la culture générale , le développement de valeurs morales , la meilleure connaissance d' une partie des racines culturelles de l' histoire de France .
Il va de soi , pour les personnes interrogées , qu' en aucun cas ces " cours de religions " ne sauraient être apologétiques et se confondre avec le catéchisme .
Et les professeurs d' histoire ( pour 53 % ) seraient les mieux placés pour dispenser un tel enseignement , sans pour autant exclure ( tolérance oblige ) la participation de responsables religieux .
Saint Sébastien victime ... des Indiens
Mais quelle qu' en soit la nature , le manque à gagner religieux dans le monde scolaire , stigmatisé par de nombreuses voix - parents d' élèves , professeurs , élèves et bien sûr ... religieux - continue de soulever les passions .
Le silence du ministère de l' éducation nationale , qui ne sait encore à qui donner sa bénédiction , atteste de la sensibilité du sujet .
Les messages religieux , même réduits à leur substance historique , effrayent toujours , plus que les messages politiques , ou même philosophiques .
L' actualité elle -même impose de mieux connaître les fondements religieux afin d' éviter les contre sens et la montée de l' intolérance .
Et comment enseigner Kant sans le resituer dans la tradition du piétisme protestant et sans faire mention de sa qualité de théologien ?
Un proviseur de lycée parisien , Mme Mady Noin-Ledanois au lycée Buffon , a , de fait , prouvé qu' il était possible de parler religions dans la sacro-sainte enceinte de la " laïque " .
Ebahie devant l' interprétation iconoclaste d' un élève qui fit d' un saint Sébastien martyr percé de flèches peint par Andrea Mantegna " une victime des Indiens lors de la conquête de l' Ouest américain " ! elle a décidé d' organiser , pendant l' année scolaire 1989-1990 , une série de conférences sur les religions en mettant à contribution une équipe de sociologues et un professeur d' université ( 2 ) .
L' opération n' est pas restée pieusement dans les cahiers à spirales .
Des professeurs d' histoire et d' instruction civique ( grands prêtres , jadis , de la morale laïque ) ont prolongé l' initiative en mettant sur pied des projets d' action éducative ( 3 ) sur le thème : " Vous avez dit tolérance ? " Deux cent cinquante élèves ont ainsi creusé la question des libertés : de pensée , de culte , de réunion et d' association , de presse ...
Le cycle de conférences a donné naissance à un livre et , conjointement , à un Dictionnaire culturel de la Bible , aisément accessible à tous ( 4 ) .
Un effet de balancier
Cette idée même d' un enseignement d' histoire des religions est , somme toute , le fruit logique d' une lente évolution dans la société française entre le dix-neuvième et le vingtième siècle .
Il ne saurait se réduire au seul constat d' une simple baisse de niveau , qui nuit à la compréhension de Claudel , de Mauriac , de Gide ou de Bernanos , d' un pur déficit de culture religieuse , qui assimile saint Augustin à une station de métro , au mieux à un moine français laborieux du Moyen Age , et très rarement à un Kabyle du quatrième siècle , père de l' Eglise , dont les textes étaient étudiés , encore voici un siècle , pour l' apprentissage du latin .
Tout tient dans un effet de balancier .
Au début du dix-neuvième siècle , l' enseignement de " l' histoire sainte " et du catéchisme constituait la pierre angulaire de l' instruction générale .
Dans les années 1830 , par exemple , l' obtention du brevet élémentaire était subordonnée à l' acquisition de connaissances historiques et géographiques qui étaient supposées connues , car nécessaires à la bonne compréhension des récits bibliques .
Autrement dit , par souci de culture religieuse , on comblait les vides de culture générale .
Le mythe de l' école libératrice
En instaurant la laïcité , en s' attaquant de front au pouvoir de l' Eglise catholique , aux particularismes locaux , à toutes les institutions ou tous les groupes de cultures qui pouvaient s' interposer entre l' etat nation et l' individu citoyen , l' etat éducateur a cherché progressivement à clairement dissocier les valeurs chrétiennes et les valeurs républicaines .
Progressivement , car , pour mémoire , jusqu' en 1923 , les cours de morale devaient officiellement enseigner les " devoirs envers Dieu " .
Puis , le temps et la sécularisation aidant , l' effet s' est inversé : par souci de culture générale , on déplore aujourd'hui l' absence de culture religieuse .
Sociologiquement , Jean-Paul Willaime , dans Univers scolaires et religions , démonte le mécanisme de l' horloge laïcité . " La culture scolaire , explique -t-il , s' est sentie d' autant plus forte et assurée par rapport au religieux qu' elle a été portée par l' utopie de la modernité . " Mais , progressivement , le mythe de l' école libératrice s' est ébranlé .
L' école unificatrice est devenue génératrice d' inégalités sociales .
L' analyse de Jean-Paul Willaime est , d'ailleurs , étayée par les faits : dans son langage même , l' école n' institutionnalise -t-elle pas l' exclusion quand elle souhaite élever 80 % d' une classe d' âge au niveau du bac ?
Car elle signifie aussi que 20 % ne pourront y parvenir .
Le souhait engendre compétition et , parfois , découragement .
La relation du savoir et du sens
En outre , la culture scolaire n' a plus , de fait , la même suprématie sur les autres cultures de la société civile .
Les sources d' information , elles -mêmes , se sont multipliées .
Il s' agit aujourd'hui d' apprendre à les discerner , à en soupeser les contenus .
Les cultures internationalessont à portée de téléviseurs , de livres , de revues .
En un mot , la société est devenue plus moderne que l' école , qui a cessé d' être une utopie .
Dans le même temps , les religions elle -mêmes ont modifié leur comportement vis-à-vis de la modernité et ne représentent plus une culture scolaire alternative .
A preuve , par exemple , pour Jean-Paul Willaime , la querelle scolaire de 1984 , qui n' est pas , selon lui , " l' expression du conflit traditionnel entre l' Eglise et la République " , mais plutôt " une affirmation du droit des familles face à l' Etat , une attitude consumériste selon laquelle on réclame la possibilité d' avoir un recours face à l' offre éducative publique " .
L' école " désutopisée " , nous serions donc , sociologiquement parlant , entrés dans une " seconde laïcisation " , la laïcité devenant plus neutre et soucieuse de pluralisme . " Les enseignants et les clercs continuent à jouer leur dispute traditionnelle autour de l' école , remarque Jean-Paul Willaime , alors qu' objectivement ils poursuivent le même but : redéfinir un projet éducatif dans une modernité critique d' elle -même .
Si la religion n' est plus perçue comme l' envers de modernité , si elle tend à être culturellement revalorisée , si l' école publique redécouvre la dimension religieuse des cultures , les rapports entre cultures scolaires et religions s' en trouveront profondément modifiés . "
Cela passe -t-il spécifiquement par un enseignement de l' histoire des religions ?
Jean Baubérot , protestant , directeur de la section religieuse de l' Ecole pratique des hautes études , milite dans ce sens , à contre-courant de l' opinion des enseignants favorables à l' approfondissement des composantes religieuses de l' ensemble des disciplines ( littérature , histoire , etc. ) .
Car , explique -t-il ( 5 ) , " l' étude de l' histoire des religions amènera à se poser explicitement la question de la relation du savoir et du sens ...
C' est un cours qui posera des questions à d' autres disciplines sur la nature même de ce qui est enseigné . " Serait -ce là la nouvelle utopie de l' école ?

