Nous voudrions nous interroger sur le sens de l'élection primaire – qui est aussi, en quelque sorte, celui du processus engagé à droite autour de la question de la candidature du président sortant. C'est que ces deux faits ont une première signification commune : l'un et l'autre engagent le processus électoral en quelque sorte par anticipation. La désignation du candidat à droite et à gauche, compte tenu de la situation particulière (impopularité inédite du président sortant, processus inédit de désignation du candidat au PS), constitue, en quelque sorte, un processus préélectoral, une sorte d'élection anticipée, voire de vaste répétition "grandeur nature" du processus électoral proprement dit. On notera d'abord que l'"élection primaire", jusque dans les termes mêmes qui la désignent, constitue une américanisation de plus des processus politiques et des logiques institutionnelles en France. En engageant un processus semblable de désignation du candidat socialiste à la présidentielle, le PS ou Europe Ecologie-Les Verts imitent des logiques politiques en usage aux Etats-Unis, mais ceci sans s'être interrogé sur la validité et la légitimité de cette importation dans la vie politique de notre pays. Cette imitation – ou, si l'on préfère, cet "emprunt" – exprime deux manques. Le premier est une insatisfaction devant les logiques politiques et institutionnelles de notre pays, une insatisfaction du même ordre que celle qui est exprimée, par exemple, par le projet de refonte des institutions formulé par Arnaud Montebourg ou par l'expression d'identités politiques nouvelles, comme le Parti de gauche. Le second manque que manifeste, selon nous, l'organisation de la primaire est l'absence de candidat légitime au PS ou à Europe Ecologie-Les Verts.