Texte lemmatisé (réduit par souci de concision aux phrases en 'laï[qc]')

<doc n="179905"/>
...ce être à le école , sur le pavé public , dans le salle et le préau que se_ausculter régulièrement le pouls de le institution laïque et que se_jauger finalement le séquelle de ce que le historien Emile Poulat appeler " le guerre de le deux France " .
...
il ne y avoir donc plus crime de
lèse-laïcité à intégrer dans le sphère publique le religion , autrefois résolument " privatiser " . un proviseur de lycée parisien , madame Mady Noin-ledanois à le lycée Buffon , prouver , de_fait , que il être possible de parler religion dans le sacro-saint enceinte de le " laïque " .
...
de le professeur de histoire et de instruction civique ( grand prêtre , jadis , de le morale laïque ) prolonger le initiative en mettre sur pied de le projet de action éducatif ( 3 ) sur le thème : " vous dire tolérance ?
...
le mythe de le école libérateur en instaurer le laïcité , en se_attaquer de front à le pouvoir de le église catholique , à le particularisme local , à tout_le institution ou tout_le groupe de culture qui se_interposer entre le état nation et le individu citoyen , le état éducateur chercher progressivement à clairement dissocier le valeur chrétien et le valeur républicain .
...
sociologiquement , Jean-paul Willaime , dans univers scolaire et religion , démonter le mécanisme de le horloge laïcité .
...
le école " désutopisée " , nous être donc , sociologiquement parler , entrer dans un " second laïcisation " , le laïcité devenir plus neutre et soucieux de pluralisme
...

Triplets syntaxiques (<opérateur><relation><opérande>)

Les triplets sont les résultats de l'analyseur syntaxique robuste et partiel Syntex, développé sous la responsabilité de Didier Bourigault à l'ERSS (Equipe de Recherche en Syntaxe et Sémantique CNRS et université de Toulouse-le-Mirail). Syntex fournit les relations sujet/verbe, verbe/objet, nom/adjectif épithète, etc., sur la version lemmatisée des documents.


Exemple de sorties

<année><mois><n° doc><n° par><n°phrase><cat lemme1><lemme1><relation><cat lemme2><lemme2>
91      0191    179447  5       2       V       respecter       r_SUJ S       état laïc
91      0191    179447  5       2       N       état    r_EPI   A       laïc
91      0191    179509  13      2       N       symbole r_EPI   N laïcité
91      0191    179810  12      1       N       éthique r_EPI   A laïque
91      0191    179810  14      3       N       modèle  r_EPI   N laïcité
91      0191    179905  3       1       N       pouls   r_EPI   S institution laïque
91      0191    179905  3       1       N       institution     r_EPI A       laïque
91      0191    179905  3       4       N       crime   r_EPI   N lèse-laïcité
91      0191    179905  8       2       N       morale  r_EPI   A laïque
91      0191    179905  13      1       V       instaurer       r_OBJ N       laïcité
91      0191    179908  4       2       N       étape   r_EPI   N laïcisation
91      0191    179908  5       1       N       histoire        r_EPI N       laïcité
91      0191    179908  5       2       N       mot     r_EPI   N laïcité
91      0191    179908  5       2       V       parler  r_de    N laïcisation
91      0191    179908  5       2       V       parler  r_de    S laïcisation de le état
91      0191    179908  5       2       N       laïcisation     r_EPI N       état

[En gras les triplets du document donné en exemple]

On trouve dans <lemme1> ou <lemme2> des syntagmes (notés S), comme "laïcisation de le état". On trouve ensuite la décomposition du S : cf. "institution laïque".
"respecter       r_SUJ   S       état laïc" signifie que "état laïc" est sujet de "respecter".
"instaurer       r_OBJ   N       laïcité" signifie que "laïcité" est objet de "instaurer".
Par ailleurs, la relation EPI correspond à EPI pour les adjectifs, mais aussi à "de" dans "N de (déterminant) N" : "laïcisation     r_EPI   N     état" renvoie sans doute à "laïcisation de l'état".
On perd par contre la relation sujet/verbe/complément (une relation ternaire est 'éclatée' en 2 triplets). Dans le premier triplet, on ne sait par exemple pas ce que respecte l'état laïc.

Les lemmes en position d'opérateur (1) et d'opérande (2)


+--------------------------+-------------+
| .*laï.* en position 1    | Occurrences |
+--------------------------+-------------+
| laïcité                  |         343 |
| laïque                   |         184 |
| laïc                     |         169 |
| laïcisation              |         110 |
| laïciser                 |          49 |
| se laïciser              |          24 |
| laïcisme                 |          17 |
| laïcat                   |          16 |
| laïcards                 |           8 |
| délaïcisation            |           4 |
| antilaïques              |           2 |
| laïcicité                |           2 |
| islamo-laïcs             |           2 |
| laïcisants               |           1 |
| socialo-laïque           |           1 |
| laïco-assimilationnistes |           1 |
| laïcard                  |           1 |
+--------------------------+-------------+

+--------------------------+-------------+
| .*laï.* en position 2    | Occurrences |
+--------------------------+-------------+
| laïque                   |        1707 |
| laïcité                  |        1269 |
| laïc                     |         684 |
| laïcisation              |          72 |
| laïciser                 |          33 |
| laïcisme                 |          30 |
| laïcat                   |          22 |
| laïcards                 |           5 |
| laïciste                 |           5 |
| laïcisateur              |           4 |
| lèse-laïcité             |           3 |
| galaïco-portugais        |           2 |
| Bellaïch                 |           1 |
| beaujo-laïc              |           1 |
| hezbollaïques            |           1 |
| laïcarde                 |           1 |
| laïci                    |           1 |
| laïco-assimilationniste  |           1 |
| laïco-assimilationnistes |           1 |
| laïco-communistes        |           1 |
| laïcïté                  |           1 |
+--------------------------+-------------+

NB
On voit qu'il reste (quelques) intrus. Et des fautes de frappe (laïci).
Les comptes en position 1 et en position 2 ne s'additionnent pas toujours : une occurrence d'un même lemme peut apparaître en même temps comme opérateur et comme opérande